DEFENSE–
ETUDES ET ANALYSES- MDN/RESPECT LOI
© Contribution|, www.alagerie1.com/ vendredi 2 Octobre 2020
L’agence
Algérie Presse service, des chaines de télévision qui exercent dans le cadre et
hors le cadre de la loi 1*, des titres de la presse écrite et
électronique ont, tous, relayé le communiqué du ministère de la Défense
nationale du 28 septembre 2020.
Ce
communiqué faisait état de l’arrestation le 16 septembre 2020 du sieur Zohir Ansel dit Karim Sifou, prétendu président du Conseil des Jeunes Algériens,
par les services de la police judiciaire relevant de la Direction Générale de
la Sécurité Intérieure pour diverses infractions à la loi pénale.
Il est,
également, précisé dans ledit communiqué que le mis en cause a été présenté le
20 septembre 2020 devant Monsieur le procureur de la République près le
tribunal de Rouiba, où il a été inculpé, aux formes
du droit, par le magistrat instructeur et placé en détention provisoire pour
les chefs d’immixtion sans qualité dans des fonctions publiques civiles ou
militaires, usurpation de fonction et escroquerie.
Ici, il y a
lieu de signaler la célérité de l’action d’investigation des services de la
police judiciaire de la DGSI/MDN, fort louable et qui démontre le
professionnalisme, l’expérience et la compétence desdits services dans les
opérations menées pour constater les infractions pour lesquelles a été
inculpé le dénommé Zohir Ancel,
rassembler les preuves et arrêter l’auteur. C’est une mission effectuée en
toute efficacité, compétence et dans un court délai.
Cependant,
et au plan purement juridique, le communiqué du MDN n’est pas conforme à la
loi, notamment aux dispositions, claires et qui ne souffrent d’aucune ambigüité
pouvant donner lieu à une quelconque interprétation, de l’article
11/3ème alinéa du Code de Procédure Pénale.
En effet,
seul le représentant du ministère public, en l’occurrence le procureur général
ou le procureur de la République (articles 34 et 35 du Code de Procédure
Pénale), ou l’officier de police judiciaire, sur autorisation écrite du
procureur de la République peut rendre publics des éléments objectifs tirés de
la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien- fondé des
charges retenues contre les personnes mises en cause. Et, une précision
importante est donnée par le dernier alinéa de cet article 11 : « En
toutes circonstances, il est tenu compte de la présomption d’innocence et de
l’inviolabilité de la vie privée ».
Aussi, la
question que l’on peut se poser légitimement est la suivante : sur quel
fondement légal, et non politique ou de positionnement d’influence, car on est
sur le terrain de la loi, dans un cadre juridique ; le MDN a établi et
rendu public ce communiqué.
Le MDN est
une administration et n’a aucune compétence, en tant que telle, dans le domaine
des attributions dévolues par la loi aux seuls magistrats du ministère public
et aux officiers de police judicaire.
En outre, le
contenu de ce communiqué est en complète contradiction avec le principe du
secret de l’enquête. Comment une administration publique peut-elle être au
courant des éléments de la procédure judicaire ouverte contre la personne mise
en cause ?
Certes, la
DGSI relève du MDN. Mais, les services de la police judicaire, autrement dit,
pour être clair et direct, les officiers et agents de police judiciaire de cettedirection desécurité
exercent leurs attributions, conformément aux dispositions du Code de Procédure
Pénale, et sont placés sous la surveillance du procureur général et dirigés au
niveau de chaque tribunal, par le procureur de la République , sous le contrôle
de la chambre d’accusation (article 12 du Code de Procédure Pénale).
Les
officiers de police judicaire de la DGSI/MDN ont compétence sur l’ensemble du
territoire national, et opèrent sous la surveillance du procureur général près
la Cour, territorialement compétent, en tenant informé le procureur de la
République, territorialement compétent.
Les
officiers de police judicaire, en exécution des dispositions de l’article
18/2ème alinéa du Code de procédure Pénale, et dés clôture de leurs
opérations (recherche, constatation, recueil de preuves et éventuellement
arrestation du ou des auteurs) sont tenus de faire parvenir directement au
procureur de la République, l’original avec une copie certifiée conforme des
procès-verbaux qu’ils ont dressé et tous actes et documents y relatifs ainsi que
les objets saisis.
Les
officiers de police judicaire dans leurs attributions légales de recherche et
de constatation des infractions ne rendent comptent qu’au ministère public ou
au magistrat mandant, lorsque une information judiciaire est ouverte.
Aucune
autorité administrative ne peut être destinataire ou informée de la procédure
engagée, et en conséquence des procès-verbaux établis. C’est la loi, et force
doit rester à la loi.
Par
ailleurs, la mission de police judicaire des officiers et sous-officiers des
services militaires de sécurité, notamment de la DGSI/MDN, se limite aux seules
infractions d’atteinte à la sûreté de l’Etat, prévues et réprimées par les
articles 61 à 96 bis du Code Pénal, et ce conforment aux dispositions de
l’article 15 bis/1er alinéa du Code de Procédure Pénale.
Pour clore
cette analyse juridique, l’Algérie nouvelle, la République nouvelle devrait
être une réalité ; la primauté de la loi, le respect de la loi, la
conformité à la loi et à la seule loi doivent être une réalité et une pratique
quotidienne dans toutes les institutions de l’Etat, sans aucune exception.
Edifier un
Etat républicain et démocratique qui est basé sur les règles de la séparation
et de l’équilibre des pouvoirs, de l’alternance démocratique par la voie
d’élections périodiques, libres et régulières, de la bonne gouvernance,
de la primauté de la loi, de l’indépendance de la justice, de la garantie
des droits et des libertés individuels et collectifs et du respect strict
des attributions des uns et des autres ; est une noble démarche qui
requiert du détenteur de la volonté populaire, le Président de la République,
de la ténacité, de l’intransigeance et la sanction, positive ou négative. La
loi est au-dessus de tous et il ne peut y être autrement, dans un Etat de droit,
un Etat républicain et démocratique.
L’une des
priorités, pour l’avenir, sera de faire de ces principes une réalité effective.
La loi
prime. Force doit rester à la loi, à la seule loi ; la volonté ou
l’autorité éphémère, car tout exercice par une personne d’une quelconque
autorité a une fin inéluctable, par la cessation de fonction ou le rappel à
Dieu, tous les humains sont mortels ; ne doit en aucun cas se placer
au-dessus de la loi. « La loi, c’est moi » ne peut et ne doit
nullement perdurer et exister dans cette Algérie nouvelle voulue par le
Président de la République et par l’ensemble des algériennes et des algériens,
le peuple, source de tout pouvoir.
Le peuple
aspire à vivre « dans le cadre d’un Etat de droit républicain et
démocratique », et « … entend consacrer plus solennellement que
jamais la primauté du droit ».
La primauté
de la loi doit cesser d’être un slogan creux et sans consistance, l’Algérie
nouvelle se doit d’être un Etat de droit où la loi prime. Toutes les
institutions doivent s’y plier et s’y conformer. Dans le cas contraire,
l’Algérie nouvelle sera l’Algérie d’avant.
1* Le ministre de la
communication, porte-parole du gouvernement, a déclaré à l’Assemblée Populaire
Nationale le 17/09/2020 que plus de 50 chaines privées non agrées exercent en
Algérie, in dépêche de l’APS du 17/09/2020.
Colonel à la
retraite ZERROUK Ahmed,
ex-cadre/MDN