COMMUNICATION- ETUDES ET
ANALYSES- JOURNALISTE -CARTE JOURNALISTE PROFESSIONNEL- ANALYSE A. DJABALLAH
BELKACEM, 23/8/2020.
Trois ans de prison ferme et une
lourde amende …..C’est, je crois, assez cher payé pour une (ou
plusieurs ?) « infractions »
dont on ne sait pas très exactement les détails en dehors de ce qui avait
annoncé le 10 mars après la mise en détention provisoire…..laissant ainsi place
aux « accusations » aussi graves qu’incroyables les unes que les autres. Une très
lourde et très surprenante condamnation
d’un garçon que j’ai toujours connu journaliste professionnel de très grande
valeur (issu de la nouvelle génération arrivée au métier au début du nouveau
siècle….celle que nous attendions tant et tant )
et dont j’ai apprécié, à chaque fois , les qualités de reporter lors de son
passage à la radio publique et d’intervieweur
(il a interviewé des futurs « grands ») lors de ses apparitions dans
les télés privées . Un journaliste qui , en raison de
son travail a connu bien des déboires aussi bien avec les entrepreneurs publics
que privés….Ils n’acceptaient que la
médiocrité et le suivisme. Il est allé jusqu’au bout de son métier, croyant
(peut-être un peu trop…… par courage ou par naïveté ou pour le bon exemple tout
simplement , et voulant bien et mieux faire. Hélas, « chez nous, les virtuoses se décomposent
dans l’indifférence générale. Le talent est un malheur suicidaire »
écrivait déjà Yasmina Khadra (« Les chants cannibales ». Roman © Casbah Editions, Alger 2012)
-------------------------------------------------------------------------------
Une condamnation qui a suscité moult interrogations,
réactions et/ou protestations….ce qui a (re-)posé,
indirectement, le problème de la Carte
nationale du journaliste professionnel (celle-ci ayant été prise, par le
ministère de la Communication, comme
argument explicatif de sa position ce qui , certainement, a facilité le
réquisitoire …. , et, par contre-coup, toute la
problématique du journalisme, son existence et sa pratique……dans notre pays
(comme, d’ailleurs, dans d’autres pays, n’acceptant ou ne comprenant pas le
« pouvoir » de la presse….d’autant que l’émergence brutale et
anarchique, dans le champ de la communication , des réseaux sociaux et de l’information électronique a compliqué la
réflexion, les « pinceaux s’étant mélangés ») . Un
débat avec lequel on pensait en avoir
fini depuis bien longtemps, mais qui renaît de feux – allumés par qui et pourquoi ? – toujours mal éteints.
Le journalisme ? Parlons-en.
Le journalisme est devenu, de nos
jours, un véritable métier. En ce sens qu’il nécessite, pour qu’il soit exercé
avec professionnalisme, du savoir (académique…mais
aussi sociétal, le politique et l’économique y compris) et un savoir-faire
lesquels , déjà depuis plus de quatre décennies, chez
nous et plus d’un siècle ailleurs, sont enseignés au sein d’ universités et de
d’ écoles (publiques ou privées). Ne pas le reconnaître, c’est, quels que
soient les niveaux des enseignements et des enseignants ,
« descendre en flammes » tout un pan de notre Enseignement supérieur.
Il n’y pas que l’enseignement
spécialisé…il ya , aussi, pour tous les autres sortants de l’Université, la
possibilité d’acquisition du savoir-faire « sur le tas » grâce aux
encadrements in situ durant des
périodes allant de 6 mois à deux années ou bien moins selon les vocations et
les talents . C’est ce qui se faisait. C’est ce qui devrait se faire. Au
sein des entreprises de presse sérieuses, cela s’entend ! De plus, Il y a , depuis 2010/2011, une formation post-universitaire
, ouverte su concours à tous les sortants de l’Université (licenciés et
diplômés divers, ingénieurs, médecins, vétérinaires…) ,par le biais de masters
spécialisés en journalisme de deux années au sein , entre autres de l’Ensjsi d’Algérie /Ben Aknoun. Et,
certains peuvent même aller jusqu’au Doctorat en sciences de l’information.
-Le savoir-faire consiste d’abord
à apprendre les techniques rédactionnelles de base et à comprendre les
multiples manières (les genres) de pratiquer le journalisme. Des genres qui
vont du plus simple au plus compliqué et dont l’exercice habile s’acquiert petitement mais sûrement au fil du
temps et de l’expérience .
-Le savoir-faire consiste ensuite à s’imprégner des règles d’éthique et de
déontologie (ce que tout métier ou fonction durable et qui se respecte demande,
la politique y compris)…..en général et des règles communes au métier en
particulier….. A travers le monde
démocratique …..cela s’entend ! Bref, de
l’information complète et exacte…..les faits étant distincts des commentaires
et ce afin que le « consommateur » ne soit pas induit en erreur et
puisse se faire sa propre opinion. Le journaliste ? Ni juge, ni proc’, ni
gendarme, ni policier, ni espion (« khabardji ?») , ni moralisateur.
Seulement et simplement , selon un bon mot de M.Lacheraf, un « veilleur à la haute tour » , un
observateur social…..et, pourquoi pas,
dans un pays en « révolution ou réforme » un « lanceur
d’alerte ».
-Le savoir –faire consiste , enfin,
à comprendre les missions incontournables et sacrées attendues par la société
(celles de l’entreprise sont à accepter ou à refuser…tout en sachant des deux
côtés il y a un minimum non négociable) : informer, cultiver (l’éducation est le fait de la famille et de
l’école), distraire (pourquoi pas ?)
Tout ça ,
c’est bien beau mais , hélas, la presse est devenue , chez nous comme ailleurs,
ailleurs bien plus que chez nous, une affaire commerciale basée sur la vente
des exemplaires (ou sur l’audience ou sur l’audimat et aujourd’hui sur le
« clic » ) et sur l’apport
publicitaire. D’où une bataille assez rude s’appuyant sur la rapidité (souvent
sans recoupement ni contrôle de la véracité ) et sur
une économie des coûts de production sacrifiant l’élément humain de qualité au
profit de « rapporteurs » sans savoir ni savoir-faire. Ajoutez-y
trois décennies d’abandon du secteur livré à lui-même – avec une Administration
qui cumule les « faux départs » et les « abandons » ou des
« changements de couloir » en plein course (on se souvient de la loi
d’avril 90 « étouffée » laissant place à un « trou noir »
non encore (bien) comblé ; on se souvient de la loi Rahabi
sur la publicité adoptée par l’Apn mais rejetée, sans
explications par le Conseil de la
nation….et on a le cas récent de l’opération de délivrance de la carte
professionnelle suspendue parce qu’on
avait découvert on ne sait quelles « magouilles » - et aux
« affairistes », aux « experts » et consultants de tous poils, un secteur brutalement laminé par l’apparition
« sauvage » (mais « encouragée » en sous-main) de
télévisions « privées » off-shore….puis, pour corser le tout, une
explosion numérique….qui , sous-estimée
au départ, s’est développée et continue de l’être en dehors de toute
réglementation ou organisation.
Un paysage médiatique « ouvert à
tous vents », en retard de trente ans (alors qu’en 90, il s’était trouvé
en avance de cinquante par rapport aux pays « frères et amis » du
Maghreb et d’Afrique…..qui venaient alors se « documenter chez nous » ).
Le journalisme ? Donc ,un métier…..à risques , et c’est là un autre problème
tout aussi grave. Pour information, l’espérance de vie du journaliste algérien
ne dépasse pas la soixantaine sinon bien moins (49 ans en 2006
, 57 en 2008 et 60 en 2012)…..et
de 1974 à 2001, 127 journalistes ont connu une mort violente dont 110
ont été assassinés durant la décennie rouge….sans compter des arrestations et des
emprisonnements….. Mohamed Benchicou en a payé le
prix fort à cause d’une
« accusation » bidon !
Un métier avec ses travailleurs ayant des devoirs mais aussi des droits (en
plus du droit d’accéder à l’information sans entraves ,
sauf celle réglementée….. avec précision
). Encore que pour avoir (plutôt les récupérer !) ces droits, faut-il avoir un
contrat en bonne et due forme (quel que soit le niveau d’intervention,
permanent ou indépendant –free lance - ou
« pigiste »), être déclaré et inscrit à la Sécurité sociale, percevoir
un salaire décent et régulier, etc….
Et, comme tout métier, il y a un
minimum d’organisation….pour faire le tri entre le bon grain et l’ivraie, car
l’ivraie, il y en a de plus en plus……la dernière opération de délivrance de la
carte l’ayant montré ….et je me souviens , ayant dirigé , au sein du Csi (avec Abdenour Dzanouni et Khelifa
Benkara) l’opération de délivrance de la carte (1991-1992), de menaces (verbales puis
physiques) venant alors de pseudo-journalistes « travaillant » dans
les journaux affiliés au Fis-dissous…..mais ne présentant aucun contrat de
travail réglementaire(note :1467 cartes délivrées pour un total de 1500 à 1600
journalistes professionnels et assimilés).
De l’organisation, un ou des textes
(celui existant pouvant servir de base ,mais à revoir……en fonction de la
nouvelle donne politique ) ….et leur application rapide et rigoureuse par une
Commission paritaire journalistes (élus) –employeurs (élus) -administration (cette
dernière pour le seul soutien technique )….afin de délivrer une carte
d’identité professionnelle nationale de journaliste…..et pourquoi pas de
veiller au respect des règles de l’éthique et de la déontologie
professionnelle.
Il va de soi que la carte de
journaliste professionnel devra
faciliter et , pourquoi pas favoriser –sans
trop d’ « entraves » et autres « avis (dé)favorables »
venant de « qui vous savez » - comme cela se pratique dans certains
pays dits « démocratiques », les accréditations de nationaux en
tant que correspondants d’organes de presse
étrangers .