ADMNISTRATION – GOUVERNEMENT/GOUVERNANCE-
CONFERENCE NATIONALE PLAN RELANCE ECONOMIE NOUVELLE, M 18/8/2020 – INTERVENTION
PRESIDENT TEBBOUNE
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Synthèse Le Quotidein d’Oran/ Ghania Oukazi
Le président de la République a donné hier (mardi
18/8) plusieurs garanties aux hommes
d'affaires pour les encourager à investir dans les secteurs productifs et
convertir la tendance de la rente pétrolière en exportations hors
hydrocarbures.
La plus importante de ces garanties est une enveloppe de 1.900 milliards de
dinars que les banques peuvent donner «d'ici à la fin de l'année» aux
investisseurs sous forme de crédits. «On peut aussi réserver à l'investissement
10 à 12 milliards de dollars des 57 milliards de dollars de réserves de change
qu'on a, selon le prix actuel du baril de pétrole qui est au-delà de 40
dollars, on aura 24 milliards de dollars de rentrées pétrolières qu'on pourra
rajouter à nos réserves de change», a affirmé hier le président de la
République à l'ouverture de «la conférence nationale sur le plan de relance
pour une économie nouvelle» au Centre internationale des conférences Abdelatif
Rahal de Club des pins. En fait, aucun plan de relance n'a été présenté. Il
était question de faire animer des ateliers par des responsables, gestionnaires
et experts autour «des orientations et décisions économiques données par le
président de la République lors des différentes réunions et Conseils des
ministres» et «du volet économique du plan d'action du gouvernement».
Hier après-midi et aujourd'hui, 11 ateliers devaient plancher sur «la sortie de
crise du Covid-19, les opportunités d'investissement dans le cadre de la
restructuration de l'économie mondiale, gouvernance des affaires publiques».
Des recommandations sont attendues aujourd'hui sur «le développement agricole,
industriel, minier, ressources énergétiques, financement, investissement,
micro-entreprise et start-up, secteurs de soutiens, commerce extérieur,
industrie pharmaceutique, filière BTPH». Curieusement, seul le tourisme n'a pas
été retenu dans cette liste. Des experts algériens devaient intervenir par
visioconférence des Etats-Unis, du Canada et de France. Le 1erministère
clôturera la conférence aujourd'hui par un discours qu'il prononcera en début
de matinée.
«Avec 44 dollars le baril de pétrole, on
est gagnant»
Abdelmadjid Tebboune a discouru hier pendant plus d'une heure devant les
membres du gouvernement, les responsables des institutions de l'Etat, civiles
et militaires, les hauts fonctionnaires de l'Etat, un nombre important de chefs
d'entreprises et de gestionnaires, les organisations patronales, les
syndicalistes, les spécialistes et experts des questions économiques et sociales.
«Le budget national est étudié sur la base de 30 dollars alors que le pétrole
est à 44 dollars, on est gagnant», a rassuré le chef de l'Etat. Et, a-t-il
affirmé, «c'est pour cela que je refuse totalement le FMI ni l'endettement
auprès de pays amis ou autres». Il estime qu' «il faut qu'on s'attelle à
l'économie malgré cette conjoncture exceptionnelle marquée par la crise
sanitaire que nous combattons à tous les niveaux, et la chute du prix du
pétrole». Il explique que «cette rencontre vise à identifier les moyens de la
relance, on tient à ce que l'économie nouvelle profite à tous les Algériens à
l'ombre d'un Etat qui garantit à tous les chances de l'emploi». Il affirme que
« la rente tue l'initiative, il faut tirer les leçons pour s'en départir dans les
10 années à venir». D'une dépendance des hydrocarbures de 98%, Tebboune veut
que l'Algérie la réduise à 80%. «Il faut qu'en 2020-2021, on exporte pour 5
milliards de dollars de produits hors hydrocarbures au lieu des 2 milliards que
nous faisons aujourd'hui». Il persuade que «nous avons beaucoup de richesses
hors hydrocarbures, on doit tous nous mobiliser pour le faire».
Il souligne que «les prix du pétrole ne sont pas entre nos mains, un ou deux
ont décidé de les réduire, on s'est retrouvé dans une crise parce que notre
économie est déstructurée». Il n'est plus question pour lui que «l'économie
hors hydrocarbures reste un slogan, on doit la construire, on peut nous prendre
en charge par nous-mêmes, mais il faut qu'on soit franc entre nous». Il rend
hommage à «cette entreprise qui produit des cosmétiques et les exporte vers
l'Afrique, c'est toujours ça, l'Etat est prêt à débloquer une part de devises
pour ce genre d'exportation parce qu'elle est hors hydrocarbures». Il promet
aux investisseurs: «Il y aura un couloir vert» et leur recommande «le marché
africain, ce qui exige de vous une nouvelle organisation des services
(transports, banques, représentations commerciales, CACI...». Pour lui, «il est
inadmissible qu'il n'y ait pas de banques algériennes en Afrique». Il fera
alors part de son exigence de «réviser le système bancaire parce qu'on a des
guichets publics, on n'a pas de banques».
Tebboune veut des compagnies aériennes
privées
Le président appelle aussi les investisseurs à lancer de nouvelles compagnies
de transports en disant «je n'ai aucune interdiction pour de nouvelles
compagnies aériennes». Ses consignes sont, dit-il, «pour réduire la facture des
services à l'étranger, nous avons 12,5 milliards de dollars qui sont payés
chaque année pour les services (études, logistique, surestaries...), dont 4,5
milliards de dollars pour le transport, ce n'est pas normal». Il est convaincu
que « tant que les bénéfices sont pour l'homme d'affaires et les pertes pour le
Trésor public, on ne changera pas, il faut qu'on passe à la diplomatie
économique, il faut qu'il y ait des antennes des chambres de commerce et de la
logistique dans les ambassades, ce sont des conditions minimes pour
l'exportation». Il condamne «ceux qui importent des agrumes pour produire du
jus et en vendent une partie sur les marchés, importent les fruits alors qu'ils
sont produits chez nous(...), c'était la course derrière le gain au détriment
de l'économie nationale, ça a changé, il faut savoir que l'agriculture produit
beaucoup, si on est sorti de la tempête c'est grâce aux agriculteurs, pour la
première fois, on a pour 25 milliards de dollars de production agricole, on
peut en outre produire pour 400 millions de dollars dans l'industrie
pharmaceutique et on peut arriver à un milliard de dollars en 2021».
Mais, déplore-t-il, «nous n'avons pas d'industries de transformation (....),
c'est un suicide économique que de produire de la pomme de terre et d'importer
les chips, personne n'a ouvert une usine de transformation pour en faire de la
purée alors que tout le monde en a besoin, militaires, étudiants..., normal que
personne n'y pense parce que l'industrie de la transformation est difficile et
l'importation est facile, le titre c'est la surfacturation ». Il rappelle que
«quand j'étais ministre du Commerce, on importait pour 750 millions de dollars
de moutarde, mayonnaise, sauces, aujourd'hui on a des jeunes de l'ANSEJ qui en
produisent(...)». Il note que «pour simplifier les choses, la LFC 2020 a
autorisé l'importation d'usines clé ou produit en main pour transformer les
produits nationaux». Il pense qu' «il est impératif de transformer le caractère
social de l'ANSEJ par celui économique». Il rassure les hommes d'affaires«vous
êtes protégés, personne ne criminalisera ce que vous entreprendrez, on sait que
l'acte commercial peut avoir des erreurs mais on va dépénaliser les actes dans
plusieurs domaines, sauf la corruption et le blanchiment d'argent».
«L'économie nationale est à 80% privée»
Tebboune rappelle aux investisseurs qu'ils bénéficient de réduction d'impôts
«c'est dans la LF 2020, vous avez une réduction de 50.000 DA pour chaque jeune
recruté dans un emploi stable, on peut s'entendre, on doit aller vers une
économie créatrice de richesses et d'emplois, pour cela, le CNES, les agences
nationales, les institutions de l'Etat doivent jouer leur rôle». Il évoque les
mines où, dit-il, «l'investissement exige beaucoup d'argent, des technologies
modernes et un partenariat étranger, mais on peut les exploiter par des
investissements nationaux, personnellement, j'encourage à ce que le partenaire
dans l'exploitation de Ghar Djbilet soit algérien, on n'interdit pas le privé,
je le préfère à l'étranger» et, répète-t-il, «les banques peuvent vous prêter
de l'argent, elles mettent 1.900 milliards DA à votre disposition d'ici à la
fin 2020». Tebboune appelle les hommes d'affaires à créer « des PME, PMI, des
micro-entreprises et des startups» et affirme «c'est ça notre orientation
économique». Parce qu'il estime que «les grands investissements qui utilisent
les matières premières importées sont aliénants, ils nous ligotent à
l'étranger».
Il veut en outre que « l'intégration économique soit le 1er pas pour construire
une véritable économie parce que la nôtre est sous-développée, c'est une
économie désarticulée, il n'y a pas de complémentarité entre les secteurs, tout
est importé». Economie qu'il affirme être «depuis l'ouverture, à 80% privée
mais fonctionne avec 85% de crédits publics qui ne génèrent pas de richesses».
En précisant qu'il ne dissocie pas entre «public et privé», Tebboune veut que
l'investisseur réponde « à trois critères, la sincérité, sa participation à
l'économie nationale avec une intégration de 40 à 50%, pour que ça devienne un
produit national». Il encourage la sous-traitance «pour créer de l'emploi». Il
s'étonne que «nous avons 250.000 diplômés qui sortent chaque année de
l'université mais on ne fabrique aucun produit électroménager (séchoir et
autres), les universités sont autorisées à faire des études pour les projets
d'investissements, elles gagnent !»
«On n'est pas à genoux !»
Il récuse le fait que «l'Algérie a une facture d'importation de 60 milliards de
dollars alors qu'on peut la réduire à 6, 7 ou 8, on peut réduire la facture des
services de maintenance de Sonatrach qui atteint 7 à 8 milliards de dollars par
an». Il veut que « la numérisation devienne effective, elle n'existe pas, on
l'évite dans beaucoup de domaines pour garder l'opacité, les impôts ne sont pas
numérisés, la numérisation n'existe pas dans tout le secteur bancaire, 7 inspections
des domaines d'Alger ne sont pas numérisées, il faut réformer les banques, le
fisc, les impôts ne doivent plus être une sanction mais un moyen incitatif». Il
fait part de l'«interdiction formelle d'importer un litre de gasoil ou un litre
d'essence à partir de 2021». Il veut que «le code du commerce soit
obligatoirement révisé» et dit aux investisseurs, «on va dépénaliser beaucoup
de nos transactions, vos relations avec les banques vont passer dans le code du
commerce, la justice va multiplier les tribunaux commerciaux où vous serez
représentés. Et au pas de charge ! ». Pour rassurer davantage les hommes
d'affaires, le président affirme que «la situation financière du pays est
difficile mais pas meurtrière, on peut tenir en attendant vos investissements,
on n'est pas à genoux, c'est dans la tête qu'on a des blocages, il faut jouer
franc jeu, j'ai totalement confiance en vous ».Le président de la République
conclut sa longue intervention en faisant savoir que « je vais donner
instruction aux services de sécurité de ne plus prendre en considération les
lettres anonymes, la seule destination de ces lettres c'est le broyeur(...),
tout le monde est innocent jusqu'à preuve du contraire ».