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Entretien Aps, ministre de la Communication, samedi 8/8/ 2020

Date de création: 09-08-2020 18:35
Dernière mise à jour: 09-08-2020 18:35
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COMMUNICATION – GOUVERNEMENT –ENTRETIEN APS , MINISTRE DE LA COMMUNICATION, SAMEDI  8/8/2020

Les acteurs du champ médiatique en Algérie sont invités à réfléchir aux moyens de remédier à certaines pratiques antiprofessionnelles entachant l’exercice du métier de journaliste dans notre pays,  a indiqué, samedi 8/8

, le ministre  de la Communication,  porte-parole du gouvernement, Ammar Belhimer.

«Dans le souci d’améliorer l’exercice du journalisme en Algérie, le ministère de la Communication invite l’ensemble des acteurs du champ médiatique national à lancer une réflexion collective, sérieuse et constructive, visant à identifier les voies et moyens de pallier certaines pratiques antiprofessionnelles entachant l’exercice du métier de journaliste dans notre pays», a souligné le ministre, dans un entretien à l’APS.
Pour le Pr Belhimer, «l’usage inconsidéré des pseudonymes ou encore l’ambivalence de la relation de travail avec les organes employeurs» figurent «parmi les plus manifestes de ces pratiques antiprofessionnelles».
Il s’agit, également, selon le ministre, de «réfléchir pour trouver des solutions au phénomène émergent communément appelé «pages confidentielles», ainsi qu’au foisonnement des articles non signé», provoquant le doute chez le lecteur autour de leur authenticité et de leur source».
Le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, a invité, à ce propos, les intervenants du champ médiatique à «favoriser, par attachement au principe d’autorégulation, une meilleure pratique du journalisme en Algérie, par la rédaction d’une Charte algérienne consensuelle d’éthique et de déontologie pour régir le secteur de la presse».   
Cette charte constituera, ainsi, a-t-il souligné, «une référence pour les futurs Conseil et autorités, prévus par le Code de l’information de 2012 et qui n’ont pas encore vu le jour». 
Il a rappelé, dans ce contexte, que l’Autorité de régulation de la presse écrite, «autorité indépendante, jouissant de la personnalité morale et de l'autonomie financière», sera chargée, notamment «d’encourager la pluralité de l’information, de veiller à la diffusion et à la distribution de l’information écrite à travers tout le territoire national».
Ses missions consistent également, a-t-il ajouté, à «veiller à la qualité des messages médiatiques, ainsi qu’à la promotion et à la mise en exergue de la culture nationale dans tous ses aspects, à veiller à l’encouragement et à la consolidation de la publication et de la diffusion dans les deux langues nationales par tous les moyens appropriés, ainsi qu’à la transparence des règles économiques de fonctionnement des entreprises éditrices».
   
 Réflexion et concertation responsable

Seul un travail de «réflexion et de concertation responsable» entre la «tutelle» et l’ensemble de la corporation (employeurs, journalistes, experts) peut permettre d’atteindre l’objectif tant escompté, consistant à contribuer à l’émergence d’un journalisme professionnel en Algérie, a estimé le Pr Belhimer.
«Une formation de qualité, au sein des universités et établissements spécialisés, ainsi qu’un encadrement efficient et éclairé, au niveau des médias, mettant en avant la sacralité du respect de l’éthique et de la déontologie, sont l’autre condition sine qua non pour la + production+ d’un journaliste consciencieux et professionnel», a insisté le ministre.
Pour lui, «il est clair que l’expérience journalistique algérienne, au temps du parti unique ou après le 5 octobre 1988, est relativement jeune, en comparaison avec celles de pays pionniers comme les États-Unis, la Grande-Bretagne, l’Allemagne ou d’autres pays de traditions démocratiques établies».
Cela dit, a-t-il souligné, «les règles d’éthique et de déontologie sont identiques, immuables et doivent constituer le balisage que nul n’a le droit de négliger ou de bafouer». Même «l’absence d’un cadre juridique ou de loi écrite, régissant l’exercice du métier de journaliste dans ses moindres détails, ne peut, en aucun cas, constituer un prétexte pour la transgression des règles de bonnes pratiques, émanant de l’essence même du journalisme et de sa noble mission sociétale», a-t-il également estimé.
S’agissant des expériences étrangères, et de leur capacité à nous inspirer, ainsi que de la part de l’acquis national en la matière, le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, a indiqué que «si, en Algérie, il n’existe pas encore de traditions établies régissant l’éthique et la déontologie à même d’encadrer l’expression journalistique, des éléments de droit comparé autorisent le rapprochement».
Il s’agit, notamment, a-t-il précisé, de «la Charte des devoirs professionnels des journalistes français (1918), du Code éthique des journalistes américains (1926), du Code de conduite des journalistes britanniques (1938), de la Déclaration de principe de la Fédération internationale des journalistes sur la conduite des journalistes, dite + Déclaration de Bordeaux+ (1954) et de la Déclaration des devoirs et des droits des journalistes, dite +Déclaration de Munich1971+».
Ces nombreux Codes et Chartes d’éthique et de déontologie, «fruits de laborieux travaux accomplis par des corporations journalistiques, cumulant un capital-expérience considérable, de par le monde», constituent, selon le Pr Belhimer, «une source d’inspiration fiable pour atteindre un niveau d’exercice professionnel et de rigueur».
Il a aussi indiqué, à ce propos, qu’il était «tout de même important de rappeler que l’Algérie a, elle aussi, enregistré quelques tentatives visant à asseoir des traditions en matière d’éthique journalistique, tout en tenant compte des spécificités sociales et professionnelles locales».
À titre d’exemple, a-t-il ajouté, «après les premiers balbutiements sur la question datant du Mouvement des journalistes algériens entre 1988 et 1990, le 13 avril 2000, une Charte d’éthique et de déontologie des journalistes algériens avait vu le jour»
 Elle se voulait être, a-t-il souligné, le «premier document du genre prévu par le code de l’information de 1990, à fixer les devoirs et les droits de la corporation, sur lesquels veillait un Conseil supérieur composé de professionnels du secteur, élus par leurs pairs». La Charte en question soulignait, a rappelé M. Belhimer, que la mission d’information «comportait nécessairement des limites que les journalistes s’imposaient et s’appliquaient délibérément».  Le journaliste doit aussi, selon le même document, «séparer l’information du commentaire, respecter la vie privée des personnes et leur droit à l’image».
La Charte indique, également, a-t-il encore rappelé, que le journaliste doit «s’efforcer de relater les faits en les situant dans leur contexte», s’interdire de diffuser des rumeurs et «rectifier toute information diffusée qui se révèle inexacte». Pour ce qui est de l’usage inconsidéré des pseudonymes, le porte-parole du gouvernement a souligné qu’il était «impératif de rappeler qu’aucune considération, ni éthique, ni juridique, ne plaide en faveur de l’anonymat dans l’exercice du journalisme».

Même s’il est vrai, a-t-il dit, que les pratiques journalistiques «attribuent une certaine liberté aux journalistes de signer ou non les textes ou les reportages qu'ils produisent», il n’en demeure pas moins que le fait de ne pas signer certains textes «n'élude pas la responsabilité des auteurs à l'égard de leur production, ni celle des médias face à ce qu'ils publient ou diffusent».
Il en va de même en matière de responsabilité lors de l’utilisation d’un pseudonyme, nom d’emprunt ou nom de plume pour la signature de textes.
L’usage de telles dénominations constitue «une pratique journalistique à peine tolérée».
Au plan éthique, «s’il est possible d’admettre la généralisation, puis la banalisation de l’usage des pseudonymes comme moyen de survie en période de chasse aux journalistes, comme ce fut le cas pendant la décennie noire», ce ne doit pas être le cas dans le contexte actuel de libre exercice de la profession, où la pratique est attribuée à des «plumitifs de l’ombre» et assimilée à une «clandestinité identitaire».
Pour paraphraser Arthur Schopenhauer (1788-1860), auteur de réflexions piquantes contre les anonymes et les pseudonymes, ces derniers sont des gestes honteux, des friponneries à «stopper», a encore indiqué le ministre, rappelant qu’au plan juridique, le législateur algérien n’a pas perdu de vue les travers attachés à cette pratique, en disposant à l’article 86 de la loi organique n° 12-05 du 12 janvier 2012 relative à l’information que le «journaliste ou l’auteur qui utilise un pseudonyme est tenu de communiquer, automatiquement et par écrit, avant publication de ses travaux, sa véritable identité au directeur responsable de la publication».
Ainsi, a souligné le ministre, «l’utilisation de pseudonyme ou le fait de ne pas mentionner son nom est soumis à une condition principale : le/la responsable de publication doit connaître et conserver le nom de la personne ayant rédigé l’article publié anonymement».
Responsable de son contenu devant la loi, «il doit connaître l’identité de chaque rédacteur/trice afin de pouvoir en répondre devant la loi le cas échéant», a ajouté le Pr Belhimer, soulignant, par ailleurs, que la Charte d’éthique professionnelle des journalistes français, élaborée en 1918, stipule clairement qu’un «journaliste digne de ce nom, prend la responsabilité de toutes ses productions professionnelles, mêmes anonymes».  Même Charte, qui «n’use pas de la liberté de la presse dans une intention intéressée» et «ne confond pas son rôle avec celui de policier ou de juge», a-t-il également indiqué.
Abordant, précisément, la question des articles non signés, le ministre a estimé que leur foisonnement est «une couverture à la surcharge de travail qui pèse sur les quelques professionnels chargés de compenser le manque de personnel dans des rédactions squelettiques, en passant d’une spécialité à une autre, sans travail de terrain, d’enquête ou de reportage».
Selon la Déclaration de l’Unesco sur les médias (1983), a-t-il encore rappelé, «la tâche primordiale du journaliste est de servir le droit du peuple à une information véridique et authentique, par un attachement honnête à la réalité objective, en plaçant consciemment les faits dans leur contexte adéquat, en relevant leurs liens essentiels, sans entraîner de distorsions, en déployant toute la capacité créatrice du journaliste, afin que le public reçoive un matériel approprié lui permettant de se forger une image précise et cohérente du monde, où l’origine, la nature et l’essence des évènements, processus et situations, seraient compris d’une façon aussi objective que possible».
Le ministre de la Communication, porte-parole du Gouvernement, s’est dit «convaincu» qu’ «il est nécessaire de revoir l’utilité des pages dites ''confidentielles''» que nombre de journaux «s’adonnent, depuis quelques années, à publier quotidiennement, favorisant souvent le sensationnel au détriment du devoir sobre d’informer».
Des pages, a-t-il relevé, qui «agencent des bouts d’articles, illustrés par des caricatures ou des photos d’archives, qui s’apparentent plus à de la rumeur et au commérage qu’à de l’information à vocation publique. Ni le nom de l’auteur, ni la source n’y figurent».
Dans le cas où l’information est erronée ou à moitié vraie, nécessitant donc une correction, les journaux concernés par cette pratique, peu ou pas professionnelle, «se contentent de publier un minuscule erratum au bas d’une des pages les moins lues», a-t-il également relevé.
Pourtant des textes, comme la Déclaration des devoirs et des droits des journalistes de Munich (1971), soulignent la nécessité de «respecter la vérité, quelles qu’en puissent être les conséquences pour le journaliste lui-même, et ce, en raison du droit que le public a de connaître», a également indiqué le ministre.
Tel que recommandé par la Commission européenne, il est «très important que les juridictions nationales trouvent le juste équilibre entre le droit du demandeur à accéder aux informations confidentielles», a-t-il encore rappelé. Dans le même ordre d’idées, a également souligné le Pr Belhimer, le Code de la presse allemand (Pressekodex allemand/1973), stipule que «les nouvelles et les informations, sous forme de texte et d'images, destinées à la publication doivent être contrôlées quant à la vérité de leur contenu avec toute l'attention permise par les circonstances. Leur sens ne doit être ni détourné ni faussé par leur traitement, par leur titre ou par leur légende».
«Les documents doivent être reproduits fidèlement. Les informations non confirmées, les rumeurs et les conjectures doivent être signalées comme telles. Lors de la reproduction d'une photographie symbolique, la légende doit indiquer clairement qu'il ne s'agit pas d'une image documentaire», lit-on dans le même texte.
Le Code de la presse allemand «exige que les nouvelles ou assertions portées à la connaissance du public qui se révèlent par la suite erronées doivent être rectifiées de manière appropriée, immédiatement et spontanément, par la publication qui les a diffusées».
Pour ce qui concerne l’ambivalence de la relation de travail avec certains organes employeurs étrangers, le ministre de la Communication a indiqué que certains journalistes s’installent comme «correspondants de fait» – non accrédités selon les procédures en vigueur – d’organes étrangers, et entretiennent une sorte de «loi du fait accompli qui les expose à plusieurs risques dont le premier, et non des moindres, est qu’ils ne sont pas reconnus comme correspondants».
Ils recourent aux usages de «pigistes», Freelancers, collaborateurs pour contourner l’article 81 de la loi organique n°12-05 du 12 janvier 2012 relative à l’information : «Les journalistes professionnels exerçant pour le compte d’un organe de droit étranger doivent obtenir une accréditation.»
Se disant ainsi Freelancers ou cachetiers, des journalistes algériens «entretiennent des relations de travail, non conformes sur le plan légal, avec des médias étrangers, et ne sont dotés «ni de contrats conformes, ni de carte professionnelle délivrée par l’employeur offshore, ni de bureau de représentation».
Ces journalistes en question doivent savoir, a également souligné le ministre, que les pays des médias qui les emploient «n’auraient jamais toléré de telles pratiques sur leurs sols respectifs. Seuls les correspondants officiellement accrédités peuvent y travailler. Alors pourquoi le tolérer lorsqu’il s’agit de notre pays ?» a conclu le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement.