ENVIRONNEMENT- ENQUETES
ET REPORTAGES - GAZ TOXIQUES, ANNABA- RISQUE
D’EXPLOSION
Linde gas Annaba : Plus de 640
bouteilles de gaz toxiques menacent d’exploser
©M.-F. GAIDI/EL WATAN, 06 AOÛT
2020 À 10 H 09 MIN
Ce lot de bouteilles déclassées contient des gaz toxiques et inflammables
au contact de l’atmosphère, tels que le méthane, l’ammoniac, l’acétylène,
l’argon, le gaz carbonique…
La double explosion qui a secoué mardi le secteur du port de
Beyrouth, la capitale libanaise, faisant plus de 100 morts et plusieurs
milliers de blessés, a remis d’actualité le risque latent d’explosion de gaz
toxiques qui menace sérieusement les habitants de la wilaya de
Annaba.
En effet,
plus 640 bouteilles de gaz industriels rebutées, contenant des gaz toxiques, sont en souffrance depuis plusieurs années dans la zone
industrielle (ZI) – Pont Bouchet – de Annaba, au niveau de la filiale locale de
la société Linde Gas Algérie, avons-nous constaté sur
place.
Spécialisée
dans la production, la distribution et la commercialisation des gaz industriels
et médicaux, Linde Gas Algérie, société
germano-algérienne, a pu se débarrasser de 691 bouteilles sur un total de 1334.
C’est une véritable bombe à
retardement, dont l’état de dégradation avancé de ces bouteilles en dit long
sur le risque de catastrophe encouru par les riverains. Contacté à l’époque, le
directeur de Linde Gas Annaba a refusé de s’exprimer
sur la question.
Ce qui
n’est pas le cas pour le président-directeur général (PDG) de la société, un
expatrié, installé à Alger. Selon Pierre Chevallier qui, en 2018, a confirmé
l’information au téléphone : «Les
autorités algériennes sont au courant de cette affaire. Il s’agit de 1334
bouteilles de gaz (643 actuellement) issues des différents sites relevant de notre société, dont on
ignore parfois la nature de leur contenu.
Par mesure
préventive, nous avons fait appel à un bureau d’études spécialisé dans le
domaine à Annaba pour nous assister avec les autorités algériennes à l’effet de
procéder à leur destruction dans un milieu sécurisé.» Pour ce faire, la société avait saisi, à l’époque, le wali
de Biskra, puis la direction des mines de Annaba à l’effet d’une évacuation et
destruction dans un périmètre militaire sécurisé, appelé polygone de tirs.
«J’ai pu, en
2018, mettre hors d’état de nuire 643 bouteilles par le procédé de barbotage.
Etant rouillées et dans un état de dégradation avancé, un lot de 643 bouteilles à détruire est
actuellement stocké sur le site de Linde Gas Algérie
de Annaba, à la zone industrielle Pont Bouchet, à moins de 500 mètres de la
ville d’El Hadjar, et mitoyenne avec des dizaines
d’entreprises publiques et privées.
Le risque de
fuite et d’accident lié à ce stockage à ciel ouvert est fort probable, d’où
l’urgence d’une évacuation et destruction sécurisée», a alerté hier Fayçal Loudjani,
l’expert qui a été désigné par la société Linde Gas
pour l’accompagner dans cette délicate opération.
«En cas
d’explosion d’une bouteille de gaz, une réaction en chaîne entraînerait la
déflagration des autres bouteilles et ferait pleuvoir une pluie de projectiles
incendiaires dans un périmètre indéfini autour du site de Linde Gas dans la zone industrielle Pont Bouchet», prévient encore et fermement ce spécialiste auprès du Centre
national des technologies de production plus propres (CNTPP), qui dirige le
bureau d’études, Général environnement, à Annaba.
Faut-il
rappeler que ce lot de bouteilles déclassées contient des gaz toxiques et
inflammables au contact de l’atmosphère, tels que le méthane, l’ammoniac, l’acétylène,
l’argon, le gaz carbonique… Une bonne autre partie contient des gaz inconnus.
Cette
importante quantité de bonbonnes a été constituée, selon nos informations, à
partir de bouteilles préexistantes sur les différents sites de Linde Gas Algérie, en plus de celles saisies par les services de
sécurité et confiées à cette société durant les années 1990-2010.
«D’autres
wilayas connaissent la même situation et n’arrivent pas à les détruire. Des
lots de bouteilles contenant des gaz toxiques, parfois de combat, tel le
chlore, dont l’odeur est suffocante, très désagréable et extrêmement toxique», a averti, encore une fois, le même spécialiste.