CULTURE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN BENAMAR
MEDIÈNE – « GEORGES BOUQUABRINE »
Georges Bouqabrine…….Roman de Benamar Mediène. Casbah Editions.
Alger 2012 , 382 pages en
français, 650 dinars
Benamar
Mediène n’est plus à présenter. Ceux qui ont lu son
« Kateb Yacine, le coeur entre les dents »
y ont découvert un essayiste de talent . Il est vrai
que pour les amis, dans son milieu d’intellectuels vrais fortement engagés, on
se défonce toujours et il a , d’ailleurs, renouvelé
l’exploit avec « Issiakhem , peintre ».
Cette fois-ci, on al’impression
que c’est lui-même qu’il affronte. Certainement pour se prouver (et
prouver aux autres , « les cuistres, les sots et
les ennnuyeux littérateurs ») qu’il a d’autres
cahiers dans son cartable (et de logiciels dans
son micro) en s’aventurant dans le roman, mais surtout, me semble-t-il,
pour bousculer le monde de la mauvaise littérature qui nous envahit de
plus en plus.Il ne manque pas d’ailleurs de lui
(l’édition en général) consacrer une page bien vitriolée : « les
livres d’aujourd’hui…. Imbuvables, à un point tel que le bois qui a servi
à fabriquer leur papier doit regretter de ne pas avoir été brûlé »
Georges est l’histoire d’un homme biologiquement
« divisé »,moitié kabyle par son père ,
moitié chouan (Vendée française ) par sa mère. Lourde hérédité ! Ne
voilà-t-il pas que, militaire du contingent, une de ses moitiés est obligée de
faire la guerre à l’autre, et qu’une moitié doit haïr et tuer l’autre….Il doit
choisir. Il déserte, mais il est « liquidé » par les éléments de
l’armée française (les paras). Une véritable exécution maquillée en règlement
de comptes. Son corps, pour donner le change, sera « rapatrié »
en « métropole » où il sera enterré (symboliquement car son cercueil
avait « disparu » en cours de route) …..mais,
en fait, son corps martyrisé, avait été récupéré par la maman de son camarade
de caserne, son « complice » qui devait l’aider à rejoindre le
maquis, un moudjahid qui a survécu à la torture. Il avait été enterré
discrètement en cimetière musulman. Peu à peu, sa tombe anonyme deviendra deviendra celle d’un saint homme vénéré (« venu de
loin »), maître de la fertilité féminine qui plus est …lui qui a tant et
tant aimé les femmes. Une histoire
s’étant déroulée bien banalement en France est bel et bien morte…..et enterrée
(même par les Archives de l’armée française), mais une autre
, rejoignant la légende, donnant de l’espoir et faite pour le bien , a
commencé….en Algérie.
Avis :Un voyage
extraordinaire dans les océans de la littérature et dans le tumulte d’une
écriture étourdissante. L’auteur en oublie parfois (bien souvent, en vérité ) son sujet. Kateb Yacine a laissé un digne héritier.
En tout cas , la contagion est certaine…avec un art
consommé de la littérature universelle en plus .Difficile à lire, mais à lire
.Avec une telle œuvre, on ne peut que se cultiver …..et
améliorer son français.
Phrase
à méditer : « Ducon est ce qu’il y a de mieux sur le
marché pour te tailler un beau costard qui t’habillera tous les hivers à
venir », « Ecrire , ce n’est pas produire de l’ammoniac »