VIE POLITIQUE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ESSAI MYRIAM AIT AOUDIA –
« L’EXPERIENCE DEMOCRATIQUE….. »
L’expérience démocratique en Algérie (1988-1992). Essai de Myriam
Ait-Aoudia, Koukou
Editions, Alger 2016, 346 pages, 1 000 dinars
Beaucoup d’ouvrages, d’études, articles
, fora et tables rondes, ont été
consacrés, ici et là, à l’expérience
démocratique algérienne entre 1988 à 1992. Tout particulièrement. Peut-être , en raison de
son apparition inattendue (tant il est vrai que le système algérien bâti sur un
« socialisme spécifique » et le mythe d’une Révolution continuelle)
......et de son échec (relatif) entraînant , durant toute une décennie, une
véritable guerre intérieure (d’abord politique puis physique) causant des
dégâts humains (150 000 à 200 000 morts ou plus ?) et matériels
. Mais, aussi et surtout, en raison de son originalité ,
dans un monde arabo-musulman coincé entre les dictatures et les monarchies. Une
expérience d’autant plus remarquée que , par la suite,
l’Algérie n’a pas connu , comme dans certains autres pays arabes, en 2011, de
« révolutions » . Elle a su, même se relever, et entamer une autre
étape de son développement. ..traînant quand même certains boulets .
Mais, le cas algérien, au départ, en tout cas ses
toutes premières années, si prometteur et si porteur de valeurs démocratiques,
bien trop vite analysé à partir de l’
« échec », a permis, ici et là, de repenser les processus de
changement de régime...en Algérie et dans d’autres zones géographiques.
C’est ce que à quoi s’est attelé à montrer et à
démontrer Myriam Ait-Aoudia, dans le cadre d’une
recherche rigoureuse et scientifique, bref universitaire comme on en souhaiterait tant voir dans notre pays, en remontant le temps,
afin de découvrir les erreurs et les failles...sans tomber dans les
condamnations sans appel.
Une première partie retrace le processus qui a abouti
à l’effondrement du régime de parti unique
après les émeutes d’octobre 88 . Une seconde
partie couvre la période allant de la légalisation des nouveaux partis en
septembre 89 à l’annonce officielle , en mars 90, de
la tenue de la première élection pluraliste fixée au 12 juin. Enfin, une
troisième partie se concentre sur
« l’apprentissage chaotique » de la compétition électorale
pluraliste.....et la fin que l’on connaît (arrêt de l’expérience électorale en
janvier 92 et dissolution du Fis)
Conclusion tirée d’une « expérience modèle »
devenue « un contre-modèle, un repoussoir tant pour la société
algérienne que pour ses voisins », avec une interrogation transcendant les
clivages politiques : « Comment édifier un régime véritablement
pluraliste dans le monde arabe sans risquer de basculer dans une violence
islamiste ou une restauration autoritaire de type militaire ou
policier ? ». Laisser, peut-être, le temps au temps ? Beaucoup
de « pain sur la planche » pour tous nos politologues
L’Auteure : Maître
de conférences en sciences politiques (Bordeaux) ,
chercheuse , elle a co-dirigé , avec Antoine Roger,
un ouvrage, « La logique du désordre » , en 2015 (Presses de Sciences
Po’). Auteure de nombreux articles scientifiques sur les partis politiques,
l’islamisme et les transitions démocratiques
Extraits : « Entre
1988 et 1992, l’expérimentation pluruipartisane en
Algérie constitue le seul cas de démocratisation dans la région. A la lumière
des « révolutions arabes » de 2011,
elle apparaît comme un premier cas dont l’analyse offre des outils
ajustés » (p 14) , « Aucun des pays arabes
ayant connu des soulèvements populaires de
grande ampleur à partir de 2011 n’a expérimenté dans le passé un
véritable pluralisme partisan comme l’Algérie » (p 294)
Avis : Trop
académique et destiné surtout aux universitaires et aux étudiants, mais passionnant....pour tous !
Citations : «
Le « pouvoir » algérien est généralement présenté dans la littérature
académique de façon simpliste :il serait dominé
par l’armée et subsidiairement par le président. On verra au contraire que le
« pouvoir » est composite, associant une multiplicité de pôles,
chacun pesant d’un poids variable en fonction de la conjoncture et de
l’évolution des rapports de force « ( p 20), « Le régime algérien a
progressivement glissé d’une
« défense militaire » de la démocratie, ce dont témoigne
l’intervention militaire en janvier 1992, mais aussi en juin 1991, vers une
« défense politico-institutionnelle de la démocratie » (p 298)