CULTURE-
BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN NOURREDINE SAADI- « LA NUIT DES ORIGINES »
La Nuit des
origines. Roman de Nourredine Saadi,
Editions Barzakh, Alger 2005,205 pages, 400 dinars
Quel hasard ! Les Puces de Paris, un
lieu mondialement connu. Un vieux lit « turc » dans une vitrine. Une
Constantinoise, Abla , divorcée sans
enfant ,« exilée » (non, « réfugiée mentale »,
insiste-elle), est happée par la ressemblance avec celui qu’elle avait durant
son enfance . Elle entre dans la boutique et fait la connaissance du
propriétaire et de son ami. Ce dernier est, lui, Alain (ou Ali, quelques
lettres ayant sauté) un enfant de la Dass, né de père
inconnu (un militaire français) et d’une Algérienne (de Constantine, quel
hasard !) venue
mourir à Paris en faisant les ménages.
Des destins qui se croisent, se parlent, se racontent , s’aiment, se fuient, rient , chantent, boivent,
le tout …après une dure journée de labeur…bien fait, dans une ambiance
populaire seulement trouvée à Paris, autour des Puces, à Saint-Ouen.
« Lieu réel mais totalement réinventé , tel un
pays des merveilles, drôle, cosmopolite et merveilleusement insolite »
Hélas, on se débarrasse difficilement de sa ville, de son pays, de ses origines .Le lit à baldaquin a été le
déclic. Un très vieux manuscrit (de très grande valeur selon les spécialistes
consultés) du saint Sidi Kébir Belhamlaoui
sur la prière d’Ibn Maschich, porteur de
« baraka », hérité de son père et qu’elle souhaite (rait) vendre , va être la « goutte » qui fera déborder
l’amour et la nostalgie de la ville natale et de ses traditions enfouies au
tréfonds de l’âme. Malgré le prix d’achat faramineux proposé, elle
refuse de s’en défaire, de « se » libérer. Malgré l’amour retrouvé,
et l’ambiance pacifique et fraternelle rencontrée dans les petits bistrots de
Saint-Ouen, elle n’arrive pas à oublier les horreurs terroristes. Car, un pays,
une histoire, une famille, des traditions….ça ne se vend pas ! Et puis,
c’est si lourd à porter. Elle sombre dans la déprime, avec la mort au bout du
chemin…La paix retrouvée, peut-être ?
L’Auteur : Originaire de
Constantine, enseignant universitaire diplômé de l’Université d’Alger
(génération des années 60, au tout début de l’Indépendance) ,
il vit et enseigne le droit en France.
Auteur de plusieurs romans dont « Dieu-le –fît » en 1996 et « La
Maison de lumière » en 2000. Il a également publié des essais
, des monographies d’artistes et il a contribué à plusieurs ouvrages
collectifs
Avis : Du grand
roman. Du style. Des histoires qui se croisent. De la tristesse et de la
nostalgie. Une lente montée en puissance. Du sens….et un amour sans limite pour
…..Constantine. Nostalgie, nostalgérie !
Citations : «
La nuit dans ces bistrots, on rencontre une humanité si peu visible le jour. Des
créatures déchues dont les mains tremblotantes prennent la forme des verres,
des insomniaques éternellement effrayés par la nuit, des êtres dont la vie est
à l’envers, des anciens de ceci ou cela, épaves du sport, accrochés à une barre
de cuivre d’un comptoir, des émigrés dont le sol vacille sous les pieds, une
humanité qui rappelle combien chaque vie
est une énigme et pour chacun un accident du hasard » (p 54),
« Ici, tout est dans la
parole, le bluff, la valse des Puces :écouter, c’est acheter, parler c’est
vendre » (p 92),