CULTURE – BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH-
ESSAI MUSTAPHA CHERIF- « SORTIR DES EXTRÊMES….. »
Sortir des extrêmes. Ni intégrisme, ni
perte d’identité. Essai de Mustapha Chérif ,
Casbah Editions, Alger 2015, 166 pages, 650 dinars
Cette fois-ci, c’est pour lutter contre les
extrêmes de tous bords que l’auteur, déjà bien connu sur la scène
intellectuelle, tout particulièrement dans le domaine des essais
philosophiques s’intéressant à la foi,
s’engage.Pour dénoncer les deux extrémismes
contemporains qui’il trouve nuisibles pour la
compréhension de l’Islam (et de toutes les autres religions)
. Et, pour dégager une voie médiane, celle de la wassatiya,
ouverte sur l’algérianité (pour ce qui nous concerne)
et aussi à la mondialité.
Pas facile ! Car ,
les extrêmes qui « occupent les espaces médiatiques, politiques et
religieux » sont là, perturbant la cohésion sociale et le « vivre
ensemble ».
Les extrêmes ? L’un veut imiter un
Orient fantasmé ( avec des pratiques archaïques
versant dans l’interdit, l’apologie de soi, l’intolérance, voire la violence, l’instrumentalisation
du sacré par des groupes, favorisant l’ingérence, l’autoritarisme et
l’obscurantisme…). L’autre, avec des courants de pensées
, « modernistes » , appelant à imiter (ou imitant) aveuglément
l’Occident…versant parfois, sinon souvent dans l’athéisme dogmatique, réduisant
la croyance religieuse et les rites à des formes d’aliénation ….et versant (ou
faisant verser, sans se rendre compte ) dans l’islamophobie.
Les tenants du premier veulent revenir aux
sources et s’opposent aux innovations… « un
combat d’arrière-garde voué à l’échec »…..ceux du second veulent réformer
et moderniser l’Islam au lieu d’éduquer le musulman. Mais ,
les premiers sont piégés « par la nostalgie d’un passé déformé » et
les seconds le sont « par les pesanteurs du temps présent ».
Deux approches en fait
« idéologiques » que l’auteur estime non alternatives mais bien
plutôt « impasses ». D’où sa
« défense et illustration » de la « voie ouverte du juste
milieu », pour la promotion d’un humanisme musulman, de la fraternité
abrahamique et de la refondation du fait religieux à partir de l’expérience
prophétique pour notre temps .
La solution pour s’en sortir ? Trois
volets qu’il développera : celui de la réforme politique « afin de
traduire la volonté populaire, selon des règles constitutionnelles
conformes » ; celui éducatif fondé sur l’éveil à la responsabilisation , la cohérence des savoirs et la
formation religieuse ouverte»; celui, enfin, économique , « afin d’allier
productivité et justice sociale, culture du mérite et éthique ».
Vaste
et ambitieux programme !
L’
Auteur : Docteur d’Etat en philosophie et en
sociologie, professeur des Universités, ancien Recteur de l’Université de la
Formation continue , ancien ministre de l’Enseignement supérieur et ancien
ambassadeur d’Algérie (en Egypte) , figure du dialogue des civilisations (il avait
été reçu par le Pape) , Prix Unesco pour le dialogue des cultures et Prix
italien de la culture de la paix, auteur de plusieurs ouvrages….
Avis:
Pas facile de
vivre (et de comprendre ) la voie du « juste milieu ». Il faut
espérer et, surtout, persister. …..dans la construction de la nouvelle « Maison de la sagesse »,
de la « médianité » ….Une ambition de
croyant tolérant et ouvert sur l’universel ? Un rêve d’intellectuel musulman
« moderne » ? Un peu trop sévère ou même injuste pour
les auteurs «musulmans » « modernistes » (les guillemets sont de lui) qu’il
classe dans deux camps : ceux qui pratiquent , dit-il, la critique constructive et ceux qui
pratiquent le dénigrement
Citations: «
L’islam est incompris, déformé et trahi d’abord de l’intérieur. Les sociétés
musulmanes sont fragilisées, soumises aux manipulations et dictats
extérieurs » (p 36), « Se libérer , c’est
assumer ses responsabilités, ce n’est pas seulement croire ou mécroire »
(p 39), « Aucune sagesse, ni spiritualité et raison ne dominent la
doctrine idéologique des intégristes « (p 43), « Expliquer le terrorisme, l’extrémisme
et le rigorisme par la religion est un contre-sens. Les terroristes doivent
être considérés comme tels, et non point comme des « croyants » comme
ils le prétendent dans leur délire » (p 61),