POPULATION- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH-
ESSAI CLAIRE RODIER- « XÉNOPHOBIE BUSINESS…. »
Xénophobie business. A quoi servent les
contrôles migratoires ? Essai de Claire Rodier. Editions Média-Plus , Alger 2015, 950 dinars , 194 pages
Grâce au livre de Claire Rodier, on en
découvre des choses sur le phénomène migratoire. Et, surtout sur les capacités
des économies et des pouvoirs politiques des pays industrialisés à surfer « utilement
» sur les vagues, ne tenant compte que rarement des victimes
enregistrées au passage ; l’essentiel étant le profit.
On le savait : les économies des pays
industrialisés ne peuvent se passer d’un volant de main-d’œuvre flexible et
exploitable….et les sans-papiers répondent en grande partie à ce besoin.
Pourtant , on passe son temps à « inventer » de nouveaux dispositifs
de contrôle : des patrouilles maritimes, des murs, des barbelés, les vérifications des passeports
dans les aéroports, des camps ,….Une kyrielle de dispositifs ; chaque
nouveau dispositif mis en place donnant l’impression de n’avoir pour but que de
révéler les failles et les lacunes des précédents….et servant donc de justification
pour en créer un nouveau. C’est sur cette base que s’est ,
peu à peu , créée, une « économie sécuritaire » qui tire de gros
profits de dispositifs de plus en plus sophistiqués ( La société G4S, dont une
partie de l’activité est consacrée à la « gestion » de l’émigration ,
emploie plus de 650 000 salariés, ce qui en fait le deuxième plus gros
employeur privé du monde). C’est donc le
premier chapitre de l’ouvrage.
Le second chapitre va chercher à caractériser
les fonctions idéologiques des contrôles migratoires. Ils sont présentés comme
une réponse aux préoccupations supposées de l’opinion face à une menace , régulièrement brandie sur le thème de l’invasion
par des prédateurs et/ou de la délinquance étrangère. L’exploitation de la
peur. Dans la logique bien connue du bouc émissaire et de la
« manipulation de l’incertitude » ( cela
permet aux pouvoirs , incapables d’apporter des solutions aux problèmes des
populations, d’asseoir leur autorité)
Le troisième chapitre est consacré à la
« dimension géopolitique » des contrôles ,
avec une diplomatie peu regardante, et à leur « marchandisation »,
avec pour fond l’industrie guerrière . Le « sale boulot » est de plus
en plus délocalisé et il est donc
exécuté par les autres…. les pays « fournisseurs » de migrants
de passage, ou par des société
privées ; le phénomène terroriste étant
désormais un chiffon rouge agité , , par des
politiciens en mal de légitimité et/ou en recherche de notoriété.
L’Auteure : Figure
reconnue seules questions migratoires. Juriste au Groupe d’information et de
soutien aux immigrés , le Gisti, co-fondatrice du réseau euro-africain Migreurop. Travaille plus particulièrement sur les
politiques européennes d’immigration et d’asile. Plusieurs publications sur ces
thèmes
Avis : Une
enquête fouillée sur la gestion des flux migratoires par les Etats et notamment
leur privatisation croissante. Des faits et des chiffres. Un livre détonnant.
Citations : « La gestion des
frontières sert bien d’autres intérêts que ceux qu’elle prétend défendre. Et que
ces intérêts, en prenant la pas sur le reste , minent toute perspective de
réflexion cohérente sur l’organisation d’un monde où les gens ne cesseront
jamais de se déplacer » (p 16), « Expulseur de migrants, un métier
d’ avenir » (p 31), « Au jeu du chat et de la souris, le chat
n’a pas forcément intérêt à éliminer sa proie » (p 45), « Immigration
et terrorisme : une association non démontrée , mais utile « ( p
100), « Les fantasmes ont la vie dure. Surtout quand ils font marcher les
affaires » ( 141) .