RELATIONS INTERNATINALES- BIBLIOTHEQUE
D’ALMANACH- ESSAI GIULIANA SGRENA- « LES RÉVOLUTIONS VIOLÉES….. »
Les révolutions violées. Printemps laïc,
vote islamiste. Essai de Giuliana Sgrena
(traduit de l’italien par Maria Assunta Mini) . Casbah Editions , Alger 2015 (Il Saggiatore
S.r.l, Milan 2014) , 197 pages, 750 dinars
« La révolution est femme et ,quelque part , elle est en train d’avancer ». La
couleur est d’emblée annoncée. L’auteure n’est pas seulement femme et
féministe ; elle est ,aussi, une journaliste qui
a fait beaucoup de terrain. Principalement notre monde .
Un grand reporter qui connaît le monde arabe contemporain,
qui a observé « du dedans » ses composantes sociétales et ses
comportements et qui l’a bien compris.
A travers des exemples bien précis et bien
documentés, tout en ne perdant pas de vue les situations similaires vécues par
les femmes , il
y a longtemps ou récemment, dans les pays occidentaux, elle parcourt le monde
arabo-islamique :
. D’abord l’Arabie saoudite et l’interdiction
faites aux femmes de conduire un véhicule automobile ,
et encore moins de monter à cheval ou de faire du vélo, par peur de
« perdre la virginité » ou de « déformer les
ovaires ».
. Ensuite, la Tunisie et les luttes féminines , tout particulièrement après la
« récupération » de la révolution puis la victoire des islamistes, le 23 octobre
2011.
. Puis, l’Egypte (pays d’origine des Frères
musulmans et de l’Islam politique) et le viol répété de femmes démocrates , en
pleine place Tahrir , surtout après une certaine
alliance (« alliance diabolique qui ne durera pas longtemps ») entre les forces conservatrices du pays ,
islamistes et militaires.
. L’Algérie est présentée à travers les années 2000 afin de voir quels
sont les effets du 5 octobre 1988 sur la
vie politique, mais surtout sur la vie
sociale et les comportements à l’égard des femmes .
« L’exception algérienne » est, malgré un « climat
triste », et une certaine violence quotidienne (qui se fait de la religion
un bouclier) est confirmée.
. La Libye est indescriptible avec son
« chaos des milices » et le règne de la loi du plus fort et des
« fatwas » des religieux.
. Vient ensuite le Yémen et ses
paradoxes…avec un prix Nobel (Tawakkul Karman)……. voilé .
. Retour en Egypte et sa deuxième
Révolution…avec l’intervention de l’armée déposant un leader islamiste (Morsi)
n’ayant pas réussi à résoudre les problèmes du pays, les aggravant même…..et en
Tunisie où , sans coup d’éclat et avec beaucoup de
négociations (grâce à un Quartet qui , par la suite a obtenu le prix Nobel) ,
et même « si le diable est dans les détails », une nouvelle
Constitution, déjouant le danger islamiste et
avec beaucoup de compromis, est
adoptée.
. Le dernier chapitre est bien moins
réjouissant .Des centaines de milliers de victimes. Des millions de réfugiés.
Des dégâts matériels inestimables. Des sociétés brisées. Des vies (comme toujours ,d’abord celles des femmes et des enfants)
mutilées, et avec un «
califat » mû par le fanatisme
religieux entre la Syrie et l’Irak …..Apocalypse now !
L’Auteure : Italienne,c’est une journaliste de guerre connue pour son opposition aux conflits
armés et son militantisme pour les droits des femmes . A travaillé pour
l’hebdomadaire Guerra e Pace puis pour le quotidien « Il Manifesto ». A séjourné moult fois en Algérie,
couvrant, entre autres, les grands événements de la décennie rouge. Enlevée à
Bagdad en 2005, détenue durant tout un mois. Auteure de nombreux ouvrages liés
à l’actualité dans le monde arabe. Prix (algérien) international de journalisme
Omar Ourtilane en 2005 (elle est, aussi, membre
du jury depuis la création du prix)
Avis : Du grand
reportage, de l’observation minutieuse , de l’analyse
qui ne dérange…..que les hommes …..les machos, et les
fondamentalistes radicaux
Citations : « Les révolutions ont
provoqué une crise d’identité chez le mâle arabe. Le rôle de premier plan joué
par les femmes a terrorisé les hommes, et ces derniers ont répondu par la
violence pour rétablir l’ordre patriarcal qui garantit leur statut ….La
révolution est femme » (p 15), « La condition féminine est
étroitement liée à la nature de l’Etat, laïc ou théocratique, même si un Etat
laïc ne reconnait pas automatiquement les droits des femmes « (p 69),
« Dans un pays où la corruption est omniprésente, insister sur l’éthique
et la vertu basées sur des principes religieux dont personne n’ose douter,
s’avère une carte gagnante » (p 74), « Chacun n’apprend que de ses
propres erreurs, ou alors il croit être exempt de faux pas « (p 90),
« Le devoir d’un journaliste est d’informer, mais sans transformer notre
travail en une mission, autrement nous risquerions de perdre notre lucidité, et
quand c’est possible, notre objectivité. Comment peut-on continuer à exercer
honnêtement ce travail si les journalistes sont devenus une arme de
guerre ? » (p 168)