HISTOIRE-
BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH – ETUDE ZAHIR IHADADEN/M.C SAHLI- « DECOLONISER
L’HISTOIRE…. »
Décoloniser
l’Histoire. Introduction à l’histoire du Maghreb. …suivie de Le Message de Yougourtha . Préface de Zahir Ihadaden. Essai de Mohamed
Chérif Sahli. Quipos Editions, Alger 2014, 245
pages, 700 dinars
Un seul livre, deux oeuvres….deux
en un ! Une initiative originale mais heureuse car elle réunit deux
« histoires » (l’Histoire de l’histoire coloniale de l’Algérie….et
l’Histoire de quelqu’un , un héros bien de chez nous,
un homme qui a fait tout un pan de l’Histoire du pays…Mais, hélas, dont on ne retient
plus que le nom…comme prénom )
Dans une première partie (ouvrage paru en
1966….chez Maspéro…en France) qui tient bien plus de l’analyse critique et
de l’essai, Mohamed Chérif Sahli ….un grand
homme de culture , malheureusement mal connu de son vivant par les nouvelles
générations d’historiens (qui , il est vrai , ont des approches soit
orientalistes , simplistes et
politisées, soit occidentales , mais
complexes car s’enfermant dans des schémas trop rigoureux), Sahli, donc, esquisse une méthode (qui a fait notre bonheur
en tant qu’étudiants dans les années 60 et 70) : Il nous apprend à
démonter bien des documents d’historiens occidentaux afin de démontrer les
parti-pris….comme si tout était fait
pour décrire un paysage et une société incapables de favoriser
l’émergence d’une souveraineté nationale et une nation indépendante. En
accusant la nature, la géographie …. On
a eu , aussi,
les « histoires » (parfois des légendes) de lutte continuelle entre sédentaires et
nomades ; ces derniers transformés en « nihilistes et pillards »
s’ acharnant à détruire « le labeur patient » des sédentaires.
La seconde partie (ouvrage paru en
1947….déjà) est présentée opportunément par l’historien Zahir
Ihaddaden,
comme une sorte d’exercice pratique . Le héros
, un résistant infatigable aux tentatives d’occupation romaine du pays (de
toute la région, avec au départ l’inimitié entre Carthage et Rome….deux
impérialismes), un vrai fils du Maghreb,
est la preuve de l’incarnation d’une mentalité et d’un comportement
« forgés par l’exercice de la souveraineté nationale depuis bien des
siècles antérieurs ».Des noms fulgurants ,avec des héros et des traîtres
aussi, ont traversé le temps et se sont incrustés dans la mémoire
collective (sauf chez nos nouveaux prophètes)
: Syphax, Massinissa ( « l’Aguellid Amokrane » , « le grand roi »
des vieux contes kabyles), Asdrubal,Mastanabal(le père de Yougourta)
, Miscipsa, Imastanabal, Gulussa, Adherbal, Hiempsal, Massiva, Boulmicar, Boucchous……
L’Auteur :1906-1989..... Né à
Bejaia (Tasga) diplômé de philosophie(1932), ami de Laheraf et de Kateb Yacine (qui , de passage à Pékin, lui
dédia un de ses poèmes), il consacre sa
longue vie à l’étude, à l’enseignement, à l’écriture , au journalisme , à la
lutte pour l’Indépendance du pays, à la
diplomatie (de 1957 à 1962 avec le Gpra , puis ambassadeur de 1966 à 1978) ce qui lui
permis de renconter les grands révolutionnaires de
l’époque
Avis :Un classique,
ça se lit .Ça se relit. Et, ça se
conserve. Avec le temps, sa valeur ne fera que croître, aujourd’hui et demain –
en ce temps de dé- construction incontournable de l’Histoire coloniale qui a
tout (ou presque tout) fait pour légitimer le fait colonial- bien plus qu’hier.
Extraits : « Chaque
fois que le malheur a voulu nous marquer de son sceau, nous avions toujours
imprimé à notre destin le chemin de la résistance et celui de l’honneur »
(p 15) , « La connaissance de l’histoire ne
permet pas seulement à l’homme de se libérer de son passé. Elle l’aide aussi à
comprendre ses problèmes et à saisir le sens de son
devenir » (p173), « L’histoire ne se répète pas, mais elle
progresse, parce qu’il y a une certaine continuité dans les aspirations fondamentales
de l’homme » (p 175), « Dans un pays libre, l’existence et la
diversité des partis expriment l’existence et la diversité des classes sociales
(….) .Mais, dans un pays opprimé, toutes les couches sociales , à des
degrés différents , subissent le même joug » (p 290).