TRAVAIL-
BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ETUDE MOHAMED TAYEB FARES- « AISSAT IDIR…….. »
Aissat Idir. Documents et témoignages sur le
syndicalisme algérien. Etude de Mohamed Tayeb Farès (préface de Mahfoud Kadache).
Enag Editions, 196 pages, 880 dinars, Alger 2012
L’auteur, décédé en 2006, à l’âge de 96 ans,
enseigna longtemps dans le primaire puis, juste après 62, à l’Université où il
fut un de mes (inoubliables ) enseignants à l’Ecole
nationale supérieure de Journalisme de l’époque . On savait déjà qu’il était un
« mordu » de la recherche scientifique et il avait , pour objectif principal, l’écriture de l’histoire du syndicalisme
national et, surtout, la mise en valeur les efforts et le sacrifice des grands
militants de la cause nationale,…. dont, assurément, Aissat
Idir , le 1er secrétaire général, un héros
qu’il avait bien connu, ayant été lui-même un syndicaliste actif.
Ici, comme le dit si bien Mahfoud Kaddache, le préfacier, l’auteur est allé encore plus loin
que la simple biographie. « C’est en fait l’histoire du syndicalisme
nationaliste algérien d’avant 1962 et celle d’un aspect de la participation des
travailleurs algériens à la guerre de libération qui sont évoquées »
A travers les documents et les témoignages
(il avait constituées et exploitées 240 biographies), il fait revivre le cadre
familial et social du héros mais ,en même temps, il décrit l’Algérie profonde,
celle d’abord en attente de la libération,
celle des combattants qu’étaient
les syndicalistes , et les conditions de la création, avec douze syndicats
nationaux, de l’Ugta
(le 24 février 1956), puis l’extraordinaire
consécration internationale avec l’adhésion à la Cisl
en juillet 56, malgré tous les obstacles
créés par l’Usta (« Messaliste », proche de
la CGT-Force ouvrière , membre de la Cisl) et l’Ugsa (Cgt, adhérente à la Fsm) .
Que de noms (pour beaucoup oubliés), que de sacrifices, que de combats, que
d’interdictions et d’arrestations, que d’emprisonnements et de tortures…..et le
meurtre, par les forces d’occupation, du leader, , « kidnappé » le 13
janvier 1959 et torturé sauvagement par ses bourreaux. Il est déclaré décédé le
26 juillet 1959. Il parait que le président Ben Bella avait demandé (à Djermane Rabah) , en 1963
( !!!) , « quelles sont les ressources de la famille ? »
alors aidée par des amis …et par la Cisl et l’Union
Syndicale suisse. Rien n’a effectivement suivi. Il a même fallu, pour obtenir
une pension, « prouver » la
participation du père (Aissat Idir)
à la lutte de libération nationale…grâce au témoignage de Youcef
Benkhedda. Aujourd’hui, que d’oublis,
hélas !
Avis :Une monographie du syndicalisme et une
biographie de son promoteur-animateur de type académique, donc très utile pour
tous: syndicalistes , chercheurs , journalistes (Aissat
Idira été un très grand journaliste, un vrai de vrai)
. Une démarche assez académique (problématique, questionnements, etc …) et pédagogique. Ouvrage complet avec ses
annexes, ses sources et références ,sa
riche bibliographie ainsi qu’un index des noms cités.Mais,
personnellement, je n’ai pas apprécié le format qui ne correspond pas à la
valeur scientifique de l’ouvrage
Extraits : «
On l’appelait , à juste titre d’ailleurs, Idir le
sage…un « bûcheur » hors catégorie » (selon un de ses camarades
de classe, p 19), « Aissat était un militant de
grande classe : sérieux, secret, modeste, très prudent, compétent dans le
domaine de la presse et de la propagande…Aissat se
situe dans la catégorie des militants qui devaient garder l’anonymat et assurer
la continuité du mouvement national. Il était peu connu du public.Il
était apprécié par la direction centrale du parti.. »
(p 24), « Le lancement du journal « L’Ouvrier Algérien » le 6
avril 1956 occupe des dizaines de collaborateurs dès le 1er mois et
tire déjà à 30 000 exemplaires » (p 94)
Note : Lire aussi, pour compléter votre culture
syndicale, en tout cas pour vous faire une idée sur le syndicalisme post- 62,et surtout pour
connaître certains « dessous » des relations subies ou/et recherchées
Ugta- centres de pouvoir- parti du Fln « Le Mouvement syndical algérien à
l’épreuve de l’Indépendance », de
Abdelmadjid Azzi, avec une lettre-préface de Tahar Gaïd,
membre fondateur de l’Ugta. Alger-Livres
Editions, 437 pages, 850 dinars, Alger 2012. Conclusion de l’auteur(extrait)
: « L’image peu reluisante que présente , aujourd’hui, l’Ugta, cette organisation prestigieuse pour laquelle tant
d’hommes se sont vaillamment battus, ne réjouit guère » (p 399)