VIE POLITIQUE- DOCUMENTS ET TEXTES
REGLEMENTAIRES- PROJET CONSTITUTION 2020- OPINIONS AHMED LARABA 7/6/2020
-Révision de la
Constitution: Le président du Comité des experts s'explique
© Interview Réalisée Par Ghania
Oukazi/Le Quotiedien d’Oran, dimanche 7/6/2020
« La tâche qui nous a
été assignée n'était pas celle d'un changement total, d'une refondation du
système politique algérien », affirme Ahmed Laraba.
Il défend le travail du comité qu'il a présidé pour réviser la Constitution en
l'inscrivant dans le cadre que le président de la République lui a tracé. «
C'est à l'intérieur de ce cadre que nous avons travaillé, nous avons élaboré
nos propositions, conformément à la lettre de mission qui nous a été remise »,
tient-il à rappeler « régulièrement ».
Le Quotidien d'Oran: Permettez-nous d'ouvrir une parenthèse. Vous avez bien été
sollicité par le Président Bouteflika pour réviser la constitution de 2008 ?
Ahmed Laraba: Je n'ai jamais rencontré ce Monsieur. En juin 2014, j'ai été
sollicité par le directeur de cabinet de l'époque pour émettre un point de vue
écrit sur un projet de constitution que l'on m'a fait parvenir.
C'est ce que j'avais fait en précisant, nettement, par écrit et lors de
l'entrevue que j'ai eu avec le directeur de cabinet de l'époque, que mes
préconisations tournaient à titre essentiel autour d'amendements relatifs à la
partie consacrée aux droits de l'Homme et aux libertés. J'avais, notamment
invoqué, -d'autres l'ont fait- ce que j'ai appelé le principe de réalité qui me
permet de cultiver l'humilité et de ne pas faire de propositions qui n'auraient
absolument aucune chance d'être retenues. Je n'ai plus eu de contacts après.
Q.O.: La mouture de révision de la constitution que vous avez élaborée avec le
comité d'experts, comporte un fait nouveau, la constitutionnalisation d'un
mouvement de contestation, le «Hirak». Pensez-vous avoir pris assez de recul
pour savoir qu'elle est l'essence de ce mouvement, qui le constitue, quels sont
précisément ses objectifs?
A.L.: Nous nous sommes bien gardés d'aller aussi loin dans l'examen que la
signification, le sens du contenu, l'évolution du ‘Hirak'. Les préambules des constitutions sont généralement composés de deux
parties : la première est historique, retrace un petit peu l'histoire de la
société, la référence à novembre est parfaitement marquée. Il nous a semblé
évidemment inimaginable de ne pas évoquer ce mouvement qui a été d'une
puissance telle qu'il a permis de faire évoluer le régime institutionnel du
pays.
Q.O.: Une grande partie du «Hirak» était contre l'élection présidentielle du 12
décembre dernier. Comment allez-vous interpréter ce refus dans votre
raisonnement constitutionnel?
A.L.: Nous risquons d'aller au-delà de la mission qui nous a été assignée.
Cette question n'entre pas dans le cadre de la mission que j'ai acceptée.
Lorsque j'ai été sollicité, c'était pour procéder, avec les membres du Comité,
à une expertise de la constitution de 2008. Une commande nous a été faite avec
sept axes plus des hypothèses pour aller vers ce qu'on a appelé le hors axe.
C'est à l'intérieur de ce cadre là que nous avons travaillé, que nous avons
élaboré nos propositions.
Q.O.: Est-il possible de s'appuyer sur le conjoncturel -un mouvement populaire-
pour aller vers ce qui doit être fondamental pour constituer la loi suprême du
pays ? Dans ce cas, pourquoi pas ‘Octobre 88' qui lui, a
permis d'ouvrir le paysage politique au multipartisme ?
A.L.: La référence au «Hirak' était prévue dans la lettre de mission. Nous
n'avons jamais eu pour tâche, pour mission, de tout revoir ou de tout refaire.
C'est d'ailleurs ce qui a amené certains à considérer que nous étions
disqualifiés parce qu'on s'inscrit dans un cadre précis. Mais c'est ça le
cadre. Où on s'inscrit à l'intérieur de ca cadre où on refuse.
Q.O.: Les expériences de par le monde permettent de voir que les Etats les plus
démocratiques -à quelques exceptions prés- ont opté pour un régime
parlementaire. Qu'est-ce qui vous a poussé à choisir un régime
semi-présidentiel ?
A.L.: J'ai un point de vue différent. Le régime parlementaire bénéficie,
aujourd'hui, d'une aura qui peut interroger. On a connu des régimes
parlementaires dans lesquels les droits de l'Homme ont été singulièrement
bousculés. Ceci dit, pour qu'il puisse y avoir régime parlementaire, il y a une
condition qui est fondamentale à savoir l'existence de partis politiques
particulièrement forts.
L'exemple qui est répétitif, c'est le régime anglais. Mais les partis
politiques en Angleterre ont une vie qui dépasse les 200 ans. Pensez-vous
qu'avec l'état dans lequel se trouvent les partis politiques dans notre pays,
qu'il soit sage de songer à cette question. La lettre de mission à laquelle je
reviendrais régulièrement car elle est le point de départ de notre travail, ne
pas me demander de revisiter l'ensemble de la constitution ou d'élaborer une
constitution différence ou un régime politique différent. Le régime politique
algérien est depuis sa naissance qualifié de régime semi-présidentiel.
C'est-à-dire le régime où il y a l'élection du président de la République au
suffrage universel et la responsabilité du gouvernement devant le Parlement.
Nous sommes là depuis 1963 et y compris d'une certaine manière en 1989. Ce qui
a frappé dans la constitution du 23 février 1989 et qui est fort compréhensif
et même légitime, c'est le fait qu'il y a eu véritablement rupture avec le
parti unique. C'est un véritable tsunami juridique qui a été enclenché à ce
moment là. Mais si on excepte ce point fondamental pour l'avenir du pays, si on
procédait à une comparaison, au sein du pouvoir exécutif par exemple, entre le
président de la République et le chef du gouvernement d'alors, avec les
propositions que nous faisons, on aura beaucoup de mal à trouver des
différences notables.
Q.O.: Aucune rupture ne peut donc être opérée entre le système politique
d'avant et celui que vous voulez constitutionnaliser ?
A.L.: Je suis souvent mal à l'aise devant les questions qui appellent des
réponses manichéennes. Je pense qu'avec les propositions que nous faisons, nous
sommes dans une situation où on peut véritablement envisager l'amorce d'une
Nouvelle Algérie.
Q.O: Il est précisé dans votre mouture que vous avez ajouté 24 droits
supplémentaires mais tous subordonnés par des lois. Cette Constitution ne
va-t-elle pas être mise sous le coude pour laisser s'exprimer des lois
restrictives ?
A.L.: On est dans un débat important dans lequel il y a plusieurs points de vue
qui se sont exprimés. Les uns ont considéré que cette constitution était «
grasse » parce qu'il y a un nombre plus important de dispositions par rapport à
sa devancière de 2016. Ils ont considéré que la constitution rentrait dans des
détails qui relèvent plutôt de la loi. D'autres disent pourquoi renvoyer à la
loi parce que demain n'est jamais sûr et que la loi pourrait entraîner des
restrictions. Notre hypothèse à nous, a été de prendre en considération les
évolutions les plus contemporaines en matière de protection des droits et des
libertés. Pour le faire, il faut faire du droit constitutionnel comparé et de
la jurisprudence comparée. Il faut également être attentif aux conventions que
l'Algérie a ratifiées mais pour lesquelles toutes les conséquences n'ont pas
été tirées au niveau constitutionnel. Le fait que nous ayons tenu à énoncer
expressément, dans le préambule, un certain nombre de conventions relatives à
la protection des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, n'est pas
une coquetterie juridique, mais a des conséquences juridiques extrêmement
précises surtout si l'on rappelle que le préambule fait partie intégrante de la
constitution. Il a donc valeur juridique obligatoire. Ce qui est le cas depuis
2016. Cela va obliger les juges à se référer à toute une série de droits qui ne
sont pas expressément annoncés dans la constitution. Nous avons voulu aussi
détailler, chaque fois que c'était possible, pour contenir la loi dans la
constitution. Comparez par exemple les dispositions relatives à la liberté de
la presse dans la mouture de 2016 et celle que nous suggérons. L'article
relatif à la liberté de la presse est extrêmement détaillé parce que nous avons
tenté de ne rien laisser au hasard. Plus la règle est générale plus elle risque
d'être détournée dans son application.
Q.O.: Pourquoi avoir déplacé de l'alinéa 1 à l'alinéa 5 (art.54) le fait que
«le délit de presse ne doit pas être sanctionné par une peine privative de
liberté » ? Ce ne serait pas suggérer aux politiques de s'y référer en dernier
recours, voire de l'ignorer ?
A.L.: L'énumération n'est pas hiérarchique...
Q.O.: Pourquoi l'avoir alors renvoyé aussi loin ?
A.L.: Je pense qu'on a avancé des droits qui sont préalables à toute procédure
judiciaire. Mais il n'y a absolument aucune intention de la part des rédacteurs
d'aller dans le sens de cette interprétation là. L'interprétation d'un texte à
ses règles. On n'interprète pas comme on veut. Je parle de la chose juridique.
Q.O.: Mais l'interprétation des textes est souvent liée à la chose politique ?
A.L.: Lorsqu'un texte est clair, notre code pénal dit qu'il n'y a pas lieu de l'interpréter.
L'article 31 d'une convention très connue en matière de droit international des
traités nous dit : toute règle doit être interprétée de bonne foi dans son
contexte à la lumière, -je cite- de son objet et de son but. Je ne vois pas
pourquoi est-ce qu'on peut tirer des conclusions aussi extrêmes du fait que
nous avons voulu détailler le premier pan de ce qui existait en 2016 pour
laisser la question du délit de presse à l'alinéa 5. Vraiment, je suis surpris
par cette interprétation.
Q.O: Etes-vous certain que les politiques sont toujours de bonne foi quand ils
décident d'agir, eux, en fonction de leur «but» ?
A.L.: Cette disposition et les autres en général, font l'objet d'interprétation
juridique par le juge. Que le politique veut faire son interprétation, c'est
légitime, c'est de bonne guerre, c'est de bon aloi. Mais ça ne signifie pas que
c'est la seule qui pourrait s'imposer.
Q.O: Dans votre mouture, vous (ré) instituez le poste de chef du gouvernement.
Quels sont les préalables pour qu'il élabore son propre programme, ou il doit
d'abord consulter la majorité parlementaire. Que devient le programme du
président de la République ?
A.L.: Tout dépend de l'issue des élections législatives. Si nous avons des
partis que l'on pourrait qualifier de partis présidentiels qui accèdent à la
majorité au Parlement, cette majorité va être celle qui va porter le programme
du président de la République. La 2ème hypothèse, c'est celle dans laquelle il
n'y a pas de majorité présidentielle, où il y a l'opposition qui est
majoritaire au Parlement, le président de la République va alors choisir le
chef du gouvernement au sein de cette nouvelle majorité. Dans ce cas, le chef
du gouvernement appliquera son propre programme.
Q.O: N'avez-vous pas ainsi l'impression que la mouture s'applique plutôt à des
situations conjoncturelles qu'elle n'est un texte fondamental qui convient à
des temps longs -au moins deux générations- et à un mode de gouvernance moderne
?
A.L.: De part le monde, il n'y a plus de constitution qui dure une cinquantaine
d'années parce que le temps s'est accéléré. La constitution portugaise a été
modifiée 8 fois depuis 1976 et la française l'a été 24 fois depuis 1958. Chez
nous, la partie relative aux principes généraux régissant la société ne bouge pas,
le reste doit bouger parce que le droit doit être dans un rapport de
correspondance avec la réalité. Le droit est, d'une certaine manière, le reflet
de la réalité. Comme elle est mouvante, elle peut amener à renverser des choses
précédentes, il faut donc lui adapter ce texte.
Q.O.: La réalité peut, de la sorte, montrer que c'est une nouvelle constitution
pour un nouveau président ?
A.L.: Pas du tout ! C'était vrai en 63, en 76, mais en 89 ce n'était pas le
cas.
En 96, d'autres considérations ont prévalu pour amener à modifier la
constitution. La révision qui est en cours est le résultat de 20 ans
d'hyper-présidentialisme, d'une révision constitutionnelle de 2008 qui a
considérablement augmenté les pouvoirs du président et surtout le résultat
d'une pratique qui est allée crescendo en matière d'hyper- présidentalisation.
On ne pouvait pas imaginer que l'on restât sur les positions de la constitution
de 2016. Cela ne signifie pas que celle-là est la constitution du Président
Tebboune.
Q.O.: Elle lui consacre en tout cas d'énormes pouvoirs et répond au cadre qu'il
vous a tracé ?
A.L.: Pas du tout pour ce qui est des pouvoirs! Nous tentons cependant de
passer d'une constitution-programme à une constitution-loi, c'est-à-dire une
constitution dans laquelle on ne trouvera pas des idées ou des règles
partisanes ou qui relèveraient de l'idéologie. C'est une constitution destinée
à s'appliquer en principe qu'elle que soit la coloration politique du président
et de la majorité qui le soutiendra.
Q.O.: Ne lui donne-telle pas toute latitude d'agir en fonction de ce qu'il veut
puisqu'il peut -par exemple- nommer ou pas un vice-président ?
A.L.: L'hypothèse de la nomination par le président d'un vice-président pour le
seconder dans ses pouvoirs, n'est pas un fait nouveau. On l'a déjà vu en
Algérie notamment sous l'empire de la constitution de 76. En 63, le président
de l'époque a, en dehors du cadre constitutionnel, nommé Boumediene
vice-président. Donc en soi, l'idée n'est pas ajoutée.
Q.O: Quand on sait qu'à l'époque le vice-président a renversé le président,
pensez-vous qu'aujourd'hui, un président algérien pourrait être secondé dans
quoi que ce soit ?
A.L.: Comparaison n'est pas raison. Vous savez très bien que l'ère des coups
d'Etat est révolue. Aujourd'hui, avec cette mouture, le président a l'entière
liberté d'apprécier les conditions dans lesquelles il peut ou pas nommer un
vice-président. Comme on dit, le comité propose et le peuple dispose.
Q.O.: Le comité le propose en cas d'empêchement du président d'assumer ses
fonctions, pour éviter des situations de blocage. Comme tout peut arriver et à
n'importe quel moment, cette nomination ne doit-elle pas être obligatoire
plutôt que de relever d'un choix personnel du président?
A.L.: Cette question montre de manière tout à fait exemplaire le poids de ce
que vous avez appelé le conjoncturel sur la rédaction des dispositions. Moi, je
l'appelle réalité. L'histoire de ces propositions que nous avons faites, celle
de toutes les constitutions, sont d'une certaine manière l'histoire universelle
du rapport du droit avec la réalité. Le droit doit tirer des conséquences de la
réalité. Il doit dégager la rationalité et la rigueur en partant de la réalité.
La réalité qui s'offre à nous ces dix dernières années, c'est celle d'un hyper-présidentialisme
accompagné d'une situation extraordinairement anormale d'un président malade
qui n'a pas été en mesure d'exercer l'ensemble de ses prérogatives.
Q.O.: La réalité nationale ne nous met-elle pas, en même temps, -à époques
différentes-, face à un vice-président putschiste et un président malade ?
A.L.: Le texte juridique est toujours là pour s'adapter à la réalité. C'est
pour cela que les révisions s'amoncellent.
Q.O.: En référence à la réalité dont vous parlez, on lit dans le préambule de
la mouture à propos d'«Une justice plus indépendante» que «Pour des raisons
réelles ou supposées, son exercice semble demeurer pour une bonne partie des
citoyens, en décalage par rapport à l'explosion de la demande de justice».
Jugez-vous vraiment ces raisons supposées ? De quelle manière le droit
s'accorde-t-il avec le réel s'il le nie ?
A.L.: Le propre d'un argumentaire est de suggérer et ne pas affirmer d'une
manière péremptoire ou d'une manière définitive. Lorsqu'on a élaboré notre
argumentaire, notre objectif essentiel était de faciliter la compréhension des
innovations que nous avons introduites. Nous avons senti le besoin d'exprimer
dans un document toute une série d'arguments pouvant les faciliter et les
expliquer. Cet argumentaire pouvait appeler à des contre-argumentaires et
engager un débat, c'était ça la prospective, malheureusement la pandémie en a
décidé autrement.
Q.O: La loi suprême du pays peut-elle être basée sur la supposition ? Que
répondez-vous à ceux qui vous reprochent de n'avoir pas mis les bases
fondamentales, socle d'une constitution ?
A.L.: Que tel n'était pas notre mission. Je le répéterai autant de fois qu'il
le faudra, parce que c'est comme ça que ça s'est passé.
Q.O.: Un Conseil de la magistrature suprême présidé par le président de la
République ne contrecarre-t-il l'indépendance de la Justice ?
A.L.: Ça peut se discuter. Sur un certain nombre de points, nous attendons que
des tendances puissent se dégager dans les propositions qui nous seront
transmises.
Q.O.: Le fait d'avoir travaillé à l'intérieur d'un cadre circonscrit, n'a-t-il
pas limité votre mission de constitutionnaliste qui ne doit répondre que du
droit et non du politique ?
A.L.: La présidence de la République a posé un cadre à l'intérieur duquel elle
a demandé à des personnes si elles voulaient travailler dedans. J'ai hâte
cependant de connaître les points qui auraient dû ou pu être intégrés et qui ne
l'ont pas été. La tâche qui a été assignée au comité n'était pas celle d'un
changement total, d'une refondation du système politique algérien.
Q.O.: Repenser l'organisation des collectivités locales et doter notamment les
communes d'un statut ne devraient-ils pas relever uniquement d'exigences de
l'heure au lieu d'être consacrés dans une constitution?
A.L.: Ce statut sera déterminé par un autre texte que la constitution. Les lois
sont faites pour être appliquées, révisées, amendées. Notre texte est
suffisamment ouvert pour permettre toutes les maniabilités et les souplesses
possibles et imaginables.
Q.O.: Possibilité de se regrouper sur « simple déclaration », la phrase
suffit-elle pour être ce garde-fou qui oblige le politique à l'accepter ?
A.L.: C'est une avancée majeure. C'est vrai, je suis partisan de l'idée plus
une règle est détaillée et moins elle donne prise au pouvoir discrétionnaire, à
l'interprétation restrictive... C'est la raison pour laquelle on a un texte
avec autant de dispositions. Il y a la justice qui y oblige, le rôle du juge.
Je sais que cette réponse peut laisser sceptique parce qu'il y a aujourd'hui
une défiance importante à l'égard de la justice, du politique, de la
constitution. C'est une situation qui est particulièrement difficile qui ne
peut pas être réglée comme ça rapidement.
Q.O.: L'on voit que vous n'avez pas constitutionnalisé le médiateur de la
République. Pourtant, dans plusieurs dispositions, vous renvoyez le citoyen qui
réclame ses droits vers les pouvoirs publics. Vers qui devra-t-il aller ?
A.L.: Vers le médiateur de la République, la justice, le Conseil des droits de
l'Homme.... Ce sont les lois qui lui détermineront ses interlocuteurs de
recours.
Q.O.: Si les opérations de maintien de la paix sont connues de part le monde,
de quelle manière l'armée peut-elle participer à des opérations « de
restauration de la paix » ?
A.L.: La première hypothèse : la participation de l'armée dans des opérations
de maintien de la paix, des forces pacifiques d'interposition. Une telle
disposition n'est évidement pas de nature à remettre en cause les principes
fondamentaux autour desquels s'organise la politique étrangère de l'Algérie.
Les opérations de restauration de la paix sont, elles, un prolongement de
celles de maintien de la paix qui n'ont pas complètement réussi. Le débat reste
ouvert. C'est une disposition qui fait déjà l'objet d'une réflexion un peu plus
profonde pour voir dans quelles mesures les opérations de restauration de la
paix pourraient être évoquées.
Q.O.: Ne sera-t-elle pas appelée à nettoyer ce qu'a fait l'OTAN en Libye et
combattre le terrorisme au Mali ? Pourquoi aussi constitutionnaliser une «
option » qui relèverait plutôt d'une stratégie militaire dont seuls les
concepteurs jugeraient de son adaptation à des conjonctures sécuritaires
précises?
A.L.: Ce n'est pas du tout dans cette hypothèse là qu'on s'est placé. Surtout
qu'encore une fois, c'est une possibilité,-ce n'est pas une obligation-, qui
est soumise à approbation parlementaire très forte. On a visé plutôt le cadre
d'accords bilatéraux.... Ce qui me dérange, c'est cette espèce d'immuabilité à
laquelle on s'accroche de la participation sur demande d'Etats frères, voisins,
à des opérations de maintien de la paix.
Q.O.: Votre mission est-elle terminée ? Ce n'est pas vous qui mettez au propre
la mouture finale ?
A.L.: Notre mission s'est terminée le 24 mars dernier avec la remise de notre
mouture à M. le président de la République.
Il y a eu création d'une commission au niveau de la présidence qui est chargée
de recueillir et trier les observations, dans laquelle, au titre du comité
d'experts, il y a M. Laagoun et moi. C'est au président de décider ce qu'il
doit retenir ou pas des propositions que nous recevons.