RELATIONS INTERNATIONALES- BIBLIOTHEQUE
D’ALMANACH- ROMAN YASMINA KHADRA – « DIEU N’HABITE PAS LA HAVANE »
Dieu n’habite pas La Havane. Roman de
Yasmina Khadra. Casbah Editions, Alger 2016, 295
pages, 1 000 dinars.
La Havane (et Cuba, toujours
castriste) . Aujourd’hui ou hier à peine. Vu par
Yasmina Khadra à travers son dernier roman. Un titre
évocateur...pouvant laisser croire à une vie hors du temps, hors du réel,
peut-être même abandonnée....par Dieu , une vie ou un semblant de vie agrippé
aux oripeaux d’un passé en gande partie disparu, d’un
passé mythifié fait seulement de souvenirs souvent n’ayant rien à voir avec la
politique (qui est toujours faite par et pour les autres et non pour les
humbles) , d’un présent difficile bien qu’heureux et d’un avenir fait d’exils
et de fuite en avant
C’est l’histoire d’un vieux (59 ans, c’est peu mais c’est déjà beaucoup
quand on est obligé de « ramer » à longueur de journée pour gagner
dignement sa vie ) chanteur cubain , à
la « voix d’or », amoureux de lui-même ,de ses succès auprès des
publics et des quelques touristes de passage, qui , employé des décennies
durant dans les restes d’un vieux music-hall, se voit soudainement sans emploi
(l’établissement touché par les « réformes »...et la re-privatisation) . Chanter ,
c’est sa vie et la foule de fans lui manque......Retrouver un emploi stable est
plus que difficile sinon impossible pour quelqu’un de son âge, d’autant que la
mode musicale a évolué , laissant ,sur le carreau, la rumba et tous les styles
classiques pourtant assez beaux mais au public vieilli et restreint.
Sans logement fixe, car trop fixé sur son « art », il rejoint la
masse des artistes rejetés par la vie révolutionnaire faite d’austérité,
devenus des marginaux économiques. La solidarité familiale est là , mais elle ne suffit plus. Pis encore, il tombe amoureux
d’une belle jeune fille , Mayensi, de presque trente années sa cadette. Elle
aussi, une marginale d’une autre dimension.
Fille de pêcheur, adorant la poésie mais totalement « détraquée »,
car ayant perdu trop tôt un père qu’elle adorait . Il
l’ignore...et le saurait-il qu’il continuera à l’aimer.Un
jour, elle partira, lui laissant bien des blessures, mais surtout un poème
émouvant qu’il mettra en musique, qu’il chantera avec succès. Ainsi, la vie est
faite de folie, d’amour , de peines et de voies qui se
rencontrent et se séparent ...bien souvent dans la douleur. Heureusement, à la
Havane, à Cuba, même si Dieu n’y habite pas , la
pulsion de vie , avec des bonheurs tout
simples et des âmes non totalement « virusées »
, reste toujours la plus forte.
L’Auteur : Né
en janvier 1955 à Kenadsa, élève de l’Ecole des
cadets de la Révolution, ancien officier
de l’Armée nationale populaire, Yasmina Khadra , de
son vrai nom Moulessehoul Mohammed, est , aujourd’hui
, un écrivain très connu . Lu dans de dizaines de pays ,
il est traduit en plusieurs langues. Il a , à son
actif plus d’une trentaine d’œuvres dont deux sont autobiographiques
(« L’Ecrivain » en 2001 , « L’imposture des mots » en
2002) . La plupart sont des romans dont certains ont été adaptés au cinéma
comme « Morituri »,
« L’Attentat », « Ce que
le jour doit à la nuit » et
« Les hirondelles de Kaboul » et au théâtre et même en bandes dessinées...ceci sans
parler des ouvrages (dont des romans policiers) publiés sous pseudonyme au
milieu des années 80 et au tout début des années 90, inventant même un personnage fameux, celui du du Commissaire Llob (« Le
Dingue au bistouri » et « La foire aux Enfoirés ») . A noter
qu’il a co-signé, aussi, des scénarii de
films.....qu’il a été un certain temps directeur du Centre culturel algérien à
Paris......et qu’il a même tenté une courte « aventure »
politique lors des dernières présidentielles!
Avis : Un (bon) roman
qui se lit rapidement
Extraits : «
Mourir pour un idéal....c’est confier cet idéal aux usurpateurs ; les
orphelins auront beau le réclamer , personne le leur rendra » (p 11), « A La
Havane, les familles vivent à plusieurs dans un même appartement. Depuis 1959
et la révolution castriste, la population a centuplé, mais la ville n’a pas
bougé d’un poil, comme si une malédiction la retenait captive d’un passé aussi
flamboyant que l’enfer » (p 55)
Citations : «Le monde n’est pas obligé d’être parfait , mais il
nous appartient de lui trouver un sens qui nous aidera à accéder à une part de
bonheur » (p 9), « Les enfant sont ainsi faits,. Petits
, on a envie de les dévorer. Grands, on regrette de ne pas les avoir
dévorés » (p 60)