HISTOIRE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH-ESSAI
HISTORIQUE CHERIF ABDEDAIM- « CONSTANTINE.LA SAGA DES BEYS…. »
Constantine. La saga des Beys
(1518-1848).
Essai historique de Chérif Abdedaim. Anep Editions, Alger 2015, 229 pages, 950 dinars
En 314 ans d’ « occupation » turque
(1516-1830) ,Alger
a connu 102 « responsables » , Arroudj
Barberousse fondateur de la « République d’Alger » y compris : 67
pachas (de 1518 à 1659) , 5 aghas (de 1659 à 1664) et 30 Deys (de 1671 à 1830) : un tous
les trois ans en moyenne générale. Constantine a eu un peu plus de chance,
certainement due à l’éloignement : en 281 ans (de 1848 à 1567) , elle a connu 46 beys : un tous les 6,1 ans. Une
relative stabilité , d’autant que certains ont connu ,
malgré tout des règnes assez longs : 23 ans pour Keliane
Bey dit Bou Kemia, de 1713 à 1736 , et 22 ans pour le
dernier, El Hadj Ahmed Ben Mohamed Chérif (1826- 5 juin 1848) .....et bien
moins d’une année pour beaucoup (à peine un
mois pour Kara Moustafa Bey, en 1818, un débauché, aussi cupide que
vindicatif réservant à ses « ennemis » des morts parfois étranges et
cruelles. Ses scandales et ses « relations » furent découvertes par
hasard par des envoyés du dey d’Alger)
.....Les exécutions se faisaient au « yatagan ». On eut même
une « invention » :la « chattabia »
, un instrument original servant de « guillotine »,
« créé » par un des plus
cruels des beys, M’hammed Ben Daoud El Mili Bey dit
Bou Chattabia, 1818-1819, un ancien agha de la nouba
de la garnison de Mila, un homme vieux, grossier et barbare, faisant peu cas de
la vie des hommes.......Il estimait que
les « Arabes » n’étaient pas dignes d’avoir la tête tranchée avec le
yatagan et il avait ordonné qu’on se
servît d’une herminette, sorte de hache, ce qui lui valut le surnom, qui a fonctionné presque à chaque changement
ou révolution de palais. Plusieurs bey sont donc décédés de mort violente,
certains ont été assassinés, d’autres emprisonnés, d’autres, enfin, plus
rarement, morts de leur belle mort, une mort naturelle.
Constantine était organisée administrativement en
quatre régions, avec leurs commandements indépendants les uns des autres :
Est (les Hanencha) ,
Nord ou Sahel (les Fardjioua et les Zouagha) , Ouest de
Sétif aux Portes de fer (les Beni Abbas) et Sud (les Douaouda)
. On avait aussi des caids ou des cheikhs ,
tous grands chefs ayant chacun sous sa
coupe un certain nombre de tribus.....de quatre à une trentaine environ selon
les populations
Parmi les plus remarquables beys (en dehors que Ahmed
Bey qui a mené une forte résistance contre l’invasion coloniale) , il y a Salah Bey Ben Moustafa (1771-1792, soit un règne
de 21 années ) qui, jeune militaire ,
avait attiré , par ses aptitudes guerrières, l’attention d’Ahmed El Kolli qui le maria à une de ses filles. Ami, puis beau-père de Ahmed Zouaoui Ben Djelloul, proche des
Ben Gana ,
infatigable en tant que bey , grand organisateur de sa province, il tenait
surtout à ne pas laisser l’esprit de révolte gagner ses sujets .Il connut un
fin tragique .....lui aussi. Mais, il reste considéré ,
encore aujourd’hui, comme le « bey des beys » (un poème lui fut
dédié....et on dit que les Constantinoises....et presque tout l’Est algérien,
portent la m’laya noire en signe de deuil)
L’Auteur :
Journaliste chroniqueur (Nouvelle République), psychopédagogue de
formation et assez proche des maîtres de la musique andalouse. Auteur de
plusieurs ouvrages , surtout des essais
Extraits : « On l’appelait jadis la « forteresse africaine » , citée en proverbe lorsqu’on parlait de fortification,
car bâtie sur un rocher que le vide entoure encore de tous les côtés, comme la
bague enserre le doigt, sauf cependant le côté ouest. Jamais un ennemi n’y
pénétra de force » (p 5)
Avis : Un véritable
grand reportage qui tient en haleine. Du roman historique comme on en redemande.
Citation :
« Toute la puissance d’Alger à sa belle époque reposait sur la milice des janisaires, toute sa richesse sur les corsaires. Ces
conditions suffisent à expliquer que le gouvernement n’ait jamais pu être fort.
La guerre sainte , qui était son principe le plus
ferme ne fut que prétexte à des exactions : à l’extérieur par la
course ; à l’intérieur par une administration purement fiscale. Le jour où
la décadence de la course et de la milice des janissaires fit disparaître le
prétexte même, l’Alger turque ne put se maintenir et son pouvoir ne fut plus
considéré que comme de l’oppression » (pp 10-11)