VIE
POLITIQUE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- RECUEIL CHRONIQUES EL YAZID DIB-
« ALGERIE, UNE ANNEE APRES LE SOULEVEMENT…. »
Algérie, une
année après le Soulèvement d’un peuple ou la révolution d’une génération .Recueil de chroniques de El Yazid Bib (préface de Kamel Bouchama)
.Dar El Houda, Ain M’lila 2020, 207 pages, 550 dinars
La chronique
journalistique : un genre parmi beaucoup d’autres (il y en a , je crois, 27) .On a plusieurs définitions du
journaliste -chroniqueur. Toutes acceptables. Auxquelles il faudrait ajouter
celle le décrivant comme un « combattant » de l’ombre et de papier
qui, « chaque jour ou chaque semaine, dans un petit coin d’une page
» va, à partir d’un fait de société plus que d’un événement (ici, c’est
l’affaire du commentateur comme Hammouche et Merad ou du billettiste comme Abdiche et Saâd Bouakba), avec son style bien particulier (on en a eu
–on en a encore- de bien fameux chroniqueurs dont Said
Mekbel (El Gatt), Sas, Kamel Daoud, Hakim Lâalam, ….) « descendre en flammes » (dans
le sens noble des termes, et fournir une ou plusieurs opinions, car dans le but
de « faire prendre conscience » sans imposer quoi que ce
soit) un mauvais comportement, une mauvaise analyse, une
méthode bancale, une vision catastrophique . Un
journalisme moralisateur ? Peut-être ! En tout cas, toujours sincère
et toujours direct , souvent allusif et parfois
teinté d’humour….et autorisé, car capable, à inventer » de nouveaux
mots !
C’est un
peu, beaucoup même, ce que vise El Yazid Dib ?
Le préfacier , d’emblée, l’a bien décrit :
« Il veut à travers ses écrits, raconter son combat pour l’authenticité,
la droiture, l’honnêteté, la sincérité, les principes et les valeurs de la République….en
somme, pour un Etat de droit… »
Ce recueil
de chroniques, ses plus récentes, englobe une période cruciale et malheureuse , mais porteuse d’espoirs , de la vie
politique du pays : juste avant le « Hirak »,
à partir du 2 janvier 2018 « Les « hommes » du
Président ») …. Puis la période du hirak
lui-même et de ses conséquences sur la gouvernance du pays….et ce jusqu’au 16
janvier 2020 …..Puis , l’élection de Abdelmadjid Tebboune à la magistrature suprême…..avec une phrase finale
qui en dit long : « Comme toujours, gardons l’œil et au doigt
l’espoir et la vigilance ! ». Presque personne n’échappe à la
moulinette des mots et des phrases. Bref, de magistrales « haltes »
ou positions …. « qui peuvent faire office de guide bonne
conduite » . Encore faut-il que les cancres de la
politique (d’un côté comme de l’autre je précise car il ne faut en faire
accroire que seul celui qui se révolte n’a pas tort) l’entendent de la bonne
oreille et acceptent d’aller au dialogue…pacifiquement, sans malice et en toute
démocratie ?
Cinquante
trois chroniques, toutes aussi bonnes les unes que les autres mais, il
est évident que certaines méritent une attention toute particulière car elles
arrivent à résumer toutes les situations et leurs conséquences. Ainsi, celle consacrée
à « la rupture » ( p 45 à 50, 1er
mars 2019) résumée ainsi : « La rupture est dans le refus et la
disparition de ceux qui l’utilisent (le refus du 5ème mandat
et la disparition de Bouteflika) , de ceux de la classe politique corrompue et
corruptrice ».
Une autre
pour la route : celle qui dresse le « portrait » à des candidats
à l’élection présidentielle du 12 décembre 2019. Cinq ? non. Car il y a un sixième :…..le peuple. Certes il
n’est pas candidat mais, « c’est lui qui justifie l’existence et la
survie » des cinq autres.
L’Auteur : Journaliste-chroniqueur (« Le
Quotidien d’Oran »….depuis 2001) et déjà auteur de plusieurs
ouvrages (7)…dont deux de poésie ( « Les
lamentations d’un gâpain » en 2001 et
« Cendres et fumée » en 2003) et un autre de nouvelles(« Le quai
des incertitudes », en 2013) et le reste des recueils de ses
chroniques (2011, 2012 avec une préface de Yasmina Khadra,
et 2016 en deux tomes).
Sommaire :Préface/ Le prélude et l’agonie (12
chroniques)/Le Hirak, l’entame (11)/ L’estocade (
10)/ Cris , chants , soucis (9)/ L’entêtement (9)/ L’essoufflement (8)/ Le défi
et l’incertitude (4).
Extraits : « La révolte d’un jour est
l’expression d’une longue accumulation » (p 43, Chronique du 24 février
2019), « Voir des dirigeants dépassant la limite légale de la retraite,
parfois impotents n’est pas de nature à créer de l’espoir dans la réserve
juvénile que recèle la république » (p 47, Chronique du 1er
mars 2019), « Sellal faisait rire, Ouyahia faisait braire, Bedoui se
fait peur » (p 64, Chronique du 16 mars 2019), « Dans le temps , dans
les années de braises, un gouvernement à la veille de sa constitution faisait
peur quand il ne suscitait pas du respect, aujourd’hui, il fait rire, même
pleurer » ( p 78)
Avis :L’expérience de l’écriture, la maîtrise du
langage, le regard du journaliste , l’approche du chroniqueur....et la sagesse
du temps.
Citations : « La violence silencieuse et gangrénante est plus dangereuse dans le long terme que
celle exercée au grand jour » (p 18.Chronique du 14 janvier 2019),
« Quand l’impudence maquille les tares, le zèle ne suffit plus à rendre
l’incompétence , compétence » (p 41, Chronique du 22 février 2029),
« C’est dans les stades que les embryons du hirak
ont germé .C’est dans ces arènes algériennes que les plus prestigieux
hymnes de la liberté ont été confectionnés. Un nouveau langage de jeunes y
était né sans pour autant que les parrains du pays n’en savaient son
déchiffrement….On les a toujours pris pour des « chahuts de gamins »
(p 101, Chronique du 10 juin 2020), « Il n’y a pas que la loi qui
forme le Droit. La sagesse, le bon sens sont aussi des sources intarissables
d’un certain Droit qui n’est pas forcément express » (p 165, Chronique du
7 novembre 2019)