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Roman Tariq Ali - "La nuit du papillon d'or"

Date de création: 31-05-2020 19:49
Dernière mise à jour: 31-05-2020 19:49
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RELATIONS INTERNATIONALES- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ROMAN TARIQ ALI –« LA NUIT DU PAPILLON D’OR »

La nuit du Papillon d’or. Roman (« Le Quintet de l’islam ». Livre cinquième ) de Tariq Ali, Apic Editions( éditeur original en anglais : Verso, Londres 2010 et Sabine Wespiesr éditeur pour la traduction française , 2011)  , Alger 2016. 293 pages, 900 dinars.

Le Pakistan n’est jamais nommé (l’auteur utilisant « Terrepatrie », ce qui est assez émouvant, tout en citant Lahore) mais, en fait, c’est le personnage central d’un roman de gare à l’eau de rose (les amours  se font et se défont sans jamais tomber dans le vulgaire) qui aurait été quelque peu insipide s’il n’y avait le talent, que dis-je, le génie d’un auteur qui, malgré un long et lointain exil, a su décrire, à travers des faits du quotidien,  sa passion pour son pays natal.....secoué par les dictatures , pour la plupart militaires, les répressions tout particulièrement contre les démocrates,  et pays enfermé dans une société engluée dans ses traditions et une religiosité exploiteuse et souvent meurtière avec ses fanatiques.

L’histoire  démarre au sein d’un groupe de jeunes formé durant la scolarité dans les années 60 ....La vie les sépare et on les retrouve éparpillés, qui à Londres, qui à New York, qui à Paris, qui en Chine, qui partout ...

Quelques décennies plus tard, le téléphone sonne chez Dari, le narrateur, écrivain célèbre (et célibataire) installé à Londres. Un de ses anciens amis, Platon ,peintre jouisseur et anarchiste sur les bords , devenu célèbre -  celui-ci resté au pays malgré tout -  lui demande d’écrire sa vie. Une sorte de dette d’honneur. Commence  alors  une recherche des amis perdus de vue.

Dari les rencontre –il revoit ainsi Jindié « le Papillon d’or »,  son premier et grand amour de jeunesse , fille d’un riche savetier d’origine chinoise ,  mariée à son ami Zahid, urologue réputé ...ayant soigné Dick Cheney, ce qui n’est pas peu . Il rencontre Zaynab , riche héritière .....mais seulement après la mort de frères qui l’avait « mariée au Coran » afin qu’elle n’hérite pas. Il croise  Yasmine, la « Coquine » , jolie jeune femme, épouse d’un officier supérieur mais qui faisait les bons moments d’officiers généraux (avec l’assentiment de son mari)  ....obligée de jouer à l’agent de renseignement du Drs du coin. Réfugiée en Europe, elle déballe tout....et elle sera assassinée par son époux et ses deux enfants qu’elle avait déshonoré, dirent –ils .

Il ira même en Chine, rechercher et retrouver le frère de Jindé, « Confucius »,  parti faire la « révolution culturelle » et que l’on n’avait plus revu

A travers toutes ces rencontres , c’est en fait le portrait du Pakistan qui est dressé : Un portrait certes dévastateur ( avec un certain humour qui fait passer les signes les plus tristes)   mais pour des raisons totalement différentes invoquées habituellement par les observateurs extérieurs , surtout occidentaux.

Bien sûr, Platon est mort et tous se retrouveront au pays natal pour inaugurer un musée portant son nom (financé par Zaynab). On y dévoile aussi la dernière œuvre : une toile gigantesque intitulée « Les quatre cancers de Terrepatrie » (voir plus bas :Extraits)

 

L’Auteur : Tariq Ali est né à Lahore , au Pakistan en 1943. Intellectuel engagé, opposant à la dictature militaire, exilé en Grande Bretagne, devenu britannique, il fait partie de l’extrême gauche anti-libérale depuis la fin des années 60 . Historien, écrivain, et commentateur politique, il est membre du comité de rédaction de la New Left Review et directeur de la maison d’édition londonienne Verso. Il écrit également pour le théâtre, le cinéma et la télévision . Il est l’auteur d’un grand nombre d’ouvrages historiques et sur la résistance. Son « Quintet de l’Islam » comprend cinq (5) livres dont celui-ci est le tout dernier ( Le Livre premier, « Un Sultan à Palerme » a été édité par  Apic Editions, en 2012).  Il est traduit dans le monde entier . Il aurait inspiré aux Rolling Stones leur chanson la plus engagée, en 1968, « Street fighting man »

Extraits: « Le discernement disparaît à fond de train de la culture occidentale. Les gens aiment à fond de train ce qu’ on leur dit d’aimer, et comme ils ont payé le prix fort pour être là, ils veulent se convaincre qu’ils ont vu et entendu quelque chose de bon. Au théâtre c’est pareil. Toute critique sérieuse est jugée déloyale » (p 157)  « Voici les quatre cancers de Terrepatrie : l’Amérique, les militaires, les mollahs et la corruption » (p 180)

 Avis : Un livre autobiographique ? En tout cas, incontournable d’autant que cette fois-ci , on en apprend  énormément sur le Pakistan,certes , mais aussi  sur nous-mêmes et  sur nos sociétés. Facile à lire car l’auteur est un conteur formidable, drôle et imaginatif, satirique et très bien informé.

Citations : « Les amitiés sont d’une mobilité ridicule. Elle filent, évoluent, disparaissent , s’enterrent comme des taupes pendant de longue périodes et s’oublient aisément , surtout si l’un des amis change de continent » (p 10) , « L’amour pur confine à l’extase religieuse et à la vénération....Il sépare aussi l’amour de la passion. Le premier pour l’épouse, la seconde pour une courtisane et ensuite une maîtresse « (p 31),  « La plupart des Américains adorent la religion, et cela fait partie de la corbeille de noces si vous en épousez un » (p 141), « Les seules unions qui marchent doivent être fondées sur des passions sincères. L’amour et la politique » (p 168), « Les romanciers et les célibataires ont ceci de commun : ils sont en permanence à la merci d’impulsions capricieuses » (p 201), « Un artiste ne devrait jamais être en harmonie avec son temps même si les temps s ’accordent à ses croyances. Un artiste doit toujours regarder au-delà, vivre sur l’arête. Autrement l’art deviendrait prévisible » (p 247),