RELATIONS
INTERNATIONALES- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ESSAI AMMAR BELHIMER- « LES
PRINTEMPS DU DESERT »
Les printemps du
désert. Essai
de Ammar Belhimer. Editions Anep ,
Alger 2016 , 258 pages, 650 dinars
Avec M.
Hamouche (Liberté) , après M. Hemici (El Khabar) , après K. Benkara (Sawt El Ahrar) ,
après (feu) K. Ameyar (La Tribune) , après A. Belkhodja (El Moudjahid)...... il était temps que
les écrits de presse , en tout cas les études , les commentaires et les analyses,en attendant les reportages et les enquêtes signés
de journalistes (ayant ou non la carte de professionnel) fassent l’objet de publications sous forme
d’ouvrages mis à la disposition des publics qui ont « raté » la
lecture lors de la parution dans le journal habituel. D’autant qu’un ouvrage
permet de structurer les écrits leur donnant une homogénéité
, dégagée des contraines de l’actualité.
C’est au tour de Ammar Belhimer
de nous livrer un recueil de cinquante –huit ( 58) chroniques parues dans Le Soir d’Algérie
mais ordonnées sous huit (8) grands
sujets , tous sous le thème du « Printemps arabe » ou
« Révolution » .... « le plus grand tsunami qui ait frappé
le monde arabo-musulman » . Pour lui (en
Avant-propos) une appellation élogieuse
et les peuples attendent toujours les changements promis. D’accord avec lui sur
ce point !Pour lui, que pouvait-on
attendre de scenarii (sic !) élaborés et mis en œuvre pour redessiner la carte politique d’une région
marquée par la nostalgie d’une décolonisation victorieuse, d’un nationalisme
triomphant et d’équipes socialisantes parfois animées par la volonté sincère de
progrès et de justice sociale . Pas totalement d’accord avec lui, car il a
(volontairement ?) oublié les tentations (et les actions) totalitaires et
dictatoriales de gouvernants arabes....qui
( candides ou machiavéliques ou mauvais
calculateurs ou incompétents ?ou.....) ont largement facilité l’ouverture de brèches béantes aux
interventions étrangères et aux extrêmismes locaux
L’Occident qui cherche de nouveaux relais (avec des
libéraux qui déçoivent et une censure qui nourrit la violence) / L’impérialisme
(qui) se rabat sur les monarchies (dont la force de frappe wahabite
, l’argent des arabes et le culot qatari) / La mise en œuvre du GMO (et les ONG
qui s’en mêlent) / Le nouveau « deal » (avec les néo-libéraux
qui n’aiment pas l’Islam et la fatalité de la terreur) / Et après...(avec le
marasme économique et les puanteurs conservatrices) / Les brumes du mythe et de l’idéologie (avec
la revanche des monarques, l’esclavage au temps des Emirats et....... des
illusions meurtrières) / Les « révolutions arabes » deux ans
après (avec l’enigme Sissi, Manama entre deux feux,
les Frères qui déçoivent..., et manifester jusqu’à quand ?/ Enfin, les désillusions (avec une recolonisation en
vue, l’arrogance impérialiste, ce qui nous attend en 2015, les menaces sur
l’Etat-nation......et nous ? Doutes et scepticisme)
L’Auteur :
Docteur en droit , professeur de l’enseignement
supérieur à l’Université d’Alger I, ancien journaliste (il a été un des grands
animateurs du Mja) , actuellement chroniqueur au
quotidien Le Soir d’Algérie. Auteur de nombreuses études de droit et d’économie
et de droit de la communication. A déjà publié un ouvrage (Chez Casbah Editions) , en 1998, sur
« La dette extérieure de l’Algérie : analyse critique des politiques
d’emprunts et d’ajustement »
Extraits : « La
recherche démontre que la décision de réprimer ou de censurer les médias sociaux
dans une situation de troubles civils - au-delà des conséquences culturelles
déplorables qu’elle génère, tenant à une répression condamnable de la liberté
d’expression – est également , et surtout, contre-productive (suboptimal) quant à son impact attendu sur la violence
civile » (p 20), « Le wahhabisme est au terrorisme ce que le
sein maternel est au nouveau-né : une source irremplaçable de vie »
(p 51), « Autre secret de la résilience des royaumes arabes, moins médiatisé :
le recours systématisé à la matraque. Leurs armées n’ont gagné aucune guerre
conventionnelle mais elles sont venues à bout de tous les soulèvements »
(p 63) , « Les monarchies du Golfe sont de toutes les ouvertures et
tolérances dès lors qu’elles ne touchent pas au sempiternel statut inférieur
des femmes indigènes » (p 68),
« Sissi semble être à Nasser ce qu’Eltsine était à Staline »
(p 155) , « Tout dollar qatari investi dans une économie est socialement
maudit parce qu’il est porteur des
pires valeurs que la perversion humaine puisse enfanter » (p 170),
« Le salafisme (...) est la matrice de toutes
nos défaites annoncées....C’est sur cette époque (celle de la pensée
obscurantiste incarnée par Ibn Taymiya :
1263-1328) que sont encore fixés les rétroviseurs qui orientent nos questionnements
contemporains. Dans l’autre camp, les yeux sont fixés sur un pare-brise d’une
étonnante visiblité » (p 221)
Avis : C’est « tout bon » ! Pour le
chercheur, pour le curieux ....et pour le lecteur du Soir d’Algérie qui
a « raté » la chronique
« À Fonds perdus ». Ecrits et commentaires basés sur une documentation toujours sourcée et des travaux de recherche solides.....même s’ ils ne sont pas tous crédibles. Un seul manque : la datation des
chroniques afin de contextualiser .
Citations : « Tout le destin d’une grande Révélation est réduit à ce que le
vulgaire marché veut bien en faire » (p 7), « Ferveur révolutionnaire
et sagesse démocratique ne se conjuguent malheureusement pas à tous les
âges » (p 86), « Comme la liberté économique et la liberté politique
ont été dissociées pour que les politiciens puissent s’en servir de leviers de
commande pour se maintenir au pouvoir, forcément, alors une liberté n’en
entraîne pas automatiquement une autre » (p 126), « Au-delà de
l’effervescence de l’espace public, ce sont les injustices qui constituent le
terreau immuable de la rage et de la haine sociales dans nos sociétés » (p
201)