CULTURE
- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ENTRETIEN WASSINY LAREDJ & LAURA RACHELL GOBBI- « PATRIE DES
MOTS….. »
Patrie des mots ,
territoire de l‘intime. Entretien de Wassiny Laredj et Laura Rachell Gobbi. Editions Anep, Alger 2015, 196 pages , 600
dinars
Wassiny Laredj, on l’a
écrit et il le redit , c’est un homme qui n’est à
l‘aise que dans un territoire sans police des frontières, sans inquisition
religieuse ou politique.Un territoire qui ressemble à
la terre rêvée. Il est le rêve lui-même.Car, alors , il se sent bien à l’aise et en accord avec lui-même.
Il se confie à Laura et, à travers elle , au lecteur, certainement pour être mieux
compris , avec des mots adaptés , qui touchent l’intime de ses
fidèles ......et de tous les autres. Dans le monde arabe, en Algérie, dans
le monde occidental. On sent son émotion
lorsqu’il parle d’une enfance insatisfaite. C’était la guerre. Il n’a pas joui
d’un père comme tout le monde. Le sien est mort au combat .
Un enfance
marquée.......heureusement... « par une mère extraordinaire qui s’ est vraiment battue pour son statut de femme et de mère
de famille , s’imposant par sa générosite, son
courage et son abnégation ». Il y a , aussi, sa
grand-mère , à l’ « imaginaire fertile », racontant ses aïeux
andalous fuyant l’Espagne fanatique des rois catholiques. Il lui doit son
imaginaire mythique qui marque la plupart de ses œuvres littéraires.
On sent , par ailleurs, une « révolte »
contenue quand il parle du monde arabe . Un monde qui aurait pu être
le centre spirituel. Il faut l’entendre ,
avec Laura , parler de son (long) séjour d’étudiant à Damas...Damas où, avec Zineb , son épouse, ils ont « fait » leurs deux enfants.Un autre monde. Une autre vie .
« Le mal arabe est tellement profond qu’on a besoin de millions de pages
pour dire l’indicible, dire l’histoire cachée ou confisquée » (p 163).Il
faut l’entendre , aussi, parler de l’état de la
littérature et de l’écriture. Un régal pour le « critique
littéraire » !
Les
Auteurs : -Né en 1954 dans la région de Tlemcen. Nomade
impénitent…. entre Tlemcen, Oran, Damas, Alger, Los Angelès
et Paris……où, depuis 1994, il enseigne la littérature à la Sorbonne. Auteur de
plusieurs romans traduits en plusieurs langues, dont le français. Il a obtenu,
aussi, plusieurs prix littéraires, dont , en 2001, le
Prix du roman algérien pour l’ensemble de son œuvre, en 2006, le Prix des
libraires et, en 2007, le Grand prix de la littérature arabe pour « Le
Livre de l’Emir » . Son livre « Fleurs d’amandier » a été
présenté dernièrement dans cette rubrique
-Laura Gobbi, quant à elle, est une journaliste italienne
Extraits :
« La langue arabe avec laquelle j’écris essentiellement n’est plus la langue
hermétique du Coran, mais un espace libre , une langue de l’amour et surtout de
la modernité que notre époque et le politique superficiel ont travestie et
réduite » (p 13), « La langue française dans laquelle se façonne une
partie de mon imaginaire d’aujourd’hui
n’est pas seulement une langue qui a presque deux siècles de présence en
Algérie, c’est-à-dire une certaine légitimité, mais elle est en nous, fait
partie de notre imaginaire partagé avec d’autres peuples. Elle nous propulse
au-delà de la fenêtre de notre petite maison si sûre « (p 13), « La
mémoire de nos jeunes d’aujourd’hui est très vide....Ils croient que le tout
s’était fait comme ça sans qu’il y ait un effort au préalable... » (p 179)
Avis :
Pour mieux et bien connaître Wassiny Laredj. Le comprendre aussi et surtout. Alors, on lui
pardonnera tout (si on a quelque chose à lui reprocher) .
Citations :
« On ne naît pas écrivain, on le
devient ; pour le devenir, il faut contourner toutes les embûches, comme
dans les grandes fables. L’écriture est plus qu’une histoire, c’st un bonheur,
un mérite » (Laura Rachell Gobbi, 8) , « Les langues n’ont pas de problème de se
retrouver dans un même territoire, ce sont plutôt les hommes qui se murent
derrière des bétons idéologiques et identitaires » (p 12), « Le mur de Berlin est tombé, combien de
murs ont vu le jour depuis ? » (p 17) « Quand la religion
s’immisce dans l’amour, elle le détruit, elle l’efface et le transforme en
haine » (p 169)