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Essai Yassine Temlali- "La genèse de la Kabylie...."

Date de création: 26-05-2020 17:11
Dernière mise à jour: 26-05-2020 17:11
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CULTURE -BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ESSAI YASSINE TEMLALI- « LA GENESE DE LA KABYLIE…. »

La genèse de la Kabylie. Au origines de l’affirmation berbère en Algérie (1830-1962) . Essai de Yassine Temlali (Préface de Gibert Meynier et postface de Malika Rahal).  Editions Barzakh, Alger  2015, 307 pages, 1 000 dinars

Comment s’est formée la Kabylie. Comment s’est formée la nation algérienne. A travers l’évolution historique retracée par l’auteur, on arrive quelque peu , mais pas tout à fait, à démêler l’écheveau d’une situation aussi compliquée que  ses hommes .

A travers une étude comparative des deux bastions montagneux de la berbérité en Algérie – la Kabylie et les Aurès Nementchasl’ auteur tente de restituer le cadre historique dans lequel est née la conscience culturelle et politique berbère.

Bien sûr, rien ne peut être compris sans une prise en compte du poids de la colonisation du pays....et de l’attitude d’Algériens « peu solidaires  » du pouvoir janissaire oppressif.

En écrivant cette « pré-histoire » de l’affirmation politique berbère contemporaine en Algérie, il a tenté de fonder « scientifiquement  » une distance critique vis-à-vis des discours identitaristes, qu’ils soient berbéristes, kabylistes, arabistes ou islamistes.....et, surtout éviter une histoire « éclatée » en une multitude de récits ethniques.

Les langues berbères ont difficilement survécu , tout particulièrement durant les conquêtes islamo-arabes et l’occupation française, même si l’arabisation première était essentiellement citadine et que les hilaliens ont été des «  agents redoutables de l’arabisation du Maghreb » . Seuls les montagnes et les oasis ont été les ultimes refuges de la berbérophonie. C’est l’occupation française qui va apporter avec elle un bouleversement socio-économique et culturel avec son « analphabétisation  » et sa « désislamisation » , avec un credo : « diviser pour régner » et entraîner la rupture des liens de solidarité supra-tribale. Avec, cependant,  une sorte de retour de manivelle :  l’occupation française  est devenue, sans se rendre compte, « un agent d’intégration des régions berbérophones à un nouveau pays, l’Algérie » ....Les élites instruites algériennes ont redécouvert  la « berbérité » de l’Afrique du Nord.

L’auteur consacre un chapitre aux deux courants que sont le « berbéro-nationalisme » et le « berbérisme ».

Et, bien sûr, il y a la Guerre de libération –une tranche de l’Histoire à ne pas regarder à travers la lorgnette déformée par l’ethnographie coloniale, qui essentialise les données sociologiques et évite de poser le problème de la responsabilité du commandement du Fln , issu du Congrès de la Soummam, dans l’aggravation des dissenssions  internes -  qui a vu « le particularisme auréssien à l’épreuve du jacobinisme du Fln »

L’Auteur : Né à Biskra en 1969, issu d’un famille d’ascendance chaouie...arabisée (Béni Barbar/Khenchela) , vivant entre Alger et Le Caire.  Journaliste, traducteur et chercheur en histoire et linguistique (études à Constantine où, militant de de la cause amazighe,  il a appris le kabyle, et à Alger.....et à l’Université de Leyde aux Pays Bas). Déjà auteur d’un ouvrage : « Algérie , chroniques littéraires de deux guerres » , aux Editions Barzakh.

Avis :  Un historien pas ordinaire. Une démarche d’analyse exemplaire par sa rigueur. Un essai global et documenté. Un ouvrage innovant . Une histoire captivante...mais  inquiétante.

Citations : « En dépit de leurs antagonismes, ils ( les récits nationaliste, berbériste et kabyliste) sont structurellement identiques. Ils sont tous fondamentalement jacobins, obsédés poar le recherche des éléments d’unité et l’escamotage des différences » (p 45), « Avant l’Indépendance, l’arabe littéral a moins servi l’arabisation des Berbères qu’à l’unification des élites algériennes et à leur rapprochement des élites maghrébines et proche –orientales «  ( p 73) , « Les « berbéristes » étaient d’abord des nationalistes qui préconisaient la violence révolutionnaire pour mettre fin au sytème colonial... Leur radicalisme se nourissait de leur ancrage socioculturel montagnard qui se manifestait à travers leur méfiance à l’égard des citadins qui craignent la lutte armée...  » (p 179)  , « Il n’y a plus , de nos jours, que l’histoire scolaire pour donner de la Guerre de libération l’image romantique d’une marche harmonieuse vers la liberté «  (p 213) , « L’Indépendance a marqué le parachèvement de la formation de l’Algérie moderne. Elle a aussi marqué le parachèvement de la formation de la Kabylie en tant que province algérienne particulière ....Sans ce processus de fusion dans l’entité Algérie, la région kabyle n’aurait pas pris conscience de son appartenance à un domaine plus vaste, le domaine berbère, ni même de sa propre homogénéité ethnolinguistique » » (pp 266-267)