HISTOIRE- RÉSISTANCE- RÉCIT
HISTORIQUE TAHAR OUSSEDIK- « OUMERI »
OUMERI. Récit historique de Tahar Oussedik. Editions Laphomic,
Alger 1982 ( ?), 174 pages, 37 dinars
1/ Eviter de tuer inutilement. Ne faire usage de
ses armes qu’en cas de légitime défense.
2/Rançonner les riches qui, grâce au marché
noir, ont acquis des fortunes scandaleuses.
3/ Aider et soulager les pauvres et les
malheureux qui peinent et souffrent.
4/ Sanctionner sévèrement les agents de
l’Administration qui brutalisent les faibles
Voilà donc le programme d’actions, assez clair , d’un homme du Djurdjura qui allait devenir en
très peu de temps le « bandit d’honneur » le plus célèbre.
Lui, c’est Belaidi
Ahmed , dit Oumeri. Né au
village Ait –Djimâ, dans la région d’Ait-Bouadou ,
considérée alors comme la partie la plus austère de la commune des Ouadhias. Une localité présentant un aspect plus misérable
que celui des autres agglomérations plus proche d’une vallée verdoyante et
riche.
Le jeune Ahmed grandit dans son village de
montagne. Il maraude , découvrant les coins et recoins
les plus secrets de la montagne environnante. On ne sait jamais ! Il ne
dédaigne pas la bagarre surtout lorsqu’il s’agit de défendre l’honneur et la
dignité de la famille. IL grandit , devient un garçon
bien constitué robuste et il ne travaille dur aux côtés de son père.
Mais voilà qu’un jour de marché
, il lui arrive de corriger en public un garde –champêtre arrogant. Il
est recherché. La fuite . Des petits
boulots ……puis l’exil en France….Appelé « sous les drapeaux »,
il revient en Algérie et intègre l’armée. Il participe avec bravoure à la 2ème guerre
mondiale…mais abandonné dans les tranchées par ses compagnons et officiers, il
se rend à Paris….
Revenant en Algérie, recherché comme
« déserteur », ayant connu un militant du mouvement national (Ppa) Hadj Ali Arezki, ayant appris les massacres des
populations de 8 mai 45, par le pouvoir colonial, il décide alors de
« prendre le maquis »…..Cela va durer jusqu’au dimanche 16 février
1947 à midi quand, trahi par ses hôtes de Iazouène,
qui l’avaient invité –avec Arezki- à un couscous de l’amitié, il tombe dans le
traquenard tendu de connivence avec les autorités coloniales . Il sera tué
(ainsi qu’Arezki) .
Un homme venait de mourir, une légende allait
naître. Et, on chantera encore longtemps son courage dans les chaumières du Djurdjura . Extrait du « Chant de mort d’Oumeri » (voir pp 173-174) :
« Quoiqu’ absent, son nom dans les cœurs luit /Il espère
qu’on se souvienne de lui/ Et, si sous terre il est enfoui/ C’est pour les
déshérités /Qu’il s’est sacrifié.
L’Auteur : Un
véritable historien, non pas académique mais seulement historien vulgarisateur,
recherchant surtout à transmettre l’amour du pays et de ses héros….une passion
faisant fi de toute notoriété. Né le 20
janvier 1913 à Sidi Nâamane (Tigzirt),
décédé le 2 octobre 1994 à Alger. Enterré , selon son
vœu à Ain El Hammam, berceau de sa famille. Une vie pétrie de sentiments très
forts : l’amour de la patrie et la foi en la jeunesse algérienne.
Instituteur (à partir des années 30), volontaire combattant contre le nazisme,
militant au sein du Ppa-Mtld…arrêté
en 1951…encore arrêté en 1957 durant la guerre de libération nationale et
torturé (durant 36 jours ; ce qui lui laissera des séquelles) par
les paras de M. Bigeard, ayant partagé la cellule de Ali Boumendjel…..réfugié
en Tunisie, membre de l’Aln ...redevenu
instituteur à l’Indépendance puis fonctionnaire au ministère de l’Information
et de la Culture où j’ai eu, à partir des années 70, le plaisir, l’avantage et
l’honneur de le croiser et de, bien souvent, discuter avec lui. Un homme plein
d’humanité …et d’humour. Auteur
de plusieurs ouvrages historiques :
« La Berbérie » ,
« les Poulains de la liberté » , « Si Smail »,
« 1871, Insurrection en Algérie », « Des héroïnes algériennes
dans l’histoire »………
Extraits : « Auparavant,
et aussi loin que remonte le souvenir, le Djurdjura a toujours constitué le
havre de paix et de sécurité des hommes qui avaient osé braver la fureur des
« forces de l’ordre » (p 8), « Dans ce monde tourmenté, les mots
perdent leur vrai sens et changent d’interprétation, selon le côté de la
barricade que le destin réserve à chacun ; D’un côté , on prend mais on ne
vole pas et le législateur n’hésite pas à présenter des décrets qui légitiment
et officialisent les actes les plus répréhensibles ; l’exécutif , qui
perçoit des prodigalités substantielles , accepte et cautionne tout. De l’autre
côté, on est , pour des faits identiques, exposé aux
rigueurs les plus extrêmes et aux foudres de la justice , car on vole et on ne
prend pas « (p 109), « Les chiens sont les pires ennemis des révoltés
et des déracinés sociaux ; excités par un flair très développé, ils
signalent la présence de tout élément étranger. Le drame, c’est qu’ils ne
dorment jamais » (p 115).
Avis :Un roman
d’aventures plus qu’un simple récit. Avec un style clair, simple, précis . Un ouvrage plus que digne d’être adapté au cinéma.
Citations : « Si
tu t’attaques à plus faible que toi, Dieu t’enverra un homme plus fort pour te
châtier. Sois toujours juste et correct » (p 25), « Les hommes , quelle que soit la réputation qui les précède ou
les accompagne, ne peuvent échapper à la défaite amère s’ils se laissent
surprendre par négligence, mépris du danger ou manque de précaution. Il n’y a
pas de surhomme et celui qu’on classe dans cette catégorie ne se différencie
des autres que par sa connaissance des insuffisances et faiblesses humaines
« (p 83), « L’ordre , dicté par la force et
la contrainte, conduit fatalement au désordre, parce qu’il s’oppose au droit et
à la justice » (p 108)