HISTOIRE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH-
ESSAI M’HAMED HOUAOURA- « LA PLUME ET LE COMBAT. LES TÉMOIGNAGES »
La plume et le combat.Les
témoignages. Essai de M’hamed Houaoura (préfacé par Belkacem Ahcene-Djaballah) . Editions Dar El
Gharb, Oran 2029, 217 pages, 700 dinars .
Pour les nouvelles générations, la presse algérienne
(je ne parle pas du journalisme algérien et de titres nationalistes qui ont
existé bien avant jusqu’en 54-55 en Algérie même et il y en eut) n’a que 58 ans d’âge. Eh bien non, elle est bien plus
âgée que ça. Elle est plus que sexagénaire et presque septuagénaire. En effet,
le premier journal au titre bien évocateur « Résistance Algérienne »
(« El Moudjahid » reprendra le flambeau en juin 1956, à Alger, dans
la clandestinité puis à Tétouan , puis à Tunis) est né
en juillet 1955 …..à Tétouan.
Par la suite , on a eu la radio fin 56 avec « La Voix de
l’Algérie combattante »….puis le cinéma fin 1957….puis l’Aps fin 61….
De nombreux
militants et résistants se sont, donc, retrouvés, parfois sans le faire exprès,
plongés dans le monde de la communication de combat et donc, ont pratiqué le journalisme…au service de la Révolution
algérienne. Ceci sans compter les
Commissaires politiques (les Mouhafedh Essiassi) « pères » fondateurs de la communication « institutionnelle ».
Pour les seuls
journalistes, ce sont environ plus de cent qui ont effectivement travaillé dans
la presse nationaliste de 1954 à 1962….et près d’une cinquantaine ont été
emprisonnés dans les camps de concentration colonialistes.
Une grande, belle
et périlleuse aventure qui reste encore à décrire et à écrire. Cette fois-ci,
l’auteur journaliste de terrain et
d’investigation s’est intéressé au parcours de quelques héros .Chacun
d’entre- eux livre ses souvenirs et ses espoirs. En toute simplicité
, en toute franchise.
Zahir Ihadadène,
né à Sidi Aïch le 17 juillet 1929, « élevé dans
la ferveur patriotique » (comme son frère aîné, déjà militant de l’Os/Ppa), traumatisé par la tragédie du 8 mai 45, étudiant à la
médersa de Constantine, militant à Alger, enseignant à Miliana, , arrêté par la
police coloniale , « interdit de séjour » , «confiné » à Oran,
en France puis se retrouve au Maroc…..et à Tétouan au sein de la première
équipe rédactionnelle de « Résistance algérienne » (alors dirigé par
Ali Haroun) .Il est décédé le 20 janvier 2018.
Lamine Bechichi, né à Sedrata le 19
décembre 1927, d’un père imam mouderres , étudiant à Tunis pour devenir enseignant de langue arabe, se « met » aussi à la
musique (violoniste). Enseignant à Sedrata, , il rejoint , en septembre 56, la Tunisie et se retrouve
intégré dans l’équipe rédactionnelle de « Résistance algérienne »
(Edition C dont le premier n° sort le 1er novembre 1956) puis dans
celle d’ « El Moudhjahid » (langue
arabe) ainsi dans l’émission « Sawt El Djazair » sur « Radio Tunis » au côté de Aïssa Messaoudi . Puis Le
Caire, toujours dans la Com’, puis Tripoli.
Pierre Chaulet né à Alger . Pour lui,médecin,
le 1er Novembre 1954 était une délivrance . Proche de André Mandouze, il avait, en décembre 54, hébergé chez lui A.Mehri et Salah Louanchi
recherchés par la police. L’épouse, Claudine
elle aussi élève en sociologie de Mandouze, fut , à son tour happée par la Révolution algérienne. La
suite est une grande (més-) aventure qui mènera le couple à Tunis au sein de la
rédaction d’ « El Moudjahid » en compagnie de Frantz Fanon . Il sera journaliste, organisateur de la
documentation puis du service cinéma, puis réalisateur de documentaires
cinématographiques, et, aussi, Dg p/i (pour quelques jours, fin juin 1962) de
l’Aps…..Après l’indépendance du pays, il redeviendra
médecin. Il est décédé le 5 octobre 2012.
Evelyne Lavalette,
est née en 1927 à Rouiba. Belle et élégante et
n’ayant aucun contact avec « les indigènes »,elle
découvre, en 1948, en tant qu’enseignante, la réalité de la vie des populations algériennes en tant
qu’enseignante ….à la Basse Casbah. Proche de Mohamed Drareni
(à travers les activités scouts et la
revue « Consciences Maghrébines ») ,elle découvre sa véritable identité .
Benyoucef Benkhedda lui
confie des missions de liaison…dont certaines à Oran où elle rencontre Denise
Pia, une autre militante. Elle fut , aussi ,
logeuse , rue Daguerre puis rue Kehlifa Boukhalfa, de: Benkhedda, Sadek Dehilès, Amar Ouamrane, Abane Ramdane….Larbi Ben M’hidi. Et, aussi, membre de l’équipe qui avait confectionné
les premiers numéros d’ « El Moudjahid »….Elle avait
dactylographié et transporté l’appel à la grève des étudiants du 19 mai 1956 et
la lettre que Zabana Ahmed avait envoyée à ses
parents la veille de son exécution. Arrêtée, elle n’est libérée
qu’en août 1959. Exilée en France, elle est « exfiltrée » en Tunisie où elle s’occupera des enfants
orphelins algériens dont les parents avaient été tués en Algérie. Après
l’indépendance, elle a fait partie de la 1ère Assemblée nationale du
pays….et épousera Abdelkader Safir, un journaliste.
Elle est décédée le
25 avril 2014
L’Auteur : Né à Cherchell en novembre
1954, journaliste –correspondant d’El Watan, déjà
auteur d’un ouvrage sur « Yamina Oudaï, l’héroïne oubliée » (Anep,
2016)
Sommaire : Préface/ Introduction/ Zahir Ihadadène/ Lamine Bechichi/ Pierre Chaulet/ Evelyne
Lavalette/ La contribution de Z.Souissi et de O. Belhouchet à la création de la Journée mondiale de la
liberté de la presse, le 3 mai / Militantes incarcérées/Journalistes ayant
exercé avant 1954/ Journalistes ayant exercé 1954-1962/ Autres témoignages /….
Extraits : Ils (les journalistes algériens durant la guerre de libération nationale)
sont parmi les « djihadistes éclairés de la
plume » les plus percutants, au même titre que le reste des héroïnes et
des héros qui avaient su accompagner « l’essaim de plumes » dans le
combat » (p22),
Avis : Les détails de vies , d’engagements et de sacrifices qui ont fait (aussi)
l’Histoire. Car, ce sont les innombrables rivières qui font les grands fleuves.
Un véritable ouvrage d’histoire….. vécue.
Citation : « L’Histoire
constitue un gisement d’espoir » (p 25)