CULTURE- CINEMA – HANACHE TAHAR
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Ahmed Cheniki/facebook, mai
2020
Un clin d’œil à Tahar Benelhannache (1898-1972)/ Hanache,
le premier cinéaste d’Afrique
Tout
le monde avance l’idée que le premier cinéaste algérien serait Tahar Benelhannache qu’on appelait Hanache.
C’est vrai qu’Alger connut des passages importants de pionniers de l’univers
cinématographique et photographique. Déjà, les frères Lumière et Méliès y ont
été, même Griffith, l’auteur des fameux « Naissance d’une nation » et «
Intolérance ». Alger était une ville marquée et trop séduite par l’image
mouvante. Les premières salles ont été ouvertes très tôt, vers la fin et le
début du vingtième siècle à Alger, puis à Constantine, en 1909. C’est ici que
ce gosse de Constantine allait, encore enfant, fréquenter régulièrement cette
salle de cinéma. Les milieux autochtones découvraient le cinéma. Mais Hanache était plus qu’un mordu du cinéma, il ne pouvait pas
s’en passer.
Hanache commença comme figurant dans le film,
L’Atlantide, adapté du roman du même nom (1921), se mit, deux décennies après,
à tourner des films, après avoir travaillé comme opérateur ou régisseur sous la
direction de grands réalisateurs comme Jean Renoir, Julien Duvivier, Abel
Gance, Fritz Lang et bien d’autres cinéastes de renom. Il entama sa carrière de
réalisateur de documentaires et de courts métrages durant la seconde guerre
mondiale. Il est le premier producteur de cinéma. Comment a-t-il réellement
commencé sa carrière ?
Il eut fallu une rencontre fortuite en 1921 avec un technicien du film
franco-belge de Jacques Feyder, « L’Atlantide », en quête de figurants « arabes
» pour que sa passion devienne une véritable réalité. Il y interprète un jeune
gardien d’une sorte de palais dirigé par une reine qui embaume tous ses amants
captifs, une fois arrêtes, comme les deux jeunes gens, perdus en plein Sahara.
C’est le début de son expérience au cinéma, il délaisse tout pour de petits
rôles, occupe des postes de technicien et se consacre définitivement à sa
passion, malgré tous les risques. Il y est en plein dedans. C’est ainsi qu’il
va travailler dans « Yasmina » (1927) d’André Yugan,
puis dans des films de Max Rieux et bien d’autres dont « La Bandera » de Julien
Duvivier.
Tous ces petits métiers, ces petits rôles de figurant et son désir d’aller loin
allaient lui permettre d’interpréter un rôle important et d’occuper la posture
d’assistant-réalisateur dans un film de Jacques Mills, « Les sables mouvants »
en 1929. Insatiable, ambitieux, Hanache épouse les
contours d’un métier qui n’était vraisemblablement pas fait pour les
autochtones. Mais il ne se laisse pas abattre. Et ce n’est d’ailleurs pas pour
rien qu’André Hugon pour son long métrage, « Sarati
le terrible » (1937) lui fait appel pour la photographie, mais aussi à un autre
grand de la comédie, Rachid Ksentini. Était distribué
à l’époque dans ce film le grand acteur de l’époque, Harry Baur. Rachid Ksentini est merveilleux dans le rôle de
Ahmed. Le film est l’histoire d’un certain César Sarati
qui vole les dockers et tombe amoureux d’une parente Rose qui ne l’aime pas, il
finit par se suicider. Il est même opérateur dans le film de Marcel Pagnol, Le
puisatier, avec des acteurs, et quels acteurs, c’étaient les plus connus du
moment, Fernandel et Raimu.
Tout cela va le pousser à quêter une certaine autonomie, il veut être son
propre chef, c’est ce qu’il fait dans un documentaire sur Constantine en 1942 «
Constantine, l'ancienne Cirta » (en version double, arabe et française) qu’on
n’arrive pas encore à retrouver dans les archives. Ainsi, il tourne des films
(« Bataillon de choc », « Le sous-Marin », «
Casablanca ») réalisés lors de son passage à l’armée, après avoir été requis
par les Alliés.
Vite, il reprend la caméra, lui, le seul Africain à posséder à l’époque une
carte professionnelle de cinéaste. Certes, un il allait réaliser,
essentiellement, à partir de 1945, quelques documentaires (Constantine,
l’ancienne Cirta ; Aux portes du Sahara ; L’homme du Sud) et des films de
fiction (Sérénade à Meriem…). Il ne révolutionna pas le cinéma, ni ne put
subvertir le discours cinématographique colonial, en proposant un nouveau style
ou une autre manière de filmer l’Algérie et l’autochtone, mais eut la gageure
d’être le premier autochtone à exercer le métier de réalisateur.
Sa boite, Tala films, créée en 1947 se chargea de la production de
documentaires, Aux portes du Sahara ; L’homme du Sud et Constantine, l’ancienne
Cirta ; Les plongeurs du désert. Après l’indépendance, il travailla pour la
télévision algérienne.
En 1952, il réalise Les plongeurs du désert avec Himoud
Brahimi, dit Momo et Djamel Chanderli,
son neveu et élève qui deviendra un des créateurs du cinéma de la guerre de
Libération. La musique de ce film est du grand Iguerbouchene.
A l'indépendance, il rentre au pays et contribue à former les premiers
opérateurs du cinéma algérien mais la Télévision nationale le cantonnera dans
un poste de cameraman !