CULTURE- THEÂTRE -
RACHID KSENTINI
Le
rire était son terrain de prédilection et son moyen d’expression. Chansonnier
et homme de théâtre, Rachid Belakhdar, dit Rachid Ksentini, est un monstre sacré de la culture algérienne
dont le plus fort de la carrière s’est situé entre les deux guerres, soit
entre 1926 et 1944.
Dix-huit années de dur labeur, tous azimuts, portant un message verbal au
peuple algérien, un message empreint de nationalisme, de solidarité, d’union et
d’identité. Le public le comprenait aisément et le lui rendait admirablement
car, côté succès, l’ampleur et l’engouement ne seront jamais égalés de son
temps. Cet artiste, qui a marqué de son empreinte la première moitié du XXe
siècle, a été comédien, auteur, compositeur, humoriste et interprète. Il
fut homme-orchestre et figure de proue dans la vie socio-culturelle
de notre pays et ce, jusqu’à nos jours. Né le 11 novembre 1887 à la Casbah, au
cours de son enfance, Rachid Ksentini effectue une
scolarité studieuse à l’école coranique, sous la direction du maître Mohamed El
Blidi, située à Zenqète Bouakacha, à la Casbah d’Alger, et très jeune, il décide de
se lancer dans la vie socio-professionnelle. Il
quitte très tôt l’école pour travailler comme apprenti ébéniste auprès de son
père à Bab El Oued jusqu’à 1914. Après un
apprentissage d’ébéniste à 27 ans, il va tenter d’élargir son champ de
connaissances.
À la veille de la première guerre mondiale, il s’engage dans la marine
marchande, curieux de nature et fin mélomane, il écoutera attentivement toutes
sortes de musique. Le bateau où il embarque est torpillé par les forces navales
allemandes. Les rescapés ont été repêchés par la marine anglaise qui les transfèrent ensuite à Marseille. De par son métier de
matelot, il connut l’Europe, l’Amérique du Nord, la Chine et l’Inde.
De l’opéra jusqu’aux airs folkloriques et populaires locaux
Il apprend à gratter, en amateur, sur les cordes d’une guitare qu’il avait
achetée sans aucune prétention. À ce moment-là, il ne savait pas qu’un génie
campait dans sa personne. Dans la marine marchande, il connaitra beaucoup de
pays ainsi que leurs musiques. De toute évidence, c’est une aventure qui va le
mener à travers tous les continents : l’Europe, l’Amérique, en passant par la
Chine et qui va durer douze années. Il revient en Algérie mais pour un bref
séjour. Il repart ensuite en France ; la dernière étape fut Paris, où il exerça
comme employé aux Galeries Lafayette. C’est au cours de cette période qu’il
aiguise ses dons d’artiste dans de petits rôles de figuration, dans le monde du
spectacle parisien. En 1925, il décide de revenir définitivement à Alger. Ce
retour lui sera profitable, car il y trouve une véritable activité artistique,
notamment théâtrale et musicale qui s’échafaudera autour de Sellali
Ali dit Allalou (1902-1992) qui lui propose
d’intégrer sa troupe théâtrale Ezzahia avec Mahieddine Bachtarzi (1897-1986).
Ce duo prestigieux a donné naissance à une floraison d’activités et d’artistes
qui connaitront plus tard un succès immense. Fort de son expérience, en plus du
talent indéniable de comédien, c’est Allalou qui lui
donnera sa première chance, un certain 12 avril 1926, sur la scène du Kursal d’Alger (salle démolie en 1928).
Leur collaboration se traduit entre autres par la présentation de la pièce Zaouadj Bouaklin le 26 octobre
1926 qui marque la première apparition de Rachid Ksentini
sur les planches. Une prestation qui a subjugué le public. La collaboration des
deux hommes se poursuit avec des adaptions par Allalou
des séquences "des Mille et une nuits" où Rachid Ksentini
obtient les premiers rôles. En 1927, il créé avec Djelloul
Bachdjerrah, la troupe El Djazaïr
dissoute peu de temps après.
Certes, Rachid Ksentini s’est imposé surtout dans le
théâtre, mais, il s’est investi en parallèle dans la chanson humoristique à
fond social. Nombreuses de ses chansons sont composées de musiques tirées du
patrimoine national. Rachid Ksentini meurt à Alger le 4 août 1944. Il était marié à
Marguerite Sevigné. Le
couple divorce peu avant la mort de l'artiste