ECONOMIE- ETUDES ET ANALYSES- SITUATION ALGERIE 2020- RAPPORT BM
© Compte
rendu Meziane Rabhi/Liberté, dimanche 3 mai 2020
“Sans l’adoption de nouvelles mesures, les réserves seraient
ramenées à 24,2 milliards de dollars, soit environ 6,1 mois d’importations
à fin 2020”, estime la Bm.
L’Algérie
doit faire face à un choc provoqué à la fois par une baisse de moitié des prix
du pétrole, une crise de santé publique et les conséquences des bouleversements
économiques à l’échelle mondiale à la suite de l’épidémie de Covid-19, relève la Banque mondiale dans son rapport de
suivi de la situation économique de l’Algérie. Selon l’institution financière
internationale, à 30 dollars le baril de pétrole en 2020, les recettes
budgétaires totales diminueraient de 21,2%. Malgré la réduction des
investissements publics (-9,7%) et de la consommation publique (-1,6%) prévue
par la loi de finances pour 2020, le déficit budgétaire augmenterait pour
s’établir à 16,3% du produit intérieur brut (PIB).
Parallèlement,
la baisse importante des recettes d’exportation (-51%) entraînera un creusement
du déficit commercial qui s’élèverait à 18,2% du PIB et une détérioration du
déficit du compte courant qui atteindrait le niveau record de 18,8% du PIB en
2020, malgré les mesures prises pour limiter les importations et circonscrire
les effets de la faible demande intérieure.
“Sans
l’adoption de nouvelles mesures, les réserves seraient ramenées à 24,2
milliards de dollars, soit environ 6,1 mois d’importations à fin 2020”, estime
la Banque mondiale, dont les prévisions tablent sur une contraction de 3% du
PIB cette année.
Ce qui
correspond à un recul de la consommation et de l’investissement privés, ainsi
qu’à la chute des investissements publics, qui représentent 44% de la totalité
des investissements.
Aggravation des déficits
Le rapport indique que les mesures visant à endiguer la crise de Covid-19 comme la restriction des déplacements et des
rassemblements, auxquelles s’ajoutent les fortes incertitudes économiques,
décourageront la consommation et l’investissement privés. Pour l’institution de
Bretton Woods, les
possibilités de réduction de la pauvreté qu’offre l’économie sont limitées, sur
fond de croissance par habitant négative et de chômage chronique. Le taux de
chômage s’est stabilisé à 11,4% en mai 2019, relève le rapport. Il est plus
élevé parmi les femmes et les jeunes (20,4 % et 26,9 %, respectivement).
Mais le taux
de chômage pourrait grimper cette année, en raison de la cessation d’activité
de plusieurs entreprises, notamment dans le secteur du BTPH. L’inflation
augmenterait pour s’établir à 4% en 2020, prévoit la Banque mondiale. “La
rupture des approvisionnements en provenance de Chine et d’Europe en raison de
l’épidémie de Covid-19, qui représentent plus de 80 %
des importations algériennes, pourrait entraîner des retards et faire grimper
les prix des importations”, explique-t-elle.
“L’ampleur et
la progression rapide des déficits budgétaire et courant exigent une action
urgente, car la dette publique augmente, les réserves devraient s’épuiser en
2021 et des engagements hors bilan sont imminents”, estime l’institution
financière internationale. Selon cette dernière, la dette pourrait augmenter à
56,2% du PIB en 2020, puis à 67,1% du PIB en 2021, pour atteindre 75,7% du PIB
en 2022.
Des mesures de court terme
Pour la Banque mondiale, “les mesures passées et présentes prises par les
pouvoirs publics pour tenter de régler la question du double déficit, dont les
restrictions des importations ou le financement monétaire, constituent des
solutions à court terme qui devraient être complétées par des réformes visant à
remédier aux faiblesses structurelles de l’économie”. Elle estime que la
dépréciation du taux de change pourrait apporter une nouvelle bouffée
d’oxygène. “Le collectif budgétaire attendu pour 2020 devrait être aligné sur
les priorités du gouvernement et s’attaquer à la crise actuelle”, indique le
rapport.
Certes, le
retard apporté au rééquilibrage des finances publiques augmente le risque d’un
ajustement plus marqué par la suite, mais, souligne la Banque mondiale, des
réductions importantes de l’investissement pourraient asphyxier la croissance
hors hydrocarbures. Dans le même temps, relève le rapport, “les passifs
éventuels de plus en plus importants des banques publiques ayant accordé des
engagements à des entreprises publiques en difficulté ne feront que multiplier
les risques budgétaires”.
Par ailleurs,
les efforts visant à stimuler l’investissement privé, comme l’abrogation de la
règle 51/49 pour les secteurs non stratégiques, seront entravés par des
incertitudes nationales et mondiales. Quoi qu’il en soit, à moyen terme,
souligne le rapport, “il sera essentiel d’améliorer sensiblement le climat des
affaires pour promouvoir l’investissement privé, en encourageant la
diversification tout en renforçant la résilience et en stimulant la
croissance”.