CULTURE- MUSIQUE- MERIEM
FEKKAI
© Sihem
Oubraham/El Moudjahi, jeudi
30 avril 2019
Meriem Fekkaï, chanteuse algéroise née à Alger en
1889, est issue d'une famille originaire de Biskra. Elle pratiquait un genre
musical algérois «le M’saam'aâ», typiquement
féminin et inspiré de la Maâlema Yamna.
Cette dernière est la muse de Meriem Fekkaï. Elle lui
a apporté un plus dans la composition de son ensemble artistique constitué à
partir de 1935. Meriem Fekkaï a introduit une forme
de prestation musicale et dansée tout à fait nouvelle. Jusque-là, les Cheikhate ne s’occupaient pas de la partie ballet
traditionnel. L’artiste commence sa carrière assez tard, mais rencontre
un très grand succès. Elle joue du hawzi, de la
musique arabo-andalouse, met en musique de nombreux poèmes du répertoire
algérien. Meriem Fekkaï avait un penchant pour
les fêtes familiales et les mariages. Il est vrai qu’elle débuta sa
carrière en qualité de danseuse à l’occasion des cérémonies familiales, mais
également en intermède des spectacles organisés par Mahieddine
Bachtarzi, notamment à partir de 1928, période au
cours de laquelle il présidait aux destinées de la Société Musicale El Motribiya. Elle a figuré sur un plateau artistique
grandiose, le samedi 24 août 1929 à Alger, aux côtés de Mahieddine,
Sassi et Chabha, une grande
chanteuse kabyle de l’époque. Meriem Fekkaï s’affirma
réellement comme une artiste complète. A ses talents de chanteuse, s’ajoutent
ceux de danseuse traditionnelle, agile, élégante d’une beauté incomparable.
Elle charma son public et les organisateurs. Une étoile est née,
qu’il fallait compter avec elle. En 1935, la chanteuse constitue un ensemble
artistique nouveau, composé de cheikhate, avec une
performance nouvelle. Elle a apporté un plus dans la composition de cet
ensemble en introduisant une forme de prestation musicale et dansée inédite. A
l’époque, outre Meriem Fekkaï, Yamna
et Tetma, il y avait également Fettouma
El Blidiya, Cheikha Zahia, Leila Fatah (L. Mouti) Soltana Daoud (Reinette l’Oranaise) et Zohra El Fassia. Pour les Cheikhs genre m’dih,
que l’on n’appelait pas encore Chaâbi, il y avait
cheikh Abderrahmane El-Meddah, cheikh Mustapha Driouch, cheikh Mamad Benoubia, Reghaî Abderrahmane dit
cheikh Saîdi, cheikh Mahmoud Zaouch,
cheikh EI-Hadj M’hamed El-Anka
et son maître cheikh Nador (Mustapha Saîdi) qui était
déjà décédé en 1926, pour ne citer qu’eux. Pour la musique andalouse,
l’activité était intense également avec la suprématie de la société El-Motribiya, la société El-Andaloussia
au sein de laquelle figuraient Mohamed Fakhardji, El Djazaîria, El-Ghernatia, El Mossilia. Moyennement instruite, elle compensait ce
handicap par sa grandeur d’âme et son comportement social. Sa maison était le
lieu de rencontre de beaucoup d’artistes. Aimable et très accueillante, elle
fut aidée par son entourage familial et plus particulièrement par son mari, Si
Abdelkrim Belsenane, qui ne ménagea aucun effort pour
son épanouissement artistique. Ils vécurent une quarantaine d’années ensemble
sans laisser d’enfants. Meriem Fekkaï choisissait sa
clientèle parmi les familles bourgeoises d’un niveau social élevé ; son
programme, de ce fait, ne désemplissait jamais durant les étés, en après-midi (dhella) ou en soirée (sahra). Son
programme de chants était composé de poésies du genre aroubi
et hawzi, des morceaux légers (nqlébète)
du classique andalou. Elle donnait leur chance à toutes les belles voix qui
l’entouraient. Elle avait, pendant une longue période, permis à Fadila Dziria d’interpréter tous
les Istikhbarate, préludes aux chants qu’elle
programmait pour son ensemble à l’occasion de toutes ses prestations.
Ses succès étaient en grande partie ceux de Yamna ou
de Tetma, car puisés dans le patrimoine hawzi tlemcénien ou aroubi algérois. Meriem Fekkaï se
démarque malgré tout des autres, par l’interprétation à l’unisson de la
quasi-totalité des chants. Le Dakhli Msammaî «Rana Djinek»,
chant de bienvenue à la mariée, reste son chef-d’œuvre avec «El qelbbete Sali» et «Mene houa Rohi
ou Raheti» du poète tlemcénien
Ibn Msaîeb. Meriem Fekkaï
sortait rarement en dehors d’Alger, sauf pour des visites amicales ou
familiales à Tlemcen, ou encore à Miliana pour l’Aîd
El-Adha. C’était une cinéphile très avertie qui ne
ratait jamais son après-midi cinéma et les premières de films qu’on projetait à
Alger. L’artiste décède le 18
juillet 1961.