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COMMUNICATION- ETUDES ET ANALYSES-
TELEVISION- CAMERAS CACHEES RAMADAN 2020
Caméras cachées et feuilletons du
ramadhan : Sus au kitsch crétinisant et violent
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El Watan, samedi 2 mai 2020
Le père des enfants
de la télé algérien, le regretté Hadj Rahim, doit se retourner dans sa tombe.
Sa fameuse caméra invisible, qui était censée être un divertissement ramadhanesque, est devenue indigeste et synonyme de
clochardisation, violence, médiocrité, de caricature de la société. Chacun y va
de sa «fetwa» cathodique. Puisque la caméra cachée
«Ana ou Radjli», diffusée par Numidia
TV, offrait… une femme, une épouse, telle une marchandise, une chose.
Si l’on effectue un zapping des
caméras cachées passant sur les chaînes de télévision, on sera désagréablement
surpris par l’amateurisme, la facilité et l’absence de qualité. Et surtout, ce
qui est franchement désolant, c’est cette image réductrice qu’on donne du
citoyen, de l’artiste, du sportif, du passant anonyme de la rue…On joue sur la
corde sensible de l’invité, du piégé. On lui plante le décor d’une situation
d’injustice, une victimisation. Et l’ingénu cède et fonce tête baissée. Perdant
son self-control et son sang-froid, il devient violent.Parce
qu’il voudrait faire comprendre que c’est mal ce qu’on constate-là. Et vous
avez, des piégés de la caméra cachée Hkamnakoum gaa sur Echourrouk TV comme
Barracuda (à ne pas confondre avec l’acteur d’Oran, un homonyme) qui tape sur
un réalisateur tunisien au comportement infect et condescendant envers l’équipe
de tournage, le chanteur Amine TGV, furax, lance violemment un cadenas à cause
d’une histoire d’obscure «vaudou», charlatanisme, toujours sur Echourrouk. Un champion de kick-boxing,
Amir, provoqué et incité à commettre l’irréparable, dans la caméra cachée Rana Hkamnek sur Ennahar TV.Une femme, comme
présent, offert gracieusement dans la caméra cachée intitulée Ana ou Radjli (moi et mon époux), à un jeune homme célibataire
dépassé par ces drôles et incroyables événements. Depuis, cette scandaleuse et
honteuse caméra cachée a été retirée de la grille de programmation de Numidia TV.
SITUATION HUMILIANTE
L’ARAV (l’Autorité de régulation de
l’audiovisuel), à l’issue de cette bévue, a réagi en lui infligeait un
avertissement. C’est là où l’on s’interroge. Comment peut-on tolérer et laisser
passer une telle énormité dépréciant l’humain, la femme, en l’avilissant. Là,
encore une fois, l’ARAV est interpellée à propos de la teneur des programmes
des chaînes de télévision.Il faudrait que cette
instance audiovisuelle soit plus ferme face à ses situations humiliantes,
dégradantes et faisant l’apologie ordinaire de la violence dans un prime-time
familial. Il faudrait que ces accès de colère noire, cette violence gratuite,
ces crachats, oui, des crachats, ces scènes de pugilat collectif, ces thèmes
obscurantistes soit bannis. En fait, cette haine qu’on cultive et entretient
sans motif et mobile apparent doit cesser. Le téléspectateur algérien, il faut
tout simplement le respecter et ne pas insulter son père intelligence. Il ne
mérite pas ce kitsh crétinisant.
LA LEÇON N’A PAS SUFFI
Pour rappel, la leçon n’a pas suffi. En
juin 2017, le grand écrivain algérien, Rachid Boudjedra,
l’auteur de La Répudiation, L’Escargot entêté ou encore Le FIS de la haine,
avait été humilié, séquestré, oui séquestré et désigné à la vindicte populaire
lors d’une caméra cachée de la chaîne Ennahar TV.
Rachid Boudjedra avait halluciné. Séquestré, harcelé
de toutes parts, subissant une insupportable pression, on lui fera répéter à
plusieurs reprises la «chahada» – attestation,
témoignage, la profession de foi de l’islam, dont elle constitue le premier des
cinq piliers, elle est directement liée au principe de l’unicité de Dieu (tawhid). On s’adressera à Rachid Boudjedra
comme si c’était un enfant qui ânonne. Devant un père fouettard orwélien.Et ce, non sans un certain «sadisme». Car les
auteurs de cette «prise d’otage» riaient. Le pire, c’est que techniquement
cette caméra cachée est montée : «On veut savoir, ô monsieur Boudjedra, tu es musulman ou athée ?» Cela relève de
l’intolérance et de l’obscurantisme. Une «fetwa»
cathodique tout comme celle de cette proposition indécente: offrir une femme
comme cadeau. Où va le monde ? C’est là où doit intervenir l’ARAV (l’Autorité
de régulation de l’audiovisuelle), au niveau de la vulgarisation des valeurs
humaines en ce mois sacré du ramadan, tout en respectant cette instance
télévisuelle.
«BABOR ELLOUH», LE GRAND
ABSENT
Le Ramadhan de cette année a vu son
fameux prime-time des différentes chaînes de télévisions algériennes en pâtir.
La pandémie du coronavirus, les exigences drastiques du confinement sanitaire
et les mesures de prévention ont complètement chamboulé le contenu cathodique.La plaie coronavirus a pris de court les
concepteurs, les producteurs et réalisateurs de séries diffusées lors du mois
sacré du ramadhan. Habitués à boucler un feuilleton en quatre ou cinq mois,
l’impondérable Covid-19 a perturbé les tournages en
chantiers. Au regard des conditions de travail sur un plateau, la concentration
humaine, techniciens, comédiens, figurants, équipe logistique…Le risque était
énorme. Il y va de la vie d’humains. Donc, réduire les effectifs, élaguer de pans du scénario prévu, opérer des «coupes
sombres», annuler des séquences car impossibles à réaliser dans des endroits où
structures soumises au confinement et désertés par les humains. On ne peut pas
raconter une histoire dans une ville fantôme. A moins que l’on évoque la
vacuité et l’ampleur du coronavirus.Le premier à
subir les effets ou les «méfaits» du coronavirus est le très attendu feuilleton
Babor Ellouh du réalisateur
tunisien Nasreddine Shili.
Il n’est autre que celui qui a triomphé au ramadan 2019 avec Ouled El Hallal mettant en vedette les talentueux et
crédibles, acteurs Abdelkader Djriou et Youcef Sehairi. Victime
collatérale, l’équipe du feuilleton Babor Ellouh, le vendredi 24 avril, a posté ceci sur son compte Facebook : «Cher honorable public, nous sommes désolés de
vous annoncer que le feuilleton Babor Ellouh ne sera pas diffusé lors du mois du Ramadhan (2020)
et nous vous informons que sa diffusion est prévue au mois de septembre (2020) inch’Allah. Ramadan Kareem» (bon
ramadan).
LE THÈME RÉCURRENT DES
HARRAGA
Au casting de Babor
Ellouh figure presque la majorité des comédiens de la
série à succès d’Ouled El Halla.
On peut citer Abdelkader Djriou, Mohamed Khessani, Souhila Maalem, Ahmed Benaissa, Mostefa Laribi, Yasmine Amari, Nacer Soudani…Ainsi
que de nouveaux visages. Babor Ellouh
traitant du phénomène et l’actualité brûlante de la détresse et drame des
immigrants algériens, les harraga, n’est pas le seul
à reporter sa diffusion. Chez nos voisins, en Tunisie, la tant attendue Harga, réalisé par El Assaad El Weslati, prévu au mois du Ramadhan 2020, verra la reprise
du tournage en mai et sa diffusion juste après. Même en Egypte, le réalisateur
Omar Abdelazziz a exhorté ses collègues à agir de la
sorte, après l’Aïd El Fitr. Le thème récurrent
abordé, semble celui est celui des «harragas» (ces
jeunes immigrants).A l’image de la série Ahwal Nass produit, scénarisé, interprété par Réda City 16 et
réalisé par Haroun Latlet. Parmi les comédiens y
jouant figurent Malika Belbey, Hachmaoui
Fadéla, Aziz Boukrouni, Imen Nawal, Mouny Boualem ou encore Abdelkader Djriou.
Une histoire portant sur des petites gens. Une mère non-voyante, un
universitaire devenu éboueur pour survivre, «largué» par sa fiancée pour des
raisons matérialistes, une sœur à marier, l’indigence, le chômage, une
insupportable pression et le désespoir. La planche de salut, c’est le «babor» (l’embarcation), la fuite, la «harga»
comme horizon.
«YEMMA», CETTE MER DE
LARMES
Sur Djazaïria
One, on passe en prime-time le feuilleton «Yemma» du réalisateur
tunisien Madih Belaïd. Il
n’est autre que l’auteur de la série El Khawa (les
frères). Le scénario est écrit par Sofiane Dahmani.
La série Yemma compte une vingtaine d’épisodes d’une
durée de 35mn. Les comédiens y jouant, Mohamed Reghis,
Lydia Larini, Mohamed Frimehdi,
Mounia Benfeghoul, Meroua Bouchoucha. Il s’agit d’un drame humain. Cela commence par
une berceuse en kabyle.Khaled campé par Mohamed Reghis découvre tardivement qu’il est un enfant adoptif.
Alors, il se lance dans une quête de vérité, initiatique. Un flash-back
révélant bien des zones d’ombre. Ce sont des thèmes récurrents qui s’articulent
autour du feuilleton en général en Algérie, le milieu carcéral, l’amour sacré
de la mère ou c’est la malédiction, l’opposition des gens heureux et
malheureux, les riches et les pauvres, les familles recomposées, la trahison,
la cupidité et l’intégrité, le bien contre le mal. Et puis des larmes.
L’INJUSTICE COMMISE À
«MAKIOUS ET DAKIOUS»
Sur la chaîne publique EPTV, on a
dépoussiéré le feuilleton Zenkat Lahbal
avec la regrettée et grande dame de théâtre, Sonia. Une histoire se passant
dans un institut d’arts. Pour d’autres contingences, la saison lll de la série Dakious et Makyous avec Nabil Asli, pourtant
tournée et bouclée et techniquement bien développée, avant l’apparition de la
pandémie du Coronavirus, a été purement censurée, à la trappe. Pourquoi ? On la
juge trop politique, trop proche de la réalité. Celle de la «isaba» (le gang) sous l’ère du président Bouteflika.