CULTURE- PATRIMOINE- MOSQUEE-
SIDI ABDERRAHMANE AT THAALIBI (ALGER)
Sidi Abderrahmane ben Mohamed ben Makhlouf
At-Thaalibi (de son vrai
nom Ibn Zeïd Ibn Makhlouf
Abderrahmane Et Thaâlibi – de la tribu des Thaâlba), saint patron de la ville d’Alger, né en 1384 dans
le village thaälba situé sur la rive des Issers, en Kabylie, est un penseur et théologien musulman
d’Afrique du Nord. Il côtoya les plus grands docteurs de son temps commeAbi Zeyd el Waghlissi, Abu Kassam el Mashdalî, Abi Kassem el Boughzalî, Mohamed ibn Khalf el Oubay, durant ses nombreux voyages d’études en Orient avant
de revenir s’installer en 1414 à Alger, où on lui confia la magistrature (Cadi)
suprême de la ville.
Fondateur de l’école Thaalibiya, où
divers enseignements étaient prodigués (histoire, littérature, soufisme,
doctrines, interprétation…), Sidi Abderrahmane, auteur de plus de 90 ouvrages,
a notamment écrit Les bons joyaux dans l’interprétation, Les lumières
éclairantes dans l’union de la Loi et de la Vérité, Les jardins des Saints, Des
vérités sur le soufisme, Les nobles sciences dans l’observation des états de
l’autre monde
Il a commencé ses études au village des Béni Henni, Lakhdaria actuellement, avant de se rendre à Béjaïa, très jeune, pour y poursuivre ses études. Il fut
également élève de Abderrahmane El-Weghlissi
(théologien reconnu originaire des At Waghlis en Kabylie )
Béjaïa était au début du xve
siècle un centre religieux et un lieu de rayonnement du soufisme. De là, il
s’est rendu à Tunis avant de rallier l’Égypte pour étude. Il est également allé
en Turquie et en Syrie et a accompli son pèlerinage aux lieux saints de
l’islam.
Il fait ses études à Bejaia et s’y établit en 1399 à l’âge de seize ans. Il se
rend en 1406 à Tunis, puis au Caire en 1414. Il entreprend de faire le
pèlerinage à la Mecque en 1416 ; revient au pays en repassant par l’Égypte puis
par la Tunisie.
Il décède en mars 1471 et est enterré au cimetière des “Thaalba”
à Alger à l’endroit où se trouve son mausolée.
Il laissa quatre fils (Mohammed Kebir, Mohammed Seghir, Mohammed Abi Al Salihîne et Yahia) et quatre
filles (Fatima, Rouqiya, Mahdjouba
et Aïcha).
Avec ses multiples visages, la zaouia de Sidi
Abderrahmane El Thaalibi fut particulièrement prisée
par les écrivains, les poètes et les peintres occidentaux. Isabelle Eberhardt,
Eugène Fromentin, tant d’autres, la considéraient comme le plus bel endroit
d’Alger et venaient y chercher la paix. Auparavant, les gravures anciennes, et
les œuvres naïves de l’art populaire avaient diffusé l’image de ses bâtiments
colorés. Elle abrite depuis 1471 la Kouba (« mausolée
») de Sidi Abderrahmane, lettré philosophe et théologien, auteur de savants
commentaires du Coran et d’une règle en vers pour la confrérie religieuse qu’il
fonda. Selon la légende rapportée par Pierre Boyer, ce pédagogue était capable
de faire la classe à mille garçons le matin et à mille filles le soir.
C’est dans la qoubbâ de la gracieuse
mosquée à l’architecture maghrébine, qu’il fut inhumé en 1471. La mosquée
construite en 1696, sur l’emplacement de son tombeau, fut flanquée d’un haut
minaret carré, reconnaissable de très loin, à sa quadruple
rangée d’arcatures encadrées de bandeaux de faïences de Perse et de
Rhodes. Il se dresse au-dessus d’une petite construction ornée d’un auvent de
bois de cèdre, et la juxtaposition de ces deux architectures agrémentées de
verdure fournit le sujet des centaines de tableaux. Un très haut palmier porté
par un tronc grêle et incliné plante une sorte d’aigrette un peu plus loin.
Dans le cimetière jouxtant la Kouba (coupole), fut
inhumé aussi Sidi Ouali Dada, venu d’Orient et qui,
selon la légende, souleva les navires de Charles Quint, grâce à un coup de
bâton dans les flots de la mer. Selon la légende, la tempête fut déclenchée par
Ouali Dada et Sidi Betka,
qui se mirent à battre la mer avec des bâtons, et Sidi Bougdour,
qui frappa sur des pots et des marmites.
Dans ce sanctuaire, élevé extra-muros de l’ancienne médina vers la fin du xviie siècle, trônent aussi le tombeau à petite qoubbâ de Lala Aïcha (petite-fille de Sidi Abderrahmane),
les tombes d’autres personnalités de haut rang de l’époque ottomane tels Khedeur Pacha (1605), Youcef
Pacha (1687), Ali Khodja, avant-dernier dey d’Alger
(1818), Ahmed Bey de Constantine (1848), ainsi que d’autres figures illustres
comme Mohamed Bencheneb(1869-1929), Abdelhalim Ben Smaya ou
l’illustre miniaturiste enlumineur, Mohamed Racim
(1896-1975). La medersa construite dans un style néo-mauresque en 1904 par
l’administration coloniale jouxte le mausolée qui, initialement, était érigé,
lui, intra-muros de la médina d’Alger.
Au xixe siècle, l’ensemble se trouvait encore à
l’extérieur des remparts d’Edzayer (vieil Alger),
vers le bas de la cité, séparé d’un mur d’enceinte par un étroit chemin, dont
il fallait gravir la forte pente en gradins pour pénétrer par la porte
principale ornée de zelliges et de claustras.
Il existerait un autre mausolée à son honneur dans la ville de
Cherchell.
L’édifice
L’édifice actuel, remplaçant une construction plus ancienne qui
depuis 1611 abritait le tombeau du marabout a été bâti en 1696, sous le dey
El-Hadj-Ahmed (qui régna de 1695 à 1698) puis transformé à nouveau en 1729 à
l’époque d’Abdi-Pacha (Kourd Abdi, dey d’Alger de
1724 à 1732). Depuis 2005 la rénovation de l’édifice et des dépendances a été
entamée pour prendre fin en 2009. Il se compose d’une mosquée, avec un gracieux
minaret à étages de colonnettes, où brillent des revêtements de faïences de
diverses couleurs, d’une koubba dont les murs sont recouverts de faïences et
d’ex-voto, renfermant le tombeau du saint, surmonté d’un tabout
(chasse de bois sculpté et doré ornée de nombreux étendards de soie) et
quelques autres tombes, et de divers locaux à l’usage de l’oukil
(gardien) et de son personnel.
La mosquée est entourée d’autres tombeaux où reposent plusieurs
personnages fameux:
-Ouali Dada qui, d’après la légende,
déchaîna la tempête qui anéantit la flotte de Charles-Quint,
le marabout Sidi-Mansour ben Mohamed ben Salim, mort en 1644 et qui reposa
jusqu’en 1846 auprès d’un platane sur la place de la Jénina,
avant d’être déplacé sur ordre de l’autorité militaire. Lors du transfert, les
honneurs furent rendus par un détachement de zouaves qui escorta le convoi
jusqu’à la mosquée. Le platane fut abattu en 1853 pour cause de maladie et les
indigènes furent convaincus que l’arbre n’avait pu survivre au déplacement du
tombeau de Sidi-Mansour,
-Ahmed, le dernier bey de Constantine,
-Sidi Abd-Allah,
-Youcef Pacha (pacha d’Alger de 1634 à
1637),
-Le dey El-Hadj-Ahmed (“Ahmed le Pèlerin”), Hassan Pacha (pacha
d’Alger de 1791 à 1798, année où il meurt de la gangrène) et sa fille, la
princesse Rosa, Sidi Ouada, le dernier architecte de
la mosquée, où une inscription rappelle que les derniers travaux de
construction du monument ont été réalisés en 1730 sous la direction de l’oukil Sidi Ouada et du Pacha
Abdi.
L’architecture de cette mosquée intègre les deux styles byzantin
et maghrébin, de façon harmonieuse et équilibrée. La mosquée Sidi Abderrahmane
est très populaire, son état général est cependant désolant ; seule une
restauration générale peut lui rendre son lustre d’antan. Cet ensemble fut
repris de nombreuses fois par les peintres orientalistes sur leurs subjectiles
au regard de sa position géographique et du symbole qu’il représentait pour les
notables d’Alger notamment lors des fêtes religieuses. Auguste Renoir a peint
ce chemin bordé de plantes folles, comme l’avait fait quelques années avant lui
le lyonnais Saint-Cyr Giriest.
Une cérémonie connue sous le nom de Mawloudyate
dont l’origine remonte au xviie siècle, consiste en
la récitation de poèmes religieux chantés dans le style des mouachahate
a lieu le jour du Mawled Ennabaoui Echarif, la fête du
Mouloud. Les poèmes religieux, interprétés lors de cette célébration, remontent
au xviie siècle et étaient composés par les muftis
d’Alger.
Sidi Abderrahmane repose dans une salle sépulcrale, dont on a pu
dire qu’elle était plus un boudoir qu’une mosquée, les jours où les femmes
viennent y demander la protection du Saint. La magnifique châsse de bois
multicolores de confréries religieuses, les nombreux lustres qui pendent de la
coupole, dont des croyants exaucés, les étoffes précieuses et les ex-voto
composent un décor chatoyant. Le vestibule d’entrée et les murs qui entourent
le mausolée, en particulier son minaret, sont décorés de précieuses céramiques
persanes et de versets du Coran. Paul Leroy, très sensible à la beauté de la
faïence islamique dont il collectionnait les pièces anciennes, les prit à
plusieurs reprises pour accessoires de ses tableaux.
L’un des minarets les plus souvent
représentés par les peintres se cache au cœur de la Casbah d’Alger, au
carrefour de la rue du Palmier et de la rue Kleber, dans ce quartier où Eugène
Fromentin voyait comme le dernier refuge de la vie arabe. Ce gracieux petit
minaret à pans coupés creusés d’arcatures, surmonté d’une frise de carreaux de
faïence et de merlons blancs. Écrasée par les vieilles demeures d’une ruelle
sombre, la mosquée abrite le tombeau Sidi Mohammed Cherif, que les femmes
implorent pour devenir mères.