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Essai Said Sadi- "Révolution du 22 février: Un miracle Algérien"

Date de création: 22-04-2020 18:16
Dernière mise à jour: 22-04-2020 18:16
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VIE POLITIQUE – BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- ESSAI SAID SADI- « REVOLUTION DU 22 FEVRIER.UN MIRACLE ALGERIEN

Révolution du 22 février. Un miracle Algérien. Recueil d’articles de Said Sadi. Editions Frantz Fanon, Tizi Ouzou, 2019 , 252 pages, 900 dinars

Ce n’est pas un essai au sens classique du terme, mais tout un recueil de contributions  de presse, d’entretiens  et de conférences (en Algérie et à l’étranger) s’étalant du 13 février 2019 au 15 octobre 2019. Donc, suivant de près, de très près l’évolution du Hirak. Pas tout le Hirak mais une assez bonne partie….surtout celle qui a connu le plus de tensions, d’interrogations, d’espoirs et, aussi, de désillusions (celles-ci venues par la suite).En tant qu’homme politique, bien que n’étant plus que simple militant du parti qu’il avait fondé, il participe ….aux marches, tout particulièrement au tout début ( à trois dans la capitale)  , et, surtout au débat général et public sur les sources et les raisons de la « Révolution du 22 février » , son déroulement, sur les problématiques soulevées, ainsi que sur son devenir (celui de la Révolution …pas le sien .N’affirme-t-il pas  que « l’ancienne génération doit s’effacer. Même la mienne doit savoir se rendre utile sans avoir de prétentions à l’exercice du pouvoir » ).

Ce qui est absolument certain, c’est que notre bonhomme n’a pas changé d’un iota….au niveau du discours cela s’entend. Un discours que l’on sent émerveillé par le nouveau miracle algérien ; une « révolte » populaire pacifique mais décidée. Un « miracle » qui , dit-il ,et on le croit, va marquer son temps. Un miracle national de surcroît car s’étendant partout à travers le pays. Enfin ! Car on sent qu’encore chez lui demeure la souffrance des « échecs » des luttes menées lors du « Printemps berbère » (1980) et après les « événements d’Octobre 88 » et qui ont coûté tant et tant de vies. Une souffrance encore plus grande lorsque sont évoqués les multiples « détournements » et les dérapages tragiques passés de la Révolution algérienne durant la fin des années 50 (dont l’assassinat de Abane Ramdane par ses compagnons d’armes), et au début des années 60 (avec une Constitution « prostituée  dans un cinéma » pour emprunter à Ferhat Abbas).

Des idées maîtresses (des « idées fixes » ?)  récurrentes….. celles du militant de la politique et de la berbérité. Une obsession, celle du politicien au long cours qui connaît bien le système.  Un traumatisme, celui du militant ayant connu les « coups tordus », la répression et l’emprisonnement , parcourent les écrits. Trois principales :

L’anti-militarisme (avec une « tête de turc », le chef d’état-major de l’époque), la nécessité de « transformer la mobilisation populaire en rapport de force politique » donc de l’ « organisation » du mouvement afin d’éviter que la lutte ne soit récupérée (« La mise en forme de l’insurrection citoyenne devient maintenant une urgente nécessité » ,p 116, 28 avril 2019… « Les  manifestations des mardis (étudiants) et vendredis( population) ….doivent se maintenir et se renforcer mais auxquelles il urge de donner une visibilité et une lisibilité légitimes et crédibles », p 200, 31 août 2019), et l’appel aux moyens de lutte pacifiques certes mais originaux comme les actions de  désobéissance civile (« elles sont le contraire de l’action violente » , p 180, Conférence Ottawa, 21 juillet 2019)  et des grèves générales (« qui ne sont pas des grèves illimitées », p 180)

 

L’Auteur : Né en août 1947 à Aghribs….Médecin psychiatre, membre fondateur de la Ladh, à l’origine de la création de la première section d’Amnesty International en Algérie, plusieurs fois emprisonné (car très tôt engagé dans le combat pour la réhabilitation de l’identité amazighe et la défense des droits humains) , fondateur (en février 1989) du Rcd qu’il dirigera jusqu’en mars 2012. Deux fois candidat à l’élection présidentielle, élu deux fois député de la Capitale  à l’Apn..... Auteur de plusieurs ouvrages ( huit dont un, une biographie,  sur « Chérif Khaddam… »  en 2015 et un premier, « Askuti » en 1983…..puis en 2016 en amazigh)

Sommaire : Avant-propos/ Articles et /ou textes (31). Et, beaucoup de notes explicatives – très utiles- en bas de pages…..de l’éditeur. Original, non ?

Extraits « A force de museler la parole et de soumettre les consciences, le système algérien a fini par user les énergies les plus vigoureuses et éroder les intelligences les plus aiguisées. Jouant de la culpabilité post-coloniale, il s’est acheté le silence universel » (p 12), « Le pays est déserté par la conviction et le dévouement .L’engagement n’est consenti que s’il est suivi par un retour sur investissement rapide et vénal. L’Histoire longue est abolie » (p 19), « Ce n’est pas à l’armée de porter des jugements sur le peuple ou d’en être fier mais au peuple d’être fier de son armée ; faut-il encore qu’elle le mérite » (p 47), « En fait , l’architecture administrative algérienne a été plus dictée par le complexe du colonisé ; soucieux de ressembler au maître, que par la nécessité de créer un Etat selon l’histoire, le vécu et les besoins des populations » (p 92), « L’appel du peuple est simple : « Système dégage ».Et si le dégagisme n’est pas une solution ; en la circonstance, il en est un postulat » (p 100), « Soulagée des interférences toxiques moyen-orientales, la révolution algérienne a plus de chance d’arriver à bon port et constituer un exemple vertueux pour le processus de démocratisation du sous-continent africain » (p 236)

 Avis : Ouvrage dédié à Lakhdar Bouregâa et à Samira Messouci et « à toutes celles et ceux qui ont osé la dignité ». Un ton et un style qui n’a pas changé. Direct et fidèle à sa ligne…..Le style et le ton du discours politique peuvent apparaître un peu « vieillots » ? Surtout à la génération des « 2000 » !

 

Citations : « L’armée algérienne, pour ce qui la concerne, a pris le pouvoir en 1962 pour imposer l’islamo-socialisme comme matrice doctrinale, marécage dans lequel ont prospéré les malentendus les plus obscurs » (p 24), « Les Algériens n’ont pas gagné leur indépendance parce qu’ils disposaient d’une force supérieure à celle de l’armée française. Ils se sont libérés le jour où ils ont compris qu’il n’y avait rien à espérer de l’ordre colonial » (p 32), « Il y a des complots dans l’Histoire, mais l’Histoire n’est pas réductible à un complot » (p 60), « La justice à la carte est l’une des facettes les plus insupportables de l’injustice » (p 84), « Confondant causes et effets , le militaire d’après guerre n’a pas saisi que l’absence de liberté était génératrice de régression morale et matérielle » (p 113), « A vouloir tout avoir, on finit par déchoir » (p 125), « En soi, le débat libre et serein ne peut être que bénéfique dans un pays dans un pays où le citoyen a plus souffert de déficit de parole que d’abus d’expression autonome » (p 191) , « Revendiquer à la face du monde le droit de dire et de faire dans son pays ce que dicte sa conscience de citoyen est un droit et un devoir. L’ingérence, c’est de quémander la caution de tiers pour bâillonner son peuple en livrant la patrie à la razzia » (p 250