CULTURE-
MUSIQUE- CHEIKH NAMOUS
( photo : D. R. )
Rachidi Mohamed dit Cheikh Namous. 100 ans, doyen des artistes
algériens : Le maître incontesté du banjo vous salue bien !
©
HAMID TAHRI –EL watan, 30 JANVIER
2020 (Portrait/Extraits)
……... Aujourd’hui, il est sur le point de boucler ses 100 ans, qu’il a
traversés, cahin-caha, mais toujours la muse en bandoulière. Artiste jusqu’au
bout des ongles, il compte sûrement parmi les banjoïstes et les guembristes les plus doués que l’Algérie a enfantés.
Il l’est
toujours, même si l’emprise de l’âge déploie ses ailes lourdes et solde ses
séquelles inévitables……………………….
Fils
unique, Cheikh Namous est né à Soustara
en mai 1920 à Dar Bonita, ainsi dénommée parce que
son propriétaire, poissonnier, vendait de la bonite à la pêcherie. Namous a obtenu son certificat d’études en 1933 à l’école Sarouy. Sa famille est ensuite descendue à Zoudj Ayoune, où l’ambiance,
malgré la pauvreté, était joyeuse. «Il y avait
des artistes, des sportifs comme Bob Omar le champion de boxe qui habitait avec
nous et dont la mère, Khalti Doudja,
a vécu 108 ans.»
Virtuose du
banjo
C’est le
meilleur «bonjoïste» de tous les temps. Hadj El Anka ne s’est pas trompé. Il aura été parmi les premiers à
inclure, à travers ce virtuose, cet instrument dans son orchestre. El Hadj,
dans sa recherche de l’harmonie instrumentale absolue, s’était aperçu que les
sons du banjo et du mandole étaient faits pour s’entendre. ……………………………..Pourquoi
un gars si attachant, si agréable, a-t-il été affublé d’un tel sobriquet
? «C’est quelqu’un de mon quartier, un
certain Benyahia, parti par la suite en France, qui
m’a accolé ce surnom. Peut-être parce que j’aimais plaisanter. J’étais
virevoltant, j’étais partout. Depuis, on ne me connaît que sous ce nom…………………… Al’état civil est Mohamed Rachidi, né
le 14 mai 1920 à La Haute-Casbah. Il a quitté les bancs de l’école pour le
monde du travail. Il exerce comme livreur chez Baranès.
Les fins de journée, il les passait au café du quartier. «Et là, Mustapha Lavigerie, qui jouait fort bien de la
guitare, me disait : ‘‘Ched el mizan
y a djedek’’, et moi, tout ouïe, je m’amusais à taper
sur la table avec mes mains. Je me suis payé un guembri
à 20 F. C’est comme ça que je suis entré dans le monde de la musique», se souvient-il en évoquant les réticences de son paternel qui a
fini par s’y faire. Comme il n’était pas bien rémunéré, il quitte la livraison
pour le métier de receveur de bus au sein de la société Lambrosi. «On faisait la ligne
Alger-Béjaïa-Skikda-Constantine, puis
Batna-Biskra avec retour sur Alger par Bou Saâda. On
gagnait 20 F par jour.» La Seconde Guerre
mondiale a mis un terme à cette aventure avec la réquisition de tous les bus. Namous est recruté comme bagagiste chez Air France. Ses
économies lui permettent de se payer un banjo à 400 F. «Avec cet instrument, j’ai pu me frayer une place dans l’orchestre
de Abderrahmane Sridek, mais l’apothéose aura été
sans doute ma rencontre avec El Hadj El Anka.»
Parcours
Cheikh Namous est né le 14 mai 1920 à La Casbah où il a grandi.
Très tôt, il est attiré par la musique. Il tâte du mandole avant de devenir un
virtuose du banjo. Sa première «sortie» artistique se fera à Koléa en 1941 avec El Hadj M’hamed
El Anka. Il côtoiera les grandes figures de ce style
musical. Il accompagnera El Ankis, Dahmane El Harrachi, Guerrouabi, Ezzahi, Hacène Saïd, Laâchab… Il fera
plusieurs métiers, mais sa passion restera braquée sur la musique. Il intégrera
la radio kabyle avec cheikh Noureddine. Et lorsque ce
dernier s’orientera vers le cinéma au début des années 1960, c’est Namous qui sera chef d’orchestre de musique kabyle. A ce
titre, il verra défiler les Cherifa, Yamina, Djida,
Djamila, Taleb Rabah, Abdiche Belaïd,
Akli Yahiatène, Arab Ouzelague et bien d’autres.
A 100 ans, Namous goûte à une paisible
retraite parmi les siens. Namous est père de 14
enfants et a 84 petits-enfants. Il vit dans un modeste appartement à Diar El Djemaâ à El Harrach. Sa
demande de bénéficier d’un appartement plus spacieux datant de quatre décennies
est restée, hélas, lettre morte !