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Entretien Président A. Tebboune/Le Figaro, 20/2/2020

Date de création: 23-02-2020 10:57
Dernière mise à jour: 23-02-2020 10:57
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COMMUNICATION- GOUVERNEMENT- ENTRETIEN PRESIDENT A.TEBBOUNE/LE FIGARO,20/2/2020

 © Synthèse El Watan/ Nadjia Bouzeghrane

Dans une interview au Figaro publiée jeudi, et dont nous reproduisons des extraits, Abdelmadjid Tebboune affirme être «décidé à aller loin dans le changement radical pour rompre avec les mauvaises pratiques, moraliser la vie politique et changer de mode de gouvernance».

Sur le hirak et les manifestations qui continuent, le chef de l’Etat algérien affirme que «bien qu’il y ait encore, tous les vendredis, une présence citoyenne dans la rue, les choses commencent à s’apaiser. De nombreux Algériens ont compris qu’on ne peut pas réformer, réparer, restaurer ce qui a été détruit pendant une décennie en deux mois…»

Il estime que «le hirak a obtenu pratiquement tout ce qu’il voulait : il n’y a pas eu de 5e mandat, ni de prolongation du 4e mandat, puis le Président a démissionné. Les têtes les plus visibles de l’ancien système sont également parties, et la lutte a été engagée contre ceux qui ont mis l’économie à genoux. Restent les réformes politiques, j’en ai fait ma priorité, et je suis décidé à aller loin dans le changement radical pour rompre avec les mauvaises pratiques, moraliser la vie politique, et changer de mode de gouvernance».

Sur la revendication du hirak d’un «Etat civil, non militaire» et sur le véritable rôle de l’armée, Abdelmadjid Tebboune estime que «ce slogan date du 19 juin 1965 ! L’armée accomplit ses missions constitutionnelles, elle ne s’occupe ni de politique, ni d’investissement, ni d’économie. Elle est là pour sauvegarder l’unité nationale, protéger la Constitution et les Algériens contre toute infiltration terroriste et toute tentative de déstabilisation du pays. Vous ne trouverez aucune trace de son immixtion dans la vie du citoyen, si ce n’est lors du service national».

Sur la «mafia politico-financière» et sa neutralisation, «la corruption et l’accumulation de l’argent sale ne s’effacent pas avec du correcteur. La tête de la mafia a été coupée mais pas le corps».

«Nos maux viennent de l’importation débridée»

«L’Algérie est vue par ses partenaires comme un grand marché de consommation. Nos maux viennent de l’importation débridée, génératrice de surfacturation, une des sources de la corruption favorisée par de nombreux pays européens, où se faisait la bancarisation, la surfacturation, les investissements de l’argent transféré illicitement. Cela a tué la production nationale. Nous allons par exemple arrêter l’importation de kits automobiles. L’usine Renault qui est ici n’a rien à voir avec celle qui est installée au Maroc. Comment créer des emplois alors qu’il n’y a aucune intégration, aucune sous-traitance ?»

L’article 51 qui empêche les binationaux d’accéder aux hautes fonctions de l’Etat «va être chang黫L’immigration d’origine algérienne à l’étranger a toute sa place ici, et nous œuvrons pour qu’il n’y ait plus de séparation entre les citoyens émigrés et ceux qui sont restés au pays. Ils ont les mêmes droits et possibilités. Qu’ils soient momentanément ou définitivement à l’étranger, leur pays d’origine demeure l’Algérie, et ils y sont les bienvenus.» Un bémol toutefois. «Certains postes, ultrasensibles, qui touchent à la sécurité nationale, ne peuvent pas être ouverts à n’importe qui. C’est une pratique mondiale.»

Sur le travail de mémoire sur l’occupation coloniale française de l’Algérie que le président Macron veut entreprendre, le président Tebboune indique : «J’ai eu quelques contacts avec le président Macron, et je sais qu’il est honnête intellectuellement, qu’il n’a aucun lien avec la colonisation. Il essaye de régler ce problème qui empoisonne les relations entre nos deux pays. Parfois il est incompris, et parfois il fait l’objet d’attaques virulentes de la part de lobbies très puissants… Notre indépendance a presque 60 ans. Il est quand même bizarre que l’Algérie revienne encore dans presque toutes les actualités politiques françaises ! Et quand on en arrive à écrire une loi qui glorifie la colonisation, on est loin de ce que nous attendons.» «Nous sommes pour des relations sereines avec la France, fondées sur un respect mutuel. A un certain moment, il faut regarder la vérité en face. Un premier pas est de reconnaître ce qui a été fait, le deuxième pas est de le condamner. Il faut du courage en politique. Mais il y a un autre lobby, dont toute la politique repose sur l’endiguement de l’Algérie, et qui est présent en France. C’est un lobby, aux accointances économiques et sociales, qui a peur de l’Algérie.» Vis-à-vis de la France, «de notre côté, il n’y a pas de rancœur. Il y a des réactions aux actions de haine, de xénophobie et d’islamophobie qui se manifestent de l’autre côté. C’est ce que j’ai expliqué à M. Macron. Les Algériens ne veulent pas que l’on s’occupe de leurs affaires.»