ADMINISTRATION- WILAYATE
- RENCONTRE GOUVERNEMENT/WALIS,D.16/2/2020- ALLOCUTION A. TEBBOUNE
© Synthèse Neila Benrahal /El
Moudjahid, lundi 17 février 2020
Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a annoncé, dimanche 16 février 2020, à Alger,
l’élaboration d’une loi criminalisant le non-paiement des impôts.
Il a également
fixé un délai d'une année aux walis pour évaluer la mise en œuvre des
projets engagés. «Les premiers résultats devront être concrétisés,
dans le domaine de l’amélioration du cadre de vie des citoyens, d'ici 3 à
4 mois», a-t-il lancé aux walis lors de la rencontre gouvernement-walis, qui
s’est ouverte au Palais des nations de Club des Pins.
Une
première, lors des travaux de la réunion gouvernement-walis, tenus en présence
du président de la République, Abdelmadjid Tebboune.
Un reportage émouvant, réalisé par la direction de l’information à la
présidence et l’ENTV, sur instruction de M. Tebboune,
montrant la souffrance et la marginalisation des populations dans «les zones
d’ombre».
Des jeunes,
moins jeunes, des élèves et des habitants à l’Est, à l’Ouest et à
l’extrême Sud du pays, se plaignant de l’absence totale des commodités,
notamment l’eau potable, l’électricité, le transport scolaire, les cantines
scolaires... Ils s’exprimaient en toute franchise et sans censure et criaient
leur détresse, mettant en cause les responsables locaux.
«Ils n’ont
aucune appartenance politique. Les images résument la situation dans ces
régions d’ombre. Des citoyens qui vivent une période de l’avant-62, alors que
nous avons les moyens», a insisté le président de la République, dans son
discours, à l’occasion de l’ouverture des travaux de la réunion
gouvernement-walis. Ont assisté à cette rencontre, les membres du gouvernement,
les walis, walis délégués, élus et partenaires socioéconomiques. Dans son
discours, le chef de l’Etat a souligné les grands axes de la mise en œuvre du plan
de développement local, tout en insistant sur l’impératif de «l’amélioration du
cadre de vie des citoyens». Il a indiqué que «cette réunion est une occasion
qui réunit l'autorité de planification et l'autorité d'interface locale» pour
un objectif unique et un effort unifié afin de «prendre en charge les
aspirations des citoyens et mettre un terme à leurs souffrances, dans le cadre
d'une nouvelle ère et d’une nouvelle République, de manière à construire une
Algérie nouvelle».
Hommage au Hirak
Le président
a entamé son allocution par un hommage au mouvement populaire pacifique,
qui célèbre sa première année. «Le Hirak traduit la
volonté du peuple qui est sorti, sous la haute protection de l’ANP, revendiquer
le changement radical et rejetant toute aventure qui pouvait conduire à
l'effondrement de l'Etat national et de ses piliers pour revivre la tragédie
vécue lors des années 90». «Ce peuple a réitéré cet engagement, en toute
responsabilité en décembre dernier, à l’occasion des élections présidentielles
transparentes. Telle a été la volonté invincible du peuple, car émanant de la
volonté de Dieu», a assuré le président de la République. Le Hirak, qui a permis l'émergence de plusieurs mécanismes, à
l'instar de l'Autorité nationale indépendante des élections (ANIE), a remis
l'Algérie sur les rails de la légitimité, la préservant ainsi de
l'aventurisme», a affirmé le Président Tebboune.
« J’ai réitéré
mon engagement pour le changement radical et la satisfaction ainsi des
revendications du Hirak et nous sommes,
aujourd’hui ici, pour la mise en œuvre de ces revendications », a-t-il
poursuivi. Le président de la République a déclaré à l’assistance : «Dans ce
contexte particulier, nous sommes dans l’obligation du changement notamment au
niveau local, à travers la rupture définitivement avec les anciennes pratiques
et le rapprochement avec les citoyens afin de briser le cloisonnement créé par
le passé entre le citoyen et l'Etat pour rétablir la confiance perdue». « Cet
objectif pourra se traduire à travers l'adoption d'un nouveau mode de
gouvernance assaini de tous les vices, ambiguïtés, corruption ou
autoritarisme», et ce, dans le but de préserver le droit du citoyen et sa
dignité, a-t-il ajouté. Dans ce sens, le président de la République a évoqué
une réflexion profonde lancée, avec la participation de tous les acteurs, en
vue d'instaurer la décentralisation de la gestion locale. «Certains textes se
sont révélés aujourd'hui caducs. Ils nécessitent une adaptation à la situation
et aux défis», dit-il, précisant que le mode de gestion devra suivre et
s’adapter à l'évolution démographique. Le chef de l’Etat a, dans cet ordre
d’idées, donné plusieurs instructions aux walis. Elles concernent, entre
autres, «l’intensification des visites d’inspection notamment aux zones d’ombre».
Il a mis, en outre, en avant l’importance du contrôle populaire. «Il faut
désigner des chargés de mission, qui se déplacent en visites d’inspection. Il
faut recourir aux vidéos et filmer et dépasser les rapports écrits»,
exigera-t-il.
Pas de ligne rouge dans la révision de la Constitution,
hormis l’unité et l’identité nationales
Evoquant
la révision de la Constitution, le président de la République a indiqué qu’il a
reçu récemment le président du Comité d'experts chargé de formuler des
propositions pour la révision constitutionnelle, Ahmed Laraba. «Il m’a présenté un exposé. Je lui ai affirmé qu’il
n'existe aucune ligne rouge dans la révision constitutionnelle prévue, hormis
ce qui a trait à l'unité et à l'identité nationales», relèvera-t-il. Le chef de
l’Etat a, à cet égard, rappelé que, dès sa finalisation, la première mouture de
la révision constitutionnelle sera distribuée à tous «afin que la Constitution
soit consensuelle», estimant que «tout un chacun est en droit d'émettre un
avis, négatif ou positif» sur ce document.
La prochaine
Constitution «consacrera la séparation des pouvoirs pour définir les missions
de chacun. Cela nous permettra de rompre avec les anciennes pratiques et les
dérapages de l'autocratie» a-t-il indiqué. Cette révision intervient dans le
cadre de la «nouvelle politique que nous voulons adopter pour opérer le
changement», a-t-il dit, ajoutant : «Nous devons bâtir ensemble une démocratie
réelle et solide, non conjoncturelle et pas sur mesure. Nous empruntons
progressivement cette voie», notant que la Constitution est «la
base même de la gouvernance dans tous les systèmes».
A l’occasion, il
a évoqué la possibilité de la création d’une cour constitutionnelle
indépendante «qui examinera les conflits et les requêtes opposant les
Pouvoirs, en plus de l'actuel Conseil constitutionnel», précisant qu’à
l’instar de l’ANIE, cette juridiction sera indépendante.
Il sera procédé,
par la suite, à la révision de la loi organique relative au régime électoral,
dans le cadre d'une démarche visant à «écarter l'argent sale et les corrompus
de la politique» et permettre «l'émergence d'une nouvelle classe politique de
jeunes».
Une loi-cadre contre les faux bénéficiaires de logements
La lutte
contre la corruption sera poursuivie sur tous les plans et «avec rigueur», a
aussi assuré M. Tebboune, de même que l’abus de
fonctions. S’adressant aux walis, le Président a indiqué que la
corruption a porté préjudice à l’économie nationale et mis le citoyen face à
«la petite corruption» qui est plus dangereuse car elle touche directement le
citoyen lésé qui est en droit de bénéficier des services de l'administration et
de demander les documents dont il a besoin, sans qu'une quelconque compensation
lui soit exigée en contrepartie. Le président de la République a révélé que
16.800 certificats de résidence falsifiés ont été recensés, vendus à 1.500 DA
le document. «Il faut combattre ce phénomène. Personne n’est protégé. L’abus de
fonctions dans le but de s'enrichir est immoral, d’où l'impératif de lutter
contre ce phénomène, car nul n'a le droit d'exiger au citoyen une compensation
en contrepartie d'un service», a-t-il insisté. Dans ce sens, le Président
a annoncé la saisine du Premier ministre et du ministre de la Justice pour
l’élaboration prochaine d’une loi-cadre pour la criminalisation de tout
faussaire dans le but de bénéficier indûment d’un droit, notamment le logement.
«Il sera condamné entre 5 et 10 ans de prison ferme». Le président a
insisté sur le recours au Fichier national du logement et son assainissement.
Il a, par ailleurs, exhorté les responsables concernés à honorer leurs
engagements vis-à-vis du citoyen qui «sait pertinemment distinguer le véritable
responsable, de celui qui veut gagner du temps». Il les a appelés à adopter un discours
réel et sincère. «Il faut éviter de faire de fausses promesses et ne promettre
que ce que nous sommes réellement en mesure d'offrir aux citoyens, dont il ne
faut plus négliger et dédaigner les préoccupations», a-t-il insisté.
M. Tebboune a insisté, en outre, sur le contrôle technique des
projets, la justice sociale et la digitalisation. «Les responsables centraux et
locaux doivent lutter contre le gaspillage des dépenses publiques. Les dépenses
publiques doivent être affectées au règlement des problèmes de développement et
non pas gaspillées et utilisées pour la réfection des trottoirs tous les six
mois».
Limiter les cortèges officiels
Il a
relevé que «les trottoirs sont parfois rénovés tous les six mois, alors que le
citoyen habitant à 5 kilomètres du chef-lieu de la wilaya manque d'eau et
d'électricité», soulignant l'impératif de maîtriser et de contrôler les marchés
publics. «Le contrôle technique a fait défaut, faisant de chaque
investissement de développement local une source de gaspillage. Ce que nous
réalisons est refait trois ou six mois après, et ce en toute impunité», a-t-il
ajouté. «Les directions techniques relevant des ministères techniques seront
désormais responsables de la qualité», a indiqué le président de la République,
relevant l'impératif d'adopter «des normes permettant de développer le pays
sans gaspillage aucun, ni recours à de nouveaux travaux déja
réalisés, après quelques mois».
Aux ministres,
il dira qu’ «il faut lutter contre le gaspillage, notamment à l'occasion des
visites qui doivent devenir le slogan de la résolution des problèmes de
développement. Les visites ne sont pas synonymes d'ostentation et de festins,
nous devons éviter les cortèges composés de 20 à 30 voitures et dont seulement
trois ou quatre véhicules transportent les personnes concernées». Aussi, les
cortèges ministériels doivent «impérativement transporter les personnes
concernées seulement, et si le déplacement sur le terrain est indispensable, il
y a le transport public voire les bus», a-t-il instruit.
Vers une loi criminalisant le non-paiement des impôts
Le
président de la République a, par ailleurs, annoncé la préparation d'une loi
criminalisant le non-paiement des impôts. «Une loi criminalisant le
non-paiement des impôts est prévue, à l'instar de ce qui est en vigueur dans
plusieurs pays à travers le monde, dont les Etats-Unis où le non-paiement des
impôts est considéré comme étant un crime économique», dira-t-il. «Des hommes
d’affaires ont été classés parmi les plus riches de ce pays, alors qu'ils ne payent
pas leurs impôts, alors que le fonctionnaire, lui, s'acquitte de ses impôts par
retenue sur salaire», a-t-il relevé. «Vous savez que 1.216 milliards de dinars
constituent le montant global des dettes, en janvier 2020, des investisseurs
algériens auprès des banques», a affirmé le chef de l’Etat. «Le passé récent
tragique a provoqué une hémorragie des fonds de l'Etat, en devises et en dinar.
C'est pourquoi les citoyens s'interrogent aujourd'hui sur les méthodes à même
de garantir les financements», a-t-il précisé, déplorant le fait que «le
financement existe mais les remboursements ne sont pas effectués».
S’adressant au ministre de l’Industrie, Ferhat Aït Ali, le Président a
indiqué qu’il lui a donné des instructions «afin de mettre en place en
extrême urgence un nouveau modèle industriel pour donner un élan au secteur».
Notre économie est totalement «désarticulée sous l’effet de la fraude et de la
surfacturation», a déploré M. Tebboune, qui a
annoncé l’interdiction stricte d'importation des matières produites en Algérie.
Il a assuré que les moyens existent. «80 milliards de DA ont été
octroyés aux communes, sur deux tranches, à la fin de l'exercice écoulé et 100
milliards autres seront dégagés au mois d'avril prochain, puisés du Fonds
de solidarité du ministère de l'Intérieur», a-t-il fait savoir. «Il
suffit de les mobiliser», a-t-il dit. Il a insisté, en outre, sur le travail de
proximité et le développement de proximité. «Il faut améliorer le cadre de vie
des citoyens et garantir une justice sociale. Certains jouent avec des
milliards et ont des avions et d’autres sont marginalisés. C’est intolérable.
On ne demande pas de transformer les villages en villes, mais
d’œuvrer au développement durable des communes», a-t-il insisté.