HISTOIRE- PERSONNALITES- DJAMILA AMRANE MINNE
Il y a trois ans, le 11
février 2017, disparaissait à Alger la moudjahida Djamila Amrane, née Danièle
Minne, à l'âge d'un peu plus de 77 ans.
Djamila Amrane, née Danièle Minne, quitta
ce monde, aussi discrète dans sa mort qu'elle l'a été dans sa vie. Elle avait
émis le vœu d'être enterrée à Béjaïa, dans le carré des Amrane, où reposent
Baba Salah et Yemma Aouaouche (ses beaux-parents) Ahmed (le plus jeune de ses
beaux-frères) et d'autres membres de sa famille. Elle les a rejoints dans le
cimetière de cette ville qu'elle a tant aimée .
Née à Neuilly-sur-Seine, en France, Djamila Amrane Minne s'était établie, en
1947, à l'âge de huit ans, à Tlemcen, en compagnie de ses parents, Jacqueline
et Pierre Minne, enseignants et militants communistes. Elle y fréquenta le
collège de Slane (actuellement collège Ibn Khaldoun). Sa mère Jacqueline,
remariée en 1950 avec Abdelkader Guerroudj, après son divorce d'avec son
premier mari, est décédée en 2015 à Alger.
Djamila Amrane participa activement à la
guérilla urbaine, dès l'âge de 17 ans, à Alger où ont milité également sa mère
et son beau-père, dans l'organisation des Combattants de la Libération et au
réseau de Yacef Saadi. (Jacqueline et Abdelkader Guerroudj seront condamnés à
mort par les tribunaux de la colonisation). Djamila fut affectée ensuite à
l'organisation sanitaire de la wilaya 3. Elle fut arrêtée en 1957, au cours
d'un accrochage durant lequel fut tuée la « chahida » Raymonde Peschard », nous
précise notre interlocuteur, comme pour souligner que les Algériens ne doivent
jamais oublier la dette que notre pays a contractée à l'encontre de ces êtres
d'exception.
Après l'indépendance de l'Algérie, Djamila Amrane mena une brillante carrière
universitaire à Alger. Menacée durant la sanglante décennie noire des années
1990, elle ira un temps enseigner à l'université de Toulouse. Elle consacra sa
thèse de troisième cycle à «L'emploi à Béjaïa» et celle de son doctorat d'Etat
à un sujet qui lui tenait à cœur, «Les femmes dans la révolution algérienne»,
une étude qu'elle publia, par la suite, sous forme de deux gros ouvrages de
référence ».
Le docteur Triki se souvient avec émotion que « l'ambulance qui transportait le
corps sans vie de Djamila Amrane, d'Alger vers Béjaïa pour y être enterré, fit
une halte inopinée à Ighzer Amokrane où les autorités locales tinrent à lui
rendre un dernier hommage, pendant qu'une vieille moudjahida de la localité,
qui avait combattu auprès de la défunte pendant la Guerre de libération, vint
recouvrir son cercueil de l'emblème national .
La cérémonie de l'enterrement fut des plus simples. Après la traditionnelle
prière d'adieu, effectuée à la mosquée de Sidi Soufi, une sobre oraison funèbre
fut prononcée au cimetière Sidi Abderrrahmane, par le responsable des anciens
moudjahidines de la région. L'émotion était intense. Une foule dense (où
étaient présents l'époux de la défunte, leur fils, son frère ainsi que son
beau-père - le toujours fringant Djilali Abdelkader Guerroudj, âgé aujourd'hui
de 92 ans - mais également tous ses amis et des centaines de personnes anonymes
qui voulaient lui rendre hommage) l'accompagna à sa dernière demeure .