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Peinture- Mohamed Racim

Date de création: 26-01-2020 19:40
Dernière mise à jour: 26-01-2020 19:40
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CULTURE- ARTS PLASTIQUES – PEINTURE- MOHAMED RACIM

Mohamed Racim, issu d’une famille d’origine turque, est né le 24 juin 1896 à La Casbah d’Alger.  Son grand père Saïd faisait du négoce d’objets précieux tels la porcelaine chinoise et les tapis d’Orient, du fait que le fils Ali a hérité de nombreuses pièces de grande valeur : tapis persans, bibelots de Turquie et de Chine, broderies précieuses, livres et manuscrits. On s’aperçoit ainsi que la famille Racim vivait dans un milieu où le bon goût était d’usage. Tous ces objets de valeur ont été éparpillés à travers des personnalités influentes pouvant agir en faveur de Omar lors de son incarcération. Le grand-père Ali Racim était marié à Baya Boursas, issue d’une famille de commerçants et propriétaires à La Casbah. Il eut six enfants, deux garçons et quatre filles. Mohamed est le cadet gâté par son oncle paternel. Il manifestait très tôt un caractère difficile, indépendant et curieux. Le père Ali et Mohamed l’oncle étaient des artisans réputés pour la qualité de leurs œuvres. Ils réalisaient des appliques de bois sculpté, des coffres rehaussés de feuilles d’or à la vénitienne et colorés avec une finesse et raffinement, tout en respectant le savoir-faire ancien hérité de l’Orient et influencé par la Chine et Venise.

Ils y réalisaient aussi des tableaux composés de versets du Coran calligraphiés encadrés de frises d’arabesques.Il faut savoir que leur atelier était un lieu où se réunissaient les bourgeois lettrés d’Alger pour débattre des événements conjoncturels du début du XXe siècle. Le sujet essentiel en ce temps là portait sur la Nahda du fait de la venue à Alger, en 1903, du Cheikh Abdou qui a été recu avec une grande déférence dans le milileu algérois, notamment lors de sa visite à l’atelier des frères Racim. Habituellement, les sujets constamment traités en ce lieu étaient axés sur l’âge d’or de l’islam. On y citait Al Farabi, Ibn Rochd et d’autres eminents érudits. On parlait aussi d’alchimie et de la pierre philosophale, et bien sûr des événements secouant le monde musulman, sans oublier la musique en citant Ziriab et d’autres musiciens qui ont su perpétuer cette musique savante.

Mohamed, qui a fait ses premières classes à la Rampe Valée, a vécu dans un milieu d’artistes, où la transmission s’est faite presque machinalement. Son père Ali, son oncle Mohamed et Omar son frère aîné tenaient à La Casbah un atelier d’enluminure et de sculpture sur bois qui étaient très prisés par les amateurs et surtout les collectionneurs. C’est dans ces lieux discrets mais magiques que Mohamed allait, au fil des jours, s’affirmer comme un redoutble artiste sûr de son art. Bon sang ne saurait mentir puisqu’il deviendra en peu de temps le maître incontesté de sa spécialité, la miniature. A seulement 14 ans, le certificat d’études en poche, et repéré par l’inspecteur des Arts indigenes Prosper Ricard, il intègre le cabinet de dessin de l’enseignement professionnel où ses qualités se métamorphosent. C’est là qu’il fit la connaissance d’un illustre peintre plasticien dont la renommée a depassé nos frontières. J’ai nommé Etienne Dinet Nasreddine venu se documenter pour le livre qu’il s’apprêtait à rédiger : la vie de Mahomet dont l’illustration fut confiée à Mohamed en 1916.

Le livre fut édité chez Piazza qui ne manquera pas de confier d’autres décorations de plusieurs livres à Mohamed, qui finit par quitter le cabinet de dessin dans lequel il activa durant 14 ans sans discontinuer, de 1910 à 1924. C’est alors la grande aventure qui lui permit de côtoyer les plus illustres des peintres à Paris et il eut pour mission de procéder à la décoration de l’inégalable Mille et Une Nuits. Il ira en Espagne pour s’enquérir des merveilles de l’Andalousie et son art musulman à Cordoue et Grenade avec leurs mosquées, leurs palais féeriques et leurs luxuriants jardins. C’était aussi le fief idéal pour l’art de la miniature qui était une incontournable source d’inspiration.Puis, ce fut une succession de voyages qui sont autant de découvertes au Caire, à Rome, à Vienne, à Bucarest et à Stokholm où se forgea son idylle.

Ses expositions à travers les grandes métropoles constituent toujours un événement grandiose. Et ce n’est que le résultat d’une consécration méritée qu’il reçoit en 1933 le grand prix artistique de l’Algérie. Son empreinte se voit aussi dans l’enseignement qu’il rejoint en 1934 à l’École des beaux-arts d’Alger où il initie les jeunes à la miniature. Au journaliste de Compagnons qui lui demandait le secret de sa réussite le 11 octobre 1941, Mohamed avec son flegme légendaire répondit : «La minutie des miniatures est chose véritablement difficile et ardue.

Pour les réaliser, il faut des mois, parfois même des années. Il faut travailler avec la loupe ou avec des lunettes grossissantes et les yeux se fatiguent vite. Il faut doser l’effort, se reposer, reprendre cent fois la tâche en ajoutant chaque fois un petit détail au tout.» Puis d’ajouter : «Chaque fois que je fais une exposition, les visiteurs curieux me demandent le temps que j’ai mis à réaliser telle ou telle miniature ; ils s’attardent à découvrir les minuscules personnages, comme si tout l’art du miniaturiste résidait dans la durée du travail ou dans l’infiniment petit.» Mais où est donc la technique ? La réponse du maître est aussi cinglante que prompte : «Une miniature, explique-t-il, se prépare de longue date.

On fait des recherches après avoir choisi le sujet. Ensuite, c’est l’étude de l’ébauche. Puis le coloriage et obtenir des couleurs aussi pures que possible.Enfin, doser la gomme, l’or en poudre, car c’est l’or qui donne aux miniatures tant de relief, tant de richesse.» Mohamed Racim a laissé un beau trésor à travers lequel il entrevoyait l’effondrement d’un monde marqué de délicatesse et de charme, où le mendiant était digne, le riche humble, le savant modeste, le guerrier clément. Il percevait à travers les travaux qu’il côtoyait dans l’atelier de son père où dans les musées le reflet d’une société empreinte de hauts sentiments.