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Entretien Président/Médias nationaux (II/II)

Date de création: 26-01-2020 19:19
Dernière mise à jour: 26-01-2020 19:19
Lu: 1123 fois


COMMUNICATION- OPINIONS ET POINTS DE VUE- ENTREVUE PRESIDENT/MEDIAS NATIONAUX (II/II)

Question: Le citoyen attend un changement radical au plan économique et commercial, qu'en est-il de la valeur du dinar, des salaires, du pouvoir
d'achat, de l'emploi, du logement et de l'importation des véhicules de moins de 3 ans?

Réponse: Je commence par la valeur du dinar. Les précédentes réponses sont liées. Plus la valeur de la monnaie locale baisse, plus l'importation s'impose. La meilleure mesure pour réévaluer le dinar est la croissance économique et la production locale. Si, à titre d'exemple, nous importons la pomme de terre pour que son prix sur le marché n'excède pas 40 ou 45 DA/kg, la solution est donc la production nationale et la réduction de l'importation inutile.
A ce propos, j'insiste encore une fois que je ne réduirai pas l'importation pour priver le citoyen algérien. L'importation doit être complémentaire à la production nationale. Si la production nationale pourvoit 25 % aux besoins du citoyen, j'importerai les 75 %. Et si l'économie nationale pourvoit aux besoins à 80 %, il m'est interdit d'importer plus de 20 %. Dans ce cas, j'aurai servi d'autres intérêts que ceux du peuple algérien.
Le dinars a été affecté par le recours au financement non conventionnel, il existe un chiffre inquiétant mais nous saurons y faire face. Plusieurs failles sont à l'origine de la dépréciation du dinars, l'importation doit être complémentaire à la production nationale, le règle est d'encourager la production nationale. Je le répète devant vous de manière solennellement, nous sommes prêts à donner des instructions aux banques afin d'aider toute personne qui investit dans le développement ou la transformation de la production nationale en leur accordant des crédits pouvant atteindre 90% de la valeur du projet, en sus de la priorité en ce qui concerne le foncier industriel. J'ai cité, à titre d'exemple, N'gaous, Mascara et Médéa qui, au-delà du fait d'être des régions disposant de potentiels agricoles, sont également qualifiées pour l'industrie manufacturière. En cas de difficultés
à exporter le produit brut, la transformation peut être la solution.
Le dinars connait à présent un frémissement et nous avons même une légère stabilité des réserves de changes, nous espérons la voir consolider à la fin de ce trimestre.
Concernant l'importation de véhicules, personnellement je ne vois aucun inconvénient, mais cela exige une organisation. Nous devons savoir ce que nous importons et nous devons avoir la garantie quant à la qualité du véhicule et la régularité de la carte grise. Il y a la crainte d'être face à un autre type de fraude, il existe des lobbies et des groupes mafieux en tous lieux. Je n'accuse personne mais j'ai la responsabilité de la vie du citoyen.
Si des garanties techniques sont données pour la protection du citoyen, la porte est ouverte soit à travers l'importation de manière individuelle ou collective. Je laisse cette question aux ministère du Commerce et de l'Industrie.
La situation financière n'est pas critique mais j'irais pas jusqu'à dire qu'elle est normale, comme cela à été le cas les deux dernières années, il y'a une certaine amélioration. Les recettes fiscales augmentent et il y aura d'autres mesures. Dans ce sens, je voudrais ouvrir une parenthèse au sujet de certaines taxes prévues dans la loi des Finances 2020, pour dire qu'elles seront révisées pour une meilleure équité. Une loi pourrait intervenir dans les cinq ou six mois à venir loin de toute démagogie.
L'exonération fiscale n'entraine pas une inflation ou une érosion supplémentaire du budget de l'Etat. Je me suis engagé, et dès qu'on arrivera à la loi de Finances complémentaire (LFC), il y aura exonération de tous les salaires de moins de 30.000 DA dans le but d'augmenter le pouvoir d'achat tout en contrôlant les prix des produits essentiels.
Il pourrait même y avoir une révision minutieuse et réfléchie du Salaire minimum garanti (SMIG) car nous rejetons par principe, partant de notre religion et de nos valeurs la pauvreté extrême en Algérie. Nous mobiliserons tous les moyens disponibles pour la lutte contre la pauvreté et l'inéquité en terme de revenus individuels.
L'exonération des salaires de moins de 30.000 DA coûtera quelque 90 mds DA, un montant que nous pourrons récupérer sur les salaires de 2000 et 3000 mds.
En somme, la fiscalité ordinaire ne dépasse pas 30%, tandis que la fiscalité pétrolière s'élève à 63% du budget de l'Etat. Le principe d'augmentation du pouvoir d'achat est irréversible, et cette démarche se fera à travers l'exhonération des faibles salaires et le contrôle des prix du marché. L'augmentation du prix du lait à 45 DA relève de la trahison nationale. 

Question: Concernant la question du gaz de schiste qui a suscité un tollé, allons nous explorer cette ressource, attendre ou abandonner carrément cette option?

Réponse: Le débat sur cette question doit se faire dans la sérénité et par les experts loin de toutes les crispations et instrumentalisation politique. Il y eu une réaction négative de la part des citoyens de Ain Salah, qui ont été surpris par les torches sans aucunes explications préalables. Notre première expérience a été une erreur, nous avons un vaste
désert mais nous sommes allés dans une région peuplée. Nous allons évaluer calmement les expériences mais il faut que toutes les franges du peuple sachent qu'il s'agit d'une richesse dont Allah, Tout Puissant, nous a gratifié et je ne vois pas pourquoi s'en priver et que son exploitation de cette ressource est à même d'améliorer le niveau de vie. L'exploitation du gaz de schiste nécessite d'abord un débat national et pas une opinion unilatérale. Il s'agit d'une richesse Aujourd'hui, nous consommons 43% de notre production gazière et avec le nombre de logements en cours de réalisation et les projets d'approvisionnement des populations en gaz dans les zones montagneuses et rurales, notre consommation augmentera à plus de 60% à court et à moyen termes. Nous sommes un Etat producteur de gaz plus que de pétrole, c'est un fait qui s'impose de lui même. Notre pays est deuxième ou troisième en réserves mondiales de gaz de schiste et nous n'exportons ni produits agricoles ni industriels.
L'opportunité de l'exploitation du schiste nous est offerte, nous avons par exemple la région de Chenachen, entre Tindouf et Adrar, qui est une zone aride et non peuplée. Nous aborderons cette question lorsque nous aurons surmonter la situation actuelle et entrerons dans l'édification et le financement de l'économie. Personnellement, je ne comprends pas pourquoi certains refusent l'exploitation du gaz de schiste et préfèrent recourir à l'endettement extérieur. Pourquoi? Le débat est long et complexe, nous le laisserons d'abord aux spécialistes avant la décision politique, qui viendra au moment opportun.

Question: Qu'en est-il de la réforme du système éducatif ?

Réponse: Je pense que tous les Algériens revendiquent le changement radical du système éducatif, particulièrement du cycle primaire. Je m'oppose catégoriquement à l'implication de l'idéologie dans l'enseignement primaire. La citoyenneté exige l'édification d'une génération imprégnée des valeurs du nationalisme, de la morale et de l'appartenance civilisationnelle.
Les programmes scolaires doivent impérativement être alléger en veillant à l'apprentissage graduel et en laissant l'enfant vivre son enfance de manière naturelle et équilibrée. De même qu'il est impératif de traiter le problème de la surcharge du cartable à travers le recours aux moyens technologiques et la formation des enseignants en la matière.
Nous devons tirer profit des expériences des pays avancés. Il existe actuellement des problèmes n'ayant aucun rapport à la scolarité et je m'engage à résoudre les problèmes sociaux des enseignants qui ne devront pas utiliser les élèves comme moyen de pression car les grèves répétées ne servent pas l'intérêt de l'élève.
Une révision de l'encadrement de l'enseignement, tous cycles confondus, s'impose, et ce à travers l'amélioration des programmes et de la situation financière des enseignants, en sus de la prise en charge des élèves des régions enclavées en terme de transport et de restauration. De sanctions sévères seront prévues pour tout manquement dans ce sens.

Question: quels sont les mesures que vous comptez prendre pour le développement des médias?

Réponse: J'ai promis la liberté absolue de la presse à la condition du respect des lois de la République et l'éthique professionnelle, nous combattrons fermement le mensonge et la diffamation. Concernant les journalistes, il faut prendre en charge leur situation sociale, sachant qu'il existe dans les médias privés des journalistes qui perçoivent de maigres salaires et ne bénéficient d'aucune couverture sociale. Je m'engage à lutter contre ce phénomène, qu'il soit dans le privé ou le public.
Il existe en Algérie quelque 160 titres, dont certains ont réussi à s'imposer et d'autres tentent d'émerger. Il y a aussi des journaux à faible tirage et pareil pour les chaînes privées, qui ont des biens alors que leurs employés sont dans des situations critiques. Je m'engage à ne pas faire de distinction entre journalistes du public et du privé, tout en leur offrant des cycles de formation.
J'aiderai cette corporation autant que possible et encouragerai la création de clubs de journalistes dans toutes les wilayas du pays. A ce propos, j'exhorte les journalistes à se réunir dans un syndicat propre.
Concernant les institutions du secteur, à l'instar de l'Autorité de régulation de l'audiovisuel (ARAV), nous ferons en sorte de relancer son rôle avant la fin de l'année et j'ai demandé, dans ce sens, à son directeur d'ntreprendre des visites à des instances similaires dans d'autres pays pour tirer profit de leurs expériences.

Question: Quelles sont les mesures juridiques que vous comptez prendre pour la récupération des deniers publics détournés vers l'étranger et l'extradition des recherchés par la justice algérienne?


Réponse: Pour ce qui est de la récupération des fonds détournés, nous sommes dans l'attente du feu vert de la justice, qui n'a pas encore statué sur tous les dossiers et établi les montants détournés. Les fonds détournés se trouvent à l'intérieur du pays ainsi que dans d'autres endroits, comme Genève ou dissimulés dans des pays réputés pour leurs facilitations fiscales. Une fois ces dossiers définitivement clos par la justice, nous allons entamer les procédures nécessaires, soit par le biais d'avocats algériens ou étrangers, ou par l'activation des conventions conclues avec ces pays. Ces fonds seront indubitablement récupérés et ça se fera par le biais de la Justice.
Il y a eu certes détournement de fonds mais également des surfacturations. La lutte contre la corruption, et je l'ai déjà assuré, se poursuivra sans relâche. Nous lutterons également contre la corruption affectant le pouvoir d'achat du citoyen. Si la première affecte le Trésor, la deuxième touche à la poche du citoyen, et c'est bien plus grave, en se rendant à l'Administration, le simple citoyen est contraint de payer en contrepartie de prestations qui lui sont garanties par l'Etat. Il est impératif dans ce sens d'oeuvrer à la moralisation de la société car en l'absence de morale tout se disloque même au sein de la famille.
Les mesures de lutte contre la corruption peuvent aller jusqu'à l'installation de caméras de surveillance partout, à l'instar des services des Douanes, des commissariats de police et des communes. Ce sont là des exemples, l'important étant de se diriger vers une véritable lutte et prévention contre la corruption et les pots de vin.

Question: Quelle est votre conception pour le traitement du phénomène de la Harga (migration clandestine par la mer) ?

Réponse: J'ai eu à lire des rapports sur la migration clandestine et ses causes, et celles-ci peuvent être différentes. Lorsque ce phénomène est lié à la pauvreté et au ras-le-bol politique, il peut être traité, mais lorsque l'origine est l'oppression familiale et sociale, le problème est tout autre. Le phénomène de la Harga ne résulte pas forcément de la pauvreté, puisque il y a des médecins et des fonctionnaires qui émigrent illégalement. Il faut mener des campagnes de sensibilisation en associant les familles. Le jeune fraichement diplômé qui est confronté au chômage est en droit de s'indigner, c'est pourquoi il est impératif de trouver des solutions à ce problème en consacrant l'égalité en matière d'accès à l'emploi pour tous les Algériens.
De nombreux jeunes migrants ont été refoulés et à ce propos j'ai demandé récemment au Président du Conseil italien que l'application des lois de son pays à nos migrants clandestins soit dans le respect de leur dignité. Parmi les solutions qui peuvent être apportées au phénomène de Harga, la signature de conventions avec certains pays pour permettre à des jeunes de constater de visu à quel point la situation est difficile dans ces pays, mais il est également possible de recourir à des psychologues en ce sens
qu'il s'agit d'un problème grave nécessitant un traitement particulier.

Question: La communauté nationale établie à l'étranger figure parmi vos priorités et votre première décision a été de permettre le rapatriement, à titre gracieux, des dépouilles d'Algériens décédés à l'étranger. D'autre part, comment peut-on, selon vous, bénéficier des compétences algériennes à l'étranger?

Réponse: Je suis déterminé à oeuvrer pour permettre à l'Algérie de tirer profit de ses compétences établies à l'étranger, là où elles se trouvent.
Dans ce cadre, j'ai contacté le Professeur Habba qui m'a fait part de sa disposition à recevoir et orienter des jeunes stagiaires et d'intégrer le programme d'encouragement des start-up.
Des membres de notre communauté se sont sentis exclus suite à la promulgation d'un article de loi les privant de certains postes. Nous nous attelons à la révision de la Constitution, et exception faite des aspects ayant trait à la sécurité de l'Etat, rien n'empêche de revoir d'autres articles. Néanmoins, des pays pionniers en matière de démocratie ont exclu les binationaux par souci de préservation de la sécurité nationale. Les conclusions des débats sur la Constitution seront soumis au référendum.

Question: Sur le plan international, nous avons constaté récemment un retour en force de la diplomatie algérienne, notamment dans le dossier libyen. Vous avez proposé lors de la Conférence de Berlin d'abriter le dialogue interlibyen, cette proposition a-t-elle été favorablement accueillie?

Réponse: Il y'a eu globalement un consensus sur la proposition de l'Algérie, qui est un pays connu pour son équidistance. L'Algérie a une bonne expérience dans la conduite des médiations et elle en a fait profité plusieurs pays sans aucun autre objectif que la préservation de la paix et de la sécurité. C'est pour nous une tradition depuis 1962, nous agissons pour l'apaisement des tensions entre les peuples et les pays.

Des personnalités libyennes, dont MM. Fayez El-Serraj et Khaled Al-Mechri, ont fait des déclarations encourageantes pour le rôle de l'Algérie dans le règlement de la crise libyenne à travers le dialogue. Nous avons donc la confiance des deux parties en plus de la majorité des tribus du Sud de Misrata, de Zentan et des Touaregs qui ont toutes sollicité la médiation de l'Algérie.
En outre, le ministre français des Affaires étrangères a admis que l'Algérie était une force d'équilibre et de paix, et aujourd'hui les pays voisins de la Libye se rencontrent à Alger avec la participation du ministre allemand des Affaires étrangères qui leur fera part des conclusions de la Conférence de Berlin sur la crise libyenne. 

Question: Que pensez-vous de la situation économique mondiale et son impact sur l'économie nationale qui enregistre des transferts sociaux considérables?

Réponse: Le Fonds Monétaire International (FMI) prévoit une reprise de l'économie mondiale fin 2020. Pour l'Algérie, la Banque mondiale et le FMI parlent d'un taux de croissance de 2%, mais ça restent des prévisions. Je suis confiant, que l'Algérie réalisera un taux plus important car la croissance dans un pays comme le notre peut être plus rapide. Nous allons éradiquer le chômage à travers la mise en place de mécanismes susceptibles de créer la croissance et la richesse.
Concernant les transferts sociaux, je tiens à réaffirmer que des acquis nationaux dans ce domaine comme le soutien des produits de base, ne seront pas touchés en consécration de la Déclaration du 1er Novembre, particulièrement le principe de l'Etat démocratique et social. Les transferts sont actuellement équilibrés mais le problème qui se pose
concerne le financement, notamment des retraites.
Pour les mécanismes de subvention, il est impératif de revoir le ciblage des catégories ouvrant droits aux aides de l'Etat, soit 35% de la population. Pour le moment, ce débat est prématuré et il faut étudier les expériences d'autres pays en la matière.

Question: Quelle est votre vision de l'avenir des relations avec la France, pays avec lequel l'Agérie a des relations complexes?

Réponse: En effet, il y a eu une crispation dans les relations, notamment après que les Algériens aient constaté une ingérence dans leurs affaires
internes suite à la déclaration de la partie française au début du Hirak.
Désormais, l'Algérie avec sa nouvelle génération et direction n'acceptera aucune immixtion ou tutelle quelconque. L'Algérie n'est pas une chasse gardée de la France. C'est un Etat libre qui décide seul de son avenir.
Nous Algériens, du simple citoyen au grand responsable, sommes jaloux de notre souveraineté nationale, surtout quand les tentatives d'ingérence émanent de l'ancien colonisateur. Il faut qu'il y ait un respect mutuel entre les deux parties. Il existe en France un lobby qui a de la rancoeur pour l'Algérie, qui sait bien défendre ses intérêts, sa dignité et sa souveraineté.
Pour ce qui de l'Afrique, la République arabe sahraouie est membre fondateur de l'Union africaine (UA) et la question sahraouie relève de la décolonisation.

Question: Monsieur le Président nous vous remercions d'avoir honoré votre engagement à travers cette belle et courageuse initiative qui permettra d'éclairer l'opinion publique sur ce qui est envisagé pour le traitement de plusieurs problèmes dont souffre l'Algérie. Une opinion publique longtemps ballotée entre fausses informations, sources anonymes et fuites suspectes.
De même que nous vous remercions pour cette initiative, entamée par la création du poste de porte parole officiel de la présidence de la République, souhaitant avoir d'autres rencontres avec vous pour mieux informer le citoyen.

                              
Réponse: Je vous remercie tous d'avoir accepté cette invitation, vous avez été les premiers et il y aura d'autres car nous tenons à consacrer cette tradition. Je continuerai à communiquer avec les citoyens via les médias nationaux, c'est là, un principe et un engagement, et la crédibilité passe par le respect des engagements.
Pour moi, les médias sont un partenaire essentiel. Vous êtes des faiseurs d'opinion et nous sommes des décideurs, et ensemble nous mènerons, plaise à Dieu, l'Algérie à bon port.
En sus de ces rencontres, le porte-parole officiel de la Présidence est là pour répondre à vos questions quotidiennement, et même si l'information officielle n'est pas communiquée par le biais de l'agence Algérie Presse Service (APS), elle le sera par le biais du porte-parole, et ce dans le but de barrer la route à toute tentative malveillante.