CULTURE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- NOUVELLES HAKIM LAÂLAM-
« L’HOMME-CARREFOUR.... »
L’HOMME–CARREFOUR ET AUTRES HISTOIRES D’UN PAYS IMPOSSIBLE. Nouvellesde Hakim Laâlam. Editions Frantz Fanon, Tizi
Ouzou 2019, 198 pages, 600 dinars
En neuf nouvelles, l’auteur, fin observateur de la société dont il
est très proche (chroniqueur de talent ....., d’abord à la radio puis au
« Soir d’Algérie ») a fait le tour de la question ô combien cruciale
de l’ « homo-algerianus », qu’il soit
simple citoyen, cadre ou dirigeant. Bien sûr , comme tout journaliste du réel
voulant capter l’attention du lecteur (normalement une qualité
« obsessionnelle » chez tout journaliste qui se respecte....et qui
respecte son outil de travail et le public......ce qui n’est pas généralement
le cas chez beaucoup de ses confrères , hélas), il le fait avec son style
désormais bien connu (il n’a qu’à voir les titres de ses ouvrages).......chargé
d’humour mais assez caustique sans être méchant....On sent même qu’il est
malheureux, quelque part, de constater
des situations déplorables. Sans s’avouer vaincu...car cela fait si longtemps
qu’il mène le combat contre l’ignorance, l’intolérance et la bêtise humaine. Il
l’a même payé assez cher, pour cela, en
étant « limogé » de la radio où il y excellait .
Donc, neuf nouvelles graves, humoristiques, presque toujours
lucides, donnant une forme et un contenu
au « drame » algérien...un drame devenu, au fil du temps,
inintelligible à force de contradictions et rendant presque impossible la
compréhension de la « Dezedizie »
(comprendre l’Algérie) .Il est vrai que cela ne date pas d’-aujourd’hui :
il n’a jamais existé dans le monde de bon « algerionologue ».
Neuf nouvelles donc, faisant le portrait de simples gens , de maîtres des lieux et la description, en toile de fond,
d’atmosphère d’une désolation entraînant
la Algériens dans le gouffre du non-sens.
Le sommaire : Le marabout/ L’homme-carrefour /L’amour aveugle
/Le porte-bonheur /La ceinture/ Le Prix/ La dictature du moins (note :
comprendre -) et les Maîtres obscurs de la Soustraction/L’immeuble des
inutilités /Le crypto-tendinite ou complot rhumatoïde.
Des titres empruntant bien plus à la presse, correspondant assez
bien au style du journaliste-chroniqueur mais, en fait, correspondant surtout à
des contenus assez graves correspondant très bien au style et à l’engagement du
nouvel ...écrivain. Bienvenue dans monde de la (new) littérature
algérienne ....de langue française !Traducteurs,
à vos méninges.
L’Auteur : Journaliste
né en 1962. Après un passage à la radio publique « Chaîne III »,il est devenu journaliste chroniqueur dans le quotidien
« Le Soir d’Algérie ».Ecrivain , déjà auteur de plusieurs
ouvrages : « Le nez et la perte », « Enseignes en
folie », « Pousse avec eux » et « Rue sombre au 144
bis »
Extraits : « Les
gens oubliés aux carrefours de la ville pouvaient tout simplement être
rappelés......tous les errants et les épaves des carrefours pouvaient tomber en
dénuement total, voire friser la clochardise, mais il y avait une chose, un
objet dont ils ne pouvaient se séparer,
encore moins ne pas en être dotés : le téléphone mobile !Un outil utile. Incontournable. Vital même. (p 31),
« Le carrefour n’est qu’un carrefour. Un moment de vie. Sinon à quoi
bon ?Ce qui m’aide à tenir, ce qui me pousse à attendre ainsi, c’est le signal. Il finira
par venir. Alors oui ! Je suis heureux, parce que j’ai un objectif, je
poursuis un but » (p 41), « Les femmes peuvent avoir des jambes. Les
autres femmes avaient le droit d’avoir des jambes. Et juste des jambes. Affaf avait les jambes » (pp 59-60), « Lui
était véhiculé. Il avait une voiture. Il était passé de l’autre côté du
trottoir. Du bon côté, celui des gagnants, des conquérants, de ceux qui avaient
le pouvoir d’accélérer le cours de leur vie, de dépasser les limites, de
s’aventurer plus loin que cet îlot... »(p 83),
« Ils dressaient de lui le portrait d’un sage. Le Roi des sages. Le sage
suprême que les autres sages , les sages subalternes,
les sages intermédiaires, les sages stagiaires venaient voir pour boire ses
paroles sensées et s’abreuver de ses conseils clairvoyants et en propager les
bienfaits apaisants dans leurs pays , et partout dans le monde » (p 119)
Avis :Pour de bonnes nouvelles
, ce sont de bonnes nouvelles !Il y a en a même qui flirtent (plus que ça !) avec le
grand art de l’écriture et de la pensée. A vous de les découvrir. Il faut
seulement tout lire. Mais attention ! Plaisir de
rire ou de sourire mais risque ......de pleurer en découvrant le ridicule de situations....tuantes
Citations : « Tous les
papas ont été à un moment donné de leur vie de plage des architectes
émérites » (p 47), « Aimer, c’est protéger l’autre dans la
détresse » (p 52), « Il n(et jamais bon de provoquer des remous dans
les couloirs traditionnellement feutrés des bâtisses royales » (p
165) , « Tout le monde, de ce monde –là qui se taisait, était content
et soudé autour du Consensus construit par Chafik 1er et ses 22
sages. Une soudure établie sur un système qui n’était pas sorcier, compliqué et
difficile à décortiquer. Non ! Il reposait tout entier sur la
gratification, elle-même assise confortablement sur la sacro-sainte règle du
silence » (p 169)