CULTURE- LITTÉRATURE- TRADUCTION- MARCEL BOIS
(c) Ali Bedrici/Liberté,
mardi 12 novembre 2019
Décédé le 5 juin 2018, Marcel Bois a traduit de l’arabe vers
le français de nombreux auteurs de renom, à l’instar de Benhaddouga,
Laredj ou encore Ouattar.
Le nom de Marcel Bois est inséparable des chefs-d’œuvre de la
littérature algérienne d’expression arabe, dont il a largement contribué au
rayonnement international en les traduisant en français. Wassiny
Laredj, qui évoquait sa parfaite connaissance de la
langue d’El-Moutanebi, relevait la capacité du
traducteur à saisir les nuances les plus complexes et à rendre l’esprit des
idiomes et des expressions populaires locales.
Loin de toute facilité, il cherchait la perfection même dans
la traduction des titres des ouvrages. Naturellement, il possédait
suffisamment de connaissances humaines, géographiques et historiques de
l’Algérie, où il a vécu un demi-siècle, pour pouvoir rendre parfaitement les
contextes dans ses traductions.
Né en 1925 dans un petit village de Savoie, Marcel Bois
entreprend un long périple : Strasbourg, Tunis, Beyrouth et Alger pour
décrocher une licence de lettres classique et de lettres arabes. En 1961, il arrive
à Alger où “il évoquait parfois le contexte très dur de cette période, dont il
rappelait qu’elle fut marquée par les exactions de l’OAS”, indique l’écrivain.
Il poursuivra ses études de lettres arabes à l’université d’Alger jusqu’en 1968
et soutiendra sa licence à Alger et Aix-en-Provence. Devenu enseignant en
1962, il sera professeur de français au lycée El-Mokrani
d’Alger de 1969 à 1985. Avec son ami Benhaddouga, il
donnera des conférences en France et en Belgique. “Le rapprochement des peuples
et des cultures, l’effort intellectuel et la construction de la paix étaient
pour lui une passion qui le faisait vivre.” Il enseigne également la traduction
à l’université d’Alger, ce qui fait de lui le traducteur par excellence de la
littérature algérienne de langue arabe.
Marcel Bois permettait aux francophones de voir cette autre
Algérie qui s’exprimait en langue arabe et la faisait connaître aux
francophones du monde entier. C’était lui qui avait révélé au monde le Vent du
Sud de Benhaddouga. C’est Marcel Bois qui a traduit
aussi une partie de l’œuvre de Tahar Ouattar,
notamment Az-Zilzal et
Noces de mulet. De Benhaddouga, il a traduit Rih al Djanoub (Le Vent du Sud), Banae
As-Soubh (La Mise à nu), Al-Djāziyya
wa al-darāwīch
(El-Djazia et les derviches), Wa Ghadan
yaoum Djadid (Demain sera
un nouveau jour). Marcel Bois a également traduit des œuvres de Tahar Ouattar, notamment Az-Zilzal (Le tremblement de terre) et Ars Bghel
(Noces de mulet). Il a traduit également en français des œuvres de l’écrivain Wassiny Laredj, dont notamment La
Maison andalouse, le Livre de l’Émir, Les ailes de la reine…
Interrogé par la presse sur son choix de demeurer en Algérie
lors des années difficiles de la décennie noire, où le danger était permanent,
Marcel Bois se contenta de répondre : “Il était malvenu de partir. C’était
presque naturel de rester malgré tous les périls. Et puis, ce serait indécent
de quitter un pays qui m’a accueilli à bras ouverts et où je vis pleinement
depuis un demi-siècle (…)
Rester c’est mourir un peu, partir c’est mourir beaucoup, je
préfère rester et mourir un peu.” Abbé, professeur de lycée et d’université,
traducteur talentueux, très attaché à l’Algérie, Marcel Bois s’est éteint
le 5 juin 2018 à Alger où il repose au cimetière de Belfort.