VIE POLITIQUE- BIBLIOTHÈQUE D’ALMANACH-
ESSAIS ZINEDDINE SEKFALI- « L’HISTOIRE AU PRÉSENT... »
L’Histoire au présent. Chroniques d’ici et
d’ailleurs (2017-2018).Essais de Zineddine Sekfali. Casbah Editions, Alger 2019, 237 pages,800 dinars.
Dix-sept textes dans un style alliant la
chronique de presse et le commentaire du spécialiste voulant faire parvenir son
message. Il est vrai que l’auteur maîtrise désormais le genre s’y étant plongé depuis un bon bout de temps .Déjà
trois tomes et des textes partant de
2001 (Tome 1 : 2001-2011). Ici, seuls deux textes, l’un assez long (p 59 à
p 73 sur « 2017, une année électorale.... » et un autre
, assez court (p 211à p 219 sur les « législatives et les
législateurs... », entendez par là l’Apn et ses mélodrames ) n’ont pas été publiés dans la presse.
Mis à part la première chronique qui évoque
des souvenirs de jeunesse à Jijel en 1956, sorte d’hommage à deux martyrs, Kaddour Boumezrag et Nouredine Lazieb (arrêtés, car
« coupables » d’avoir été de jeunes résistants, transférés dans un
centre de torture puis sommairement exécutés par leurs bourreaux) et, en même temps, une démonstration que la
résistance , la vraie, est surtout faite
par les individus les plus humbles, « les petits, les obscurs, les
sans-grade ». Hélas, bien d’entre-eux, pour ce
qui concerne la lutte anti-coloniale pour l’indépendance du pays
, sont vite tombés dans l’oubli, leurs sacrifices ayant été
« effacés » par les discours politiciens généralistes et les
calculs de pouvoir.
Tous les autres textes, donc, sont consacrés
à la Justice et à son fonctionnement et , comme toute bonne chronique, en se basant sur des
exemples d’actualité : Ainsi, nous avons des réflexions sur des
affaires criminelles (12 affaires
hors-normes, selon lui : Khemisti, Khider, Boumediène (attentat) , Krim Belkacem, Mecili, Boudiaf, Nezzar
(attentat) , Merbah, Belkaid,
Hardi, Benhamouda, Tounsi) et sur le « procès Ministère public
contre Ch. Oultache ». Affaires
politiques ? Crimes politiques ?
Nous avons , aussi, des textes qui décortiquent la vie politique
à travers, entre autres, les élections (législatives de 2017) et les notions de
représentation et de représentativité. La « Chkara »
est là, hélas, désormais bien présente. D’où « une campagne électorale
irréelle, avec des candidats pochettes-surprises, des meetings semblables à des
théâtres d’ombres , des programmes
caricaturaux.... ». A mon sens , le début de la fin du régime
Bouteflika ....Trop, c’était trop !
Suivent des textes sur :
la
corruption, la fraude électorale (Toujours 2017, mais cette fois-ci avec les
élections locales de novembre ) , un texte non publié dans la presse
(Dommage !) ; la réforme de l’éducation avec ses polémiques absurdes
et ses faux problèmes (« Une bouteille à encre » ) ; l’enseignement supérieur (« Il faut se hâter de secourir
l’Université...) ; l’émigration et l’immigration (« Une double
tragédie pour l’Algérie ») ; le tohu-bohu de la politique et de
l’actualité durant les derniers dix huit
mois (2017- Cinq premiers mois 2018...... « Les dix huit mois écoulés
parmi les plus fébriles connus au triple plan politique , économique et
social ») ; le partenariat public privé : « La traversée du
désert » ; la disparition de l’Isf (L’impôt
sur les fortunes) et le lobby des importateurs....avec pour illustration ce qui
avait fait alors scandale, la « connivence joyeuse » Said- Haddad- Sidi Said lors des
funérailles de Reda Malek alors que Tebboune, tout nouveau
chef de gouvernement faisait grise mine ; l’affaire de la
cocaïne ; le « tsunami » traversant le gotha militaire ; la
fonction de wali, « ce géant aux pieds d’argile » qui « dès qu’il se laisse hameçonner
, a déjà perdu sa dignité d’homme et son
honneur de serviteur de l’Etat. Il y a de gros risques pour qu’ensuite il perde
sa liberté » (ici, je pense que l’auteur a été un tantinet gentil avec les
walis....que l’avenir montrera et démontrera –pour beaucoup - comme des acteurs
premiers des grandes dérives de gestion locale ) ; le grotesque mélodrame qui a eu pour scène le siège de l’Apn fin septembre -25 octobre 2018 « un cirque
parlementaire infligé aux Algériens » juste à le veille du 1er
Novembre » ; ....et deux textes , l’un sur le « trumpisme » et l’autre sur la France et ses gilets jaunes
L’Auteur : Magistrat
dans différentes juridictions avant d’occuper plusieurs hautes fonctions dans
les administrations centrales de l’Etat.....ancien membre du
gouvernement..........auteur de plusieurs essais dont trois consacrés aux
« Tribunes, Chroniques et entretiens » ,
pour la plupart publiées dans la presse , avec une préférence pour «
Le Soir d’Algérie »....et un consacré
à une « Introduction générale au système judiciaire algérien».
Extraits : « La crédibilité de la justice et la considération due au corps
judiciaire dépendent pour une grande part de la sérénité et de la dignité avec
lesquelles les présidents des tribunaux criminels doivent tenir et conduire les
débats.. Le premier des devoirs de tout président de
tribunal criminel est l’impartialité. L’instruction à l’audience n’est pas un
réquisitoire. Le prétoire n’est pas arène et le président n’est pas là pour harceler ou insulter l’accusé et moins
encore le faire taire » (p 37, 20-21 /3/2017)) , « Si la culture fataliste
des Algériens et leur propension non moins culturelle à respecter Wali el Amr,
quel qu’il soit et quoi qu’il fasse, en a fait au fil des siècles des sujets naifs,
crédules , dociles et attentistes, des sursauts inattendus et violents sont
toujours à craindre » (p 50,17/8/2017), « Il ne suffit pas de pérorer
sur les droits et devoirs de l’électeur, encore faut-il mettre en place les
mécanismes pour assurer la protection du vote des citoyens, contre d’ une
part les manipulations et les fraudes, et d’autre part, contre les scandaleux
retournements de vestes des nomades et transhumants de la politique
politicienne » (p 73, texte non publié dans la presse) , « Plus d’un
demi siècle après la proclamation de l’indépendance, et alors que notre pays a
disposé de moyens matériels, financiers et humains suffisants pour rendre notre
système performant, la mauvaise gouvernance, le clientélisme , le népotisme, la
systématisation des passe-droits, ont fait de notre université , un triste
champ aride sur lequel rien ne pousse, sauf la tricherie et de faux
diplômes » (p 94, 6/3/2018)
Avis :Un
ouvrage ni incomplet, ni succinct ni inconsistant ni trop long ;, ni trop
court. Que l’auteur se rassure.....L’essentiel et l’important y sont. Le lecteur y trouvera donc (presque ) tous les ingrédients pour comprendre la « cuisine »
politique algérienne.
Citations : « D’une
négligence commise par un petit groupe
de responsables timorés ou paresseux, il va résulter des conséquences
catastrophiques pour plusieurs générations » (p 77), « L’émigration
clandestine des Algériens ne cessera ou ne diminuera que lorsque l’Algérien
trouvera chez lui, ce qu’il va actuellement chercher à l’étranger » (p
101), « La puissance de l’argent est bel et bien au cœur du pouvoir
politique :le loup est dans la
bergerie, dans la mesure où l’Apn à laquelle on doit
tout le respect, peut être qualifiée de bergerie » (p 153), « On
attribue à Mao Tsé Toung cette réflexion : « Celui qui tient
l’ armée, tient le Pouvoir ! ».Dira-t-on un jour que celui qui
tient SH (Sonatrach) , tient
le magot ? » (p 165)