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Roman Kawther Adimi- "Les Petits de Décembre"

Date de création: 04-10-2019 18:56
Dernière mise à jour: 04-10-2019 18:56
Lu: 1003 fois


POPULATION- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- « ROMAN KAWTHER ADIMI – « LES PETITS DE DECEMBRE »

Les petits de décembre. Roman de Kaouther Adimi, Barzakh Editions. Alger , août 2019, 248 pages, 800 dinars

 

 Une petite cité, presque résidentielle (car il ya bien mieux) , du côté de Dely Brahim (Alger-ouest) .....Le tout premier village colon français. Quelques villas presque toutes occupées par des familles de militaires, pour la plupart des officiers supérieurs à la retraite ou décédés (colonels, généraux)

Une cité assez tristounette avec son entrée défoncée , non goudronnée , non totalement terminée comme bien d’autres.....et ,au milieu , un terrain encore « vague » que les jeunes du quartier utilisent comme terrain de foot. Le seul lieu de rencontres et en sécurité.

Les habitants sont quelque peu déprimés en raison de destins parfois brisés, souvent contrariés ( la carrière militaire est farcie de heurs , de malheurs...et de mauvaises humeurs...... des plus gradés ). Il y a , aussi, une ancienne moudjahida connue pour son engagement et son franc-parler et qui va servir de « bouclier » contre.......

Entre autres contre des généraux (deux) en exercice ...bien placés dans les « services ».....qui, certainement  sentant la retraite approcher (et donc être « abandonnés » par les privilèges liés aux  fonctions , dont le logement et les avantages  d’accompagnement....comme le logement et le véhicule de service ) et qui viennent tout simplement, papiers en mains, occuper le terrain vague port y construire leur future « villa de retraite ».

Le décor est planté. Reste le sujet central :

Voilà donc que, sans que personne (parmi les grandes personnes) ne s’y attende, les  jeunes se ......révoltent, ne comprenant pas la « dépossession » de leur aire de liberté,  chassent (encouragés en cela par la moudjahida) , à coups de pierres (voyant un des intrus brandir son arme de poing) , les intrus.....C’est le « buzz » médiatique...la moudjahida sachant bien utiliser son portable. Bien sûr, au passage  la « maudite presse indépendante » est évoquée ; elle  dont « tous les journalistes étaient manipulés par des ennemis : le France, l’Arabie saoudite, le Maroc, les démocrates, les laïques ou les islamistes... » et qui se sont s’emparé, bien sûr,  de l’affaire, « trop heureux de pouvoir taper sur des généraux »

 Le « système » ne va pas tarder à réagir. Menaces , pressions et   chantage sur les parents...,ces anciens  « amis », se multiplient. La résistance est née mais la lutte va-t-elle continuer ?

Tout semble se calmer quand , un jour, plutôt le matin du 25 mars 2016   en se réveillant, les parents et les jeunes découvrent un spectacle inattendu........La révolte des enfants, cette fois-ci les tout petits (menés par deux garçons et une fillette, tous amoureux fous et joueurs de foot)  a commencé., avec une forme de lutte assez originale, désarçonnant les parents, immobilisant les « dépossesseurs » et étonnant l’opinion publique.

Discrètement, ils avaient transporté la nourriture au terrain, ils avaient préparé leurs sacs de couchage, mis les bouteilles d’eau à l’abri dans une glacière.....et ramassé des pierres qu’ils entassèrent dans un coin. Après quoi, ils s’étaient emmitouflé dans les couvertures même s’ils faisant déjà bon. Dignes héritiers des enfants de Novembre !. 

En quelques heures, l’histoire de la révolte fit le tour du pays....Des histoires folles sont racontées....on vit même rendre visite aux petiots d’abord un imam (envoyé par les généraux pour une leçon de morale) , puis un ancien diplomate reconverti en chef de parti politique en mission de racolage .Poser pour une photo, par exemple !

Trois enfants puis des dizaines et des dizaines contre tout un système ? Quarante enfants qui humilient deux généraux. Ça  ne pouvait que mal se terminer.

L’Auteure :Née en 1986. Etudes de littérature .Vit et travaille à Paris. Déjà auteur de quatre romans dont le remarquable « Nos richesses » (Prix Renaudot des Lycéens, Prix du Style  et Prix Beur Fm,  en 2017)

Extraits : « Les généraux ont brandi leurs armes, vous vous rendez compte ?/ Oui ! Mais ça ne fait pas peur aux jeunes/ Ça leur fait du bien aux généraux de se prendre une petite raclée » (p 43), « Se battre contre les terroristes, monter au maquis, débusquer les camps, c’était une manière de se réapproprier tous les mots (dont celui de Dieu) que les intégristes avaient confisqués aux Algériens » (p 85) , « Nous ne sommes plus les petits .Nus ne serons jamais des grands. Nous restons là, refusant d’imaginer que dans quelques mois d’immenses villas aux fenêtres verrouillées par des barreaux, aux portes blindées, aux murs hérissés de fil barbelé, viendront remplacer notre terrain. Nous ne partirons pas.......Nos pieds sont enfoncés dans la boue. Nous ne bougerons pas »( p 247)

Avis :Un joli roman qui se lit d’un seul trait tant l’histoire est  annonciatrice  d’une autre plus large. prenante (et d’actualité). Il nous plonge dans un micro-mouvement (populaire) .Il est vrai que ce roman a du être écrit juste après février 2019.

 Citations : « Ils (les généraux) ont aussi parfois les hommes de l’ombre qui n’apparaissent sur aucun organigramme officiel, qui n’ont aucune fonction publique......Eux, possèdent souvent plus de pouvoir que des généraux et des ministres. Ce sont des hommes d’affaires, des proches du président, des faiseurs de rois ou de fous » (p 79) , « Les différences de grade se gomment difficilement même une fois revenu à la vie civile » (p 102), « La peur, on n’en parle jamais lorsqu’on évoque la guerre. Pourtant, nous avions peur de ne pas réussir, d’avoir fait tout ça pour rien, qui sait ce que donne une révolution ? Une révolution, c’est beau, c’est con et à la fin, c’est souvent triste » (p 108), « Il n’est pas naturel pour un parent d’enterrer son enfant. Jamais» (p 120).......