CULTURE – MUSIQUE- AMAR El ACHAB
Le chaâbi algérois est une musique traditionnelle d'Alger,
formalisée par El-Hadj M'Hamed El-Anka.
Apparu à la fin du 19e siècle, le chaâbi algérois est
originaire de La Casbah, inspiré par les traditions vocales de la musique
andalouse arabe. Le mot chaâbi signifie «populaire»
en arabe dialectal. Les thèmes chantés sont l'amour, la perte, l'exil, l'amitié
et la trahison. Le chaâbi fait partie d'une tradition
profondément conservatrice et ses paroles sont souvent porteuses d'un message
moral très fort.
Les grands
maîtres du chaâbi «chouyoukh»
se comptent sur les doigts d’une seule main, en l’occurrence Hadj El-Anka, Khélifa Belkacem,
Hadj M'rizek, H'Sissen,
Hadj Menouar, Cheikh El-Hasnaoui, Dahmane
El-Harrachi, Hadj Boudjemaâ
El-Ankis, Hadj Hachemi Guerouabi, Amar Ezzahi, Maâzouz Bouadjadj et Amar
El-Achab.
Amar Em Achab est né le 31 juillet 1932 à Alger. Il fut l'une
des figures de la chanson chaâbi des années cinquante
et soixante, avant de quitter Alger pour la France, où il vit toujours.
Jeune coursier
d'une teinturerie de Belcourt, il ne cessait de
fredonner des chansons. C'est qu'à l'époque, il avait un grand ami poissonnier
de son état, au demeurant chef d'orchestre réputé sur la place, Mouloud Bahri, qui l'avait pris en sympathie, car il est le premier
à avoir découvert avec quel talent Amar El-Achab donnait des gages de ses
possibilités musicales.
La carrière du
chanteur s'amorçait. Pendant un an, Amar joua de la derbouka, à l'occasion des
fêtes et de mariages, acquérant les connaissances de son premier maître et les
rudiments d'une technique nécessaire à l'exercice du métier auquel il se
destinait. C’est durant cette année qu'il apprît Alla R'Soul
El-Hadi, qui devait être suivie par Moulat Et-tadj. Dès lors, invité à son tour, il vole de ses propres
ailes et s'améliore sans cesse au contact de cheikh Namous
et Sid Ali Snitra qui lui dispensèrent leurs
conseils. Il commençait à se faire un nom. C'était en 1952, date à laquelle la
radio le sollicite pour une émission en direct de trois quarts d'heure.
Surmontant son trac, il chante. C'est un pas décisif pour le succès,
concrétisé quinze jours plus tard par une seconde convocation de la radio qui
le confronte au public en compagnie de l'orchestre de Skandrani.
Son interprétation de Brahim El-Khalil lui ouvre des perspectives nouvelles en
lui donnant conscience de sa propre valeur artistique. Dounia, une prestigieuse
maison d'édition, lui enregistre, en 1953, sur 78 T, une chanson, Mellah Ana Berkani, dont il est l'auteur. Trois ans plus tard, il
signe, chez Pathé Marconi, Ya Bélaredj, un titre
qu'il interprète sur le mode hawzi. Le texte, dont on
ignore l'auteur, connaît un grand succès et suscite même une controverse en
raison de son substrat érotique que laisse suggérer le refrain. La chanson sera
d'ailleurs reprise avec autant de succès par la grande chanteuse Fadèla Dziria, avec laquelle Amar
El-Achab se lie d'amitié et pour laquelle il écrit de nombreux morceaux. En
1966, ayant toujours le souci de se perfectionner, il décide d'aller apprendre
le solfège au Conservatoire. Lachab poursuit sa
percée avec des chants remarquables par le verbe pur, traduisant directement
les maux d'amour et de société, et leurs mélodies blues sur le fond, dansantes
sur la forme. Celui qui a un fort penchant pour le malouf constantinois,
l'auteur de Ya laïm lech tloumni et Masbarni la Tihane opte pour l'exil volontaire en France, en l976. Il y
donna de nombreux concerts et enregistra, entre autres, un 33 T comprenant six
chansons, dont Qoulouli ya nais, Triq
elli détni, Hiya eli trodni,
et des reprises, Zoudj h'djoub,
Sghier wana chibani. Lachab possède en outre
un bon répertoire de chansonnettes courtes et rythmées qu'il exécute surtout
lors des mariages. Son dernier enregistrement à la télévision algérienne date
de 1980. Il dispose de 33 enregistrements inscrits à la discothèque centrale de
la radio algérienne, mais seulement quelques-uns à la télévision. Toutefois, sa
discographie est importante, elle comporte plus d'une soixantaine de
microsillons 45 T et cassettes audit. L'écoute de son œuvre laisse apparaître
un penchant pour le verbe pur, classique, moralisateur. Que dire de cet homme
qui fut, de l’avis général des gens de sa génération, où même de ses fanes,
qu’il est l’un des meilleurs chanteurs de chaâbi. Un
artiste qui a beaucoup compté et qui a apporté énormément à la chanson
algéroise.
Amar El-Achab
est peut-être assez méconnu de la part de la jeune génération, mais son
empreinte n’est pas près de s’éteindre, et son relatif retrait de la scène
musicale et son exil en France ne sont pas parvenus à estomper cet artiste.
Amar El-Achab
fut et demeure ce gentleman distingué et aimable, un chanteur au goût solide et
un serviteur authentique de la culture populaire