INFORMATIQUE- WEB - CYBERGUEERE- HIRAK ALGERIE 2019
(c) Nabila Saïdoun.Liberté,
dimanche 22 septembre 2019
BATAILLE ENTRE LES POUR ET LES CONTRE LA RÉVOLUTION
La cyberguerre gagne le “hirak”
“L’élection du 12 décembre prochain
doit se tenir, et tous ceux qui sont contre sont des traîtres à la nation.” De
pareils posts pullulent sur les réseaux sociaux pour
contrecarrer le mouvement populaire en marche depuis le 22 février dernier. Ce
procédé, qui ne date pas d’aujourd’hui, est, en fait, exacerbé par l’annonce de
la date de l’élection présidentielle.
“Le Web est désormais un outil majeur
de désinformation. Il devient presque un allié de ce régime qui annonce
la couleur en devenant de plus en plus répressif”, notent des citoyens sur facebook, résumant une situation des plus complexes dans
laquelle s’entremêlent des avis contradictoires. Inondés de fakenews et autres posts
manipulateurs, les réseaux sociaux qui, jusque-là, ont été l’outil fort de la
révolution deviennent une arme à double tranchant.
C’est carrément une bataille féroce
qui est engagée entre les personnes favorables au statu quo et celles réclamant
un changement radical de système. Le dernier exemple en date est cette page
créée sur twitter pour soutenir l’élection
présidentielle, “El-Djazaïr tantakhib”,
très vite balayée par le hashtag “Roho
T… bil intikhabat taâkoum”, qui a eu un succès phénoménal.
C’est dire que toutes les tentatives
de saboter le hirak n’ont pas eu l’effet escompté. Il
devient, en effet, difficile de nier l’impact de ces intrusions qui deviennent
de plus en plus palpables. “Le Web est désormais un outil majeur de
désinformation et de contrôle.
Il devient presque un allié majeur du
régime, n’était la vigilance de nombreux Algériens qui mettent à contribution
leur savoir-faire technologique pour débusquer les fausses informations et
autres intrusions des mouches électroniques”, nous explique un expert du Net,
rejoint par Iheb Tekkour,
également spécialiste des nouvelles technologies.
“Internet est devenu la plateforme la
plus accessible où chaque partie tente de tirer son épingle du jeu et de faire
croire qu’elle est majoritaire, quitte à recourir à des procédés pas toujours
légaux ou du moins admis.”
Et de poursuivre : “Le plus dangereux
et qui pourrait être préjudiciable au mouvement, ce sont les algorithmes qui
font basculer la tendance.” C’est qu’il s’agit là d’un “net” avantage à la
contre-révolution fomentée par des parties occultes qui profitent de cette
faille technologique pour manipuler l’opinion et semer la suspicion.
Ils salissent carrément la réputation
de certains activistes politiques en les décrivant comme des traîtres ou des
perturbateurs à la solde de l’étranger. Car, au-delà des trolls et des fakenews, il s’agit désormais de récupérer de véritables
pages facebook qui, initialement se revendiquaient du
mouvement populaire, introduisent, actuellement, d’autres contenus aux fins de
provoquer des divisions. “C’est en effet l’une des formes de cette cyberguerre où se distingue ce hirak.
On peut te voler ton identité
digitale ou ton produit digital comme on peut te l’acheter aussi. Et c’est
d’ailleurs ce qui différencie l’espace digital de l’espace réel”, soutient
Farid Farah, enseignant chercheur et spécialiste des TIC, qui ira plus loin
dans son analyse en précisant : “Le sort de l’Algérie se joue à l’intérieur de facebook beaucoup plus que dans la rue”, avant d’ajouter :
“La révolution se passe dans l’espace digital associé à une interactivité entre
l’espace audiovisuel et les réseaux sociaux.
Les partages, les fakenews,
les commentaires, les like et dislikes
quant à la crise algérienne deviennent des armes redoutables entre ceux qui
veulent le changement et les autres.” Raison pour laquelle facebook
devient un crachoir digital pour certains, sans remettre en cause la sincérité
des activistes qui, d’ailleurs, en font les frais.
C’est le cas de Boumala,
dernière personne en date a avoir été arrêtée pour ses
positions exprimées dans ses publications sur facebook.
Mais le hirak n’a pas encore dit son dernier mot. La
marée humaine qui a déferlé dans la rue vendredi est la preuve que le peuple
est seul maître de son destin, et il ne peut en être autrement.