FINANCES- ENQUÊTES ET REPORTAGES-
HAUTS RESPONSABLES ALGERIENS- BIENS IMMOBILIERS EN FRANCE- ENQUÊTE « L’OBS »
JUILLET 2019
(Synthèse N.B / El Watan, samedi 27
juillet 2019)
L’hebdomadaire
français L’Obs s’est intéressé dans son édition du 25
juillet aux biens immobiliers acquis par de hauts responsables algériens,
situés dans les quartiers huppés de Paris.
L’enquête
menée par L’Obs, et même si elle s’arrête à quelques
noms, cite les quartiers où se trouvent des appartements luxueux d’anciens
ministres. Le premier nom cité est celui de l’ancien ministre des Affaires
étrangères, Mohamed Bedjaoui, habitant un magnifique
appartement à Neuilly faisant face au bois de Boulogne et à deux pas de la
Fondation Louis Vuitton.
Un
voisinage des plus sélects pour le «fonctionnaire» grand ami des Bouteflika,
qui n’a trouvé aucune difficulté à acheter un appartement dont le mètre carré
est estimé à 15 000 euros. «L’ancien ministre, qui, la veille, nous
assurait au téléphone ‘‘je n’ai rien à me reprocher, tout est en règle’’,
refuse d’expliquer comment ses revenus de haut fonctionnaire lui ont permis
d’acheter, en 2011, ce très grand appartement à une princesse saoudienne pour
3,45 millions d’euros», indique l’article de L’Obs. «Un grand nombre
d’officiels algériens – actuels ou passés – et d’hommes d’affaires investissent
dans la pierre, notamment dans les quartiers les plus huppés d’Ile-de-France»,
précise le média français en notant avoir dressé à partir des cadastres et les
services de publicité foncière et les registres du commerce une longue liste
d’oligarques établis à Paris ou dans sa banlieue huppée, mais «de cet
inventaire, nous n’avons extrait qu’une quinzaine de noms».
C’est la
partie émergée de l’iceberg, souligne encore le même média. «Des montages
minutieux et des prête-noms impossibles à relier formellement aux bénéficiaires
effectifs nous ont souvent empêchés d’aller au-delà du faisceau de
présomptions.» Après Bedjaoui, c’est le nom de
l’ancien ministre de l’Industrie, Abdesselam Bouchouareb, objet d’un mandat d’amener émis par la justice
algérienne, et qui compte une belle résidence en bordure de Seine et face à
Notre-Dame. Un 156 mètres carrés acheté à son nom pour un montant de 1 180 000
euros en 2006 et dont l’estimation, aujourd’hui, est entre 2,5 et 3 millions
d’euros.
LUXUEUX APPARTEMENTS
L’enquête
cite, en outre, un bien immobilier situé dans le 12e arrondissement appartenant
à l’ex-chef du protocole de la présidence Mokhtar Reguieg. «C’est avec sa fille, étudiante, et sa femme qu’il
a acheté au nom d’une sosicté civile immobilière SCI,
Deberg, un petit deux-pièces à deux pas de la mairie
en février 2018. Une transaction à ‘‘seulement’’ 320 000 euros, mais payée
comptant.
Quelle est
l’origine de ce qui, pour un haut fonctionnaire algérien, représente une
fortune ?» se demande le journal français qui dit avoir vainement essayé
de joindre ces responsables. Le média cite encore le luxueux appartement de la
fille de l’ex-Premier ministre, Abdelmalek Sellal, situé sur les Champs-Elysées, près de l’hôtel Claridge, acheté à 860 000 euros, ou encore les biens de
Amar Saadani, dont celui à Neuilly-sur-Seine acheté
en 2009 pour 665 000 euros et payé pour moitié par prêt bancaire et pour moitié
sur deniers personnels, et un quatre-épices de 101 mètres carrés situé au
boulevard Victor-Hugo au nom de la SCI l’Olivier «qui associe cet homme
politique de premier plan à plusieurs membres de sa famille». L’article de L’Obs souligne que «très souvent les acheteurs n’apparaissent
pas au grand jour.
Ils se
font discrets derrière des SCI, des prête-noms ou des montages plus opaques
encore». Citant Hocine Djidel «militant investi dans
la traque des avoirs algériens à Paris», l’article rappelle l’affaire du
patrimoine immobilier de Cherif Rahmani, notamment
l’acquisition d’un 84 mètres carrés au 16e arrondissement pour la somme de 878
000 francs et estimé à plus d’un million d’euros aujourd’hui. L’acquisition,
dont le Canard Enchaîné avait révélé le mécanisme, reposait sur la base d’une
SCI créée en 1997 sous le nom du chauffeur personnel de l’ancien ministre, puis
transmise à plusieurs propriétaires jusqu’à l’épouse du haut responsable. La
propriété du bien en question est aujourd’hui au nom des enfants de l’ancien
responsable.
L’article
de l’Obs cite aussi les biens acquis par les hommes
d’affaires algériens. «Le milliardaire Mourad Oulmi,
propriétaire, notamment, de biens dans l’immeuble de l’ancien ambassadeur Bedjaoui à Neuilly, Ayoub Aissiou, patron de la chaîne de télévision Al Dajzairia One, ou Issad Rebrab, première fortune d’Algérie, mais dont les activités
en France sont aussi bien connues.»
Est cité
aussi le sénateur, homme d’affaires et patron du club de football de Hussein Dey, Bachir Ould Zemirli, qui posséderait, avec son gendre Ayoub Aissiou, plusieurs SCI.
«Des sociétés au nom desquelles on retrouve à la fois la gérance d’un hôtel et
la propriété de plusieurs appartements, comme un 150 mètres-carrés acheté pour
933 000 euros en 2014, ou bien un cinq-pièces acquis pour 3,4 millions d’euros
en 2011, rue Vanneau, dans le 7e.» Ayoub Aïssiou a affirmé à la journaliste ne rien avoir à se
reprocher étant résident en France.
Sara Brimbeuf de Transparency explique
que c’est à partir «du décalage trop important entre le prix d’achat du bien et
les revenus officiels de l’investisseur» qu’il y a lieu d’avoir des soupçons.
«Typiquement, un ministre ou un haut fonctionnaire qui gagnerait 5000 euros par
mois et achèterait un hôtel particulier pour plusieurs millions d’euros.
Il y a
alors une présomption de bien illicitement acquis et c’est à l’acheteur de
démontrer que l’argent provient de sources licites», précise la juriste citée
par L’Obs. L’article se demande pourquoi la justice française ne se saisit-elle
pas du cas des hommes politiques sur lesquels les plus lourds soupçons pèsent,
étant donné que le signalement serait difficile dans les cas des hommes
d’affaires millionnaires.