VIE POLITIQUE- PERSONNALITES-
ABDELKADER BENSALAH- PRESIDENT PAR INTERIM
(c) Afp, mardi 9 avril 2019
Il a été nommé, mardi 9 avril 2019, président par intérim, pour 90 jours, lors
d'une réunion du Parlement algérien. Longtemps resté dans
l'ombre, mais dévoué au système algérien, le président du Conseil de
la Nation, Abdelkader Bensalah, remplace temporairement Abdelaziz Bouteflika à
la tête de l'Algérie, une semaine après la démission du président au pouvoir
depuis vingt ans. Au cours de ces trois mois, il aura la lourde charge
d'organiser une nouvelle élection présidentielle, à laquelle il ne pourra pas
participer. "Je vais travailler à
concrétiser les intérêts du peuple", a promis
Abdelkader Bensalah devant le Parlement. Que
sait-on de cet homme ?
Un pur produit du régime algérien
et fidèle d'Abdelaziz Bouteflika
Député, ambassadeur, haut fonctionnaire ministériel, sénateur…
Abdelkader Bensalah a multiplié les fonctions et
présidé les deux chambres du Parlement, sans jamais devenir ministre.
Il est président du Conseil de la Nation, chambre haute du Parlement
algérien et équivalent du Sénat en France, depuis 2002, soit trois ans à
peine après le début de la présidence Bouteflika. Son mandat se termine en
2021. Cette fonction lui confère le droit d'assurer l'intérim en cas de décès,
démission ou "empêchement" du président de la République du fait
d'une maladie grave et durable. La décision de le désigner comme
président par intérim est donc conforme à ce que prévoit la Constitution
algérienne.
Cet homme de taille moyenne, au visage rond et à la chevelure
argentée, représentait souvent ces dernières années, en Algérie ou à
l'étranger, Abdelaziz Bouteflika, depuis son AVC en 2013. C'est lui qui
occupait le siège de l'Algérie lors du sommet de la Ligue arabe à Tunis le
31 mars. Il "fait partie
intégrante du régime depuis plus de vingt ans et avait soutenu avec insistance,
ces dernières semaines, la cinquième candidature contestée d’Abdelaziz
Bouteflika. Âgé de 77 ans, il est membre de longue date du
Rassemblement national démocratique (RND) de l'ancien Premier ministre Ahmed Ouyahia, principal allié du Front de libération nationale
(FLN) de l'ex-président Abdelaziz Bouteflika",
détaille LCI.
Sans talent oratoire particulier, c'est un bon serviteur du
système, décrit à l'AFP un homme politique ayant travaillé avec lui, qui
attribue à sa discrétion, entretenue jusqu'à frôler l'effacement, sa longévité
dans les allées du pouvoir. "Se
rendre utile au moment opportun, c'est ce qu'il sait faire, lui qui ne
s'exprime que rarement sur des questions liées à la gestion des affaires de
l'Etat", écrivait de lui le quotidien francophone El Watan en
2015.
Une personnalité rejetée par la rue
"Dégage Bensalah !" et "Système dégage" : à
Alger, des milliers d'étudiants sont descendus dans la rue mardi. Ils ont
scandé ces slogans devant la Grande poste, avant d'être dispersés par les
forces de l'ordre à l'aide de gaz lacrymogène. Car les Algériens
continuent massivement à manifester pour réclamer le départ de l'ensemble du
"système" Bouteflika, dont Abdelkader Bensalah
est issu.
C'est la raison pour laquelle les partis d'opposition ont
boycotté la réunion du Parlement et refusé de valider la nomination
d'Abdelkader Bensalah, mardi. "Cette personnalité (...) n'est pas tolérée par le
mouvement citoyen, qui exige son départ immédiat, mais aussi par l'opposition
et une partie des représentants des formations politiques de la majorité des
deux chambres du Parlement", écrit dans un éditorial El Moudjahid, le quotidien
gouvernemental, traditionnel vecteur de messages du pouvoir.
Un journaliste et ambassadeur avant de s'engager en
politique
Abdelkader Bensalah a
18 ans à peine quand il rejoint les rangs de l'Armée de libération
nationale (ALN), qui combat depuis 1954 l'armée coloniale française. A
l'indépendance en 1962, il obtient une bourse et part étudier le droit à Damas
(Syrie), avant de rentrer en Algérie où il intègre en 1967 la rédaction du
quotidien national arabophone El
Chaab (Le Peuple), à une époque où l'Etat
détient le monopole de la presse et des médias.
Après une carrière dans la
presse d'Etat, notamment comme correspondant à l'étranger, il est élu député en
1977. Réélu deux fois, il préside pendant dix ans la Commission des Affaires
étrangères de l'Assemblée populaire nationale. Ambassadeur d'Algérie en Arabie
saoudite de 1989 à 1993, il est ensuite porte-parole du ministère des Affaires
étrangères.
Il fait l'objet d'une polémique sur sa nationalité
Certains de ses détracteurs accusent Abdelkader Bensalah d'être marocain de naissance et d'avoir été
naturalisé algérien dans les années 1960, ce qui l'empêcherait d'assurer les
fonctions présidentielles, même de façon intérimaire. "La condition pour qu’un responsable occupe le poste
de président de la République est qu’il possède la nationalité algérienne d’origine.
Et lui avait une autre nationalité jusqu’en 1964, année durant laquelle il a
obtenu la nationalité algérienne. Il avait la nationalité marocaine, ce qui
pose un problème", a récemment estimé Lakhdar Benkhalaf, député du
Front de la justice et du développement (FJD), parti islamiste d'opposition,
cité par LCI.
Né le 24 novembre 1941 dans la région de Tlemcen, près de la
frontière marocaine, Abdelkader Bensalah a
toujours catégoriquement démenti cette vieille rumeur. Car cette polémique
sur ses origines était déjà apparue dans plusieurs médias, dont Le Figaro,
en 2013, lors de la longue hospitalisation à Paris d'Abdelaziz
Bouteflika après son AVC. L'hypothèse d'un intérim avait été évoquée à ce
moment-là sans être concrétisée. "Si
vous voulez savoir qui je suis, allez au village de Mahrez,
daïra de Fellaoucène, ouvrez les registres de l’état
civil de la commune et interrogez ceux que vous voulez", avait
lancé Abdelkader Bensalah à El Watan en
2013. Des propos que le quotidien vient d'exhumer.