Nom d'utilisateur:
Mot de passe:

Se souvenir de moi

S'inscrire
Recherche:

Mouvement Hirak février/mars 2019- Dates clés

Date de création: 30-03-2019 15:28
Dernière mise à jour: 30-03-2019 15:28
Lu: 1727 fois


VIE POLITIQUE – ENQUÊTES ET REPORTAGES- MOUVEMENT HIRAK FÉVRIER/MARS 2019- DATES CLÉS

(c) El Watan magazine/Amina Semmar, vendredi 29 MARS 2019.

 

Avec la spectaculaire marche du vendredi 22 mars, le mouvement populaire exigeant le départ de système a bouclé son mois. A partir d’aujourd’hui, il entame son deuxième mois sans essoufflement. Un mouvement inédit.

 22 février : Rappelons-nous le show du FLN à la Coupole, le samedi 9 février, pour réitérer l’appel en faveur de la candidature de Bouteflika, alors que lui-même n’avait pas encore fait part de ses intentions. Une fiesta qui avait fait polémique et qui illustrait une annonce imminente plus qu’évidente. Le lendemain, le président Bouteflika annonçait sa candidature à la présidentielle d’avril 2019 dans un message adressé à la nation et diffusé par l’APS, malgré un AVC qui l’a considérablement affaibli depuis 2013.

Il y a quelques semaines, nous pouvions déjà observer des appels anonymes de protestation sur les réseaux sociaux contre le 5e mandat, notamment celui de Rachid Nekkaz, qui a longtemps été un initiateur du mouvement social. Parallèlement, le mouvement citoyen Mouwatana partageait les mêmes appels de protestation. En effet, des milliers d’internautes partagent les appels à une forte mobilisation citoyenne pour le 22 février, après la prière du vendredi, et ce, à travers tout le territoire national. Cet appel, qui prend de l’ampleur, reste cependant anonyme. Mais il n’a laissé personne indifférent. Les Algériens étaient divisés, entre méfiance et mobilisation légitime.

Le jour précédant la manifestation (acte I), les internautes algériens avaient fait face à de grosses perturbations du réseau internet. Motif plausible : empêcher son organisation. Du côté de l’Etat, un important dispositif a été mis en place dès la matinée de ce vendredi pour sécuriser les zones sensibles de la capitale, particulièrement le palais d’El Mouradia et le centre-ville où se situe le Parlement. Nous avons pu voir également plusieurs vidéos circulant sur le Net montrant des convois de véhicules de police. Des vidéos dont l’authenticité n’a jamais été démontrée.

Quoi qu’il en soit, cette marche qui promettait d’être grandiose l’a été et a même dépassé les attentes. Les Algériens ont été des milliers à marcher pacifiquement. Silmiya. Revendiqué du début à la fin de la journée, ce mot n’a cessé d’être scandé par nos concitoyens. En plus d’être anticonstitutionnelle, la candidature pour un 5e mandat de Bouteflika est illégale.

Le peuple solidaire ne peut cautionné cela. Toutefois, ayant eu peur de retomber dans la décennie noire, l’organisation de la manifestation a été impeccable et aucun incident n’a été déploré. Le peuple algérien a impressionné le monde entier. Depuis ce jour, l’Algérie vit un tournant décisif. C’est une réponse à des années de silence et d’oppression. Un peuple qui a si longtemps été pointé du doigt pour son manque de civisme, mais surtout dénigré sur tous les points, y compris par son propre gouvernement.

26 février : Les étudiants de toutes les facultés et de tous les campus sont sortis dans les rues de leurs villes pour la première fois pour manifester contre le 5e mandat. Des appels anonymes ont été lancés sur les réseaux sociaux pour protester contre le gouvernement actuel. Les mardis seront donc la journée décrétée par les étudiants pour s’exprimer et investir les rues. Les regroupements sont pacifiques, les slogans de tous types sont brandis et les manifestations se terminent toujours dans le calme. Tout mouvement de violence est écarté. Au niveau de certaines universités, comme la fac centrale d’Alger ou la fac de droit à Said Hamdine, on a pu observer un important dispositif de police pour empêcher les étudiants de quitter les campus.

Les Algériens ont brisé le mur de la peur. Les étudiants qui avaient autrefois peur ont vu ce sentiment disparaître. Cependant, c’est au tour de l’Etat d’avoir peur, particulièrement en voyant la déferlante étudiante protester à son tour contre la candidature de Bouteflika.

Pour éviter tout débordement, mais surtout pour maîtriser le mouvement des étudiants, le ministre de l’Enseignement supérieur, Tahar Hadjar, tente de manœuvrer à sa manière contre les protestations estudiantines qui se multiplient à travers le pays : il signe le 9 février une décision pour avancer les vacances de printemps. Des vacances anticipés d’environ un mois qui prennent effet le lendemain, le 10 mars, jusqu’au 10 avril. Dès la publixation du communiqué, des avis ont été affichés et les étudiants des résidences universitaires ont été sommés de quitter immédiatement leurs chambres dans la nuit du 9 février.

Diviser le mouvement étudiant en diminuant leur nombre était la solution de Hadjar, mais ce qu’il ne savait pas c’est que beaucoup d’étudiants sont restés, hébergés par des amis. Les étudiants sont les premiers d’une corporation à sortir aussi nombreux pour clamer le changement du système. Depuis ce jour, d’autres corporations sortent une à une.

Malgré la censure de certains médias, de nombreux journalistes ont manifesté. La pression, le verrouillage et l’absence de médiatisation des manifestations ont contraint Nadia Madassi, la présentatrice du JT de Canal ainsi que la rédactrice en chef de la chaîne 3 Meriem Abdou, à démissionner. Mais aussi Toufik Khelladi, qui a été limogé de son poste de directeur de ENTV.

1er mars : Lors de ce deuxième vendredi de manifestation populaire, des millions d’Algériens sont descendus dans les rues pour protester contre ce pouvoir silencieux. Aucun parti ni chef de parti n’ont réagi aux manifestations. Tous complices dans ce gouvernement illégitime. Le Président n’a toujours pas écouté la voix du peuple. Plusieurs personnalités prennent part à la manifestation contre le 5e mandat. Parmi elles, l’icone de la Guerre de Libération nationale, la moudjahida Djamila Bouhired, et le président du groupe Cevital, Issad Rebrab.

Les marches sont toujours faites dans le pacifisme et le civisme. Pourtant quelques incidents sont enregistrés à la fin de la journée, quand un groupe de casseurs se s’immisce dans la marche. Des rumeurs disent que se sont des voyous payés pour semer la zizanie au milieu du mouvement populaire pacifique. Du côté de la police, elle repousse les manifestants en les aspergeant de gaz lacrymogènes afin d’éviter tout dérapage au niveau du palais d’El Mouradia. Néanmoins, cette manifestation a causé la mort d’un homme à la suite d’une bousculade au niveau de la place Addis-Abeba, Hassan Benkhedda. Il s’agit du fils du dernier chef du GPRA, Benyoucef Benkheda.

3 mars : En ce jour, le président Abdelaziz Bouteflika dépose sa candidature pour un 5e mandat, malgré la contestation grandissante. Il s’est toutefois engagé, s’il est élu le 18 avril, à ne pas aller au bout de son mandat et à enclencher une présidentielle anticipée. Dans sa lettre à la nation, le Président assure qu’une révision de la Constitution sera opérée. Cette annonce a causé une manifestation nocturne impromptue dans plusieurs villes du pays.

8 mars

Le troisième vendredi de manifestation tombe avec la célébration d la Journée internationale des droits de la femme. En ce jour, la présence féminine se fait de plus en plus forte. La peur s’est dissipée, laissant place à un sentiment de confiance et de solidarité inouï. Chaque vendredi, le nombre de manifestants augmente, notamment les femmes et les enfants qui n’hésitent pas à se mêler au mouvement social. A la fin de la journée, ils se dispersent dans le calme. La marche du 8 mars est qualifiée de «grandiose». Selon des sources sécuritaires, 15 millions d’Algériennes et d’Algériens ont manifesté à travers le territoire national ce jour-là, dont 5 millions à Alger.

11 mars : Hospitalisé depuis le 24 février à l’hôpital universitaire de Genève, Bouteflika est rentré le 10 mars. Depuis son accident vasculaire cérébral en 2013, son état de santé n’a cessé de se détériorer. Ses voyages répétés à Genève en sont la preuve. Occuper donc le poste de président de la République en toute légitimité n’est pas justifié depuis maintenant sept ans.

Entre temps, sa candidature a été déposée et la révolte des Algériens n’a pas cessé avec comme même objectif le changement du pouvoir. Toutefois, la voix de la raison semble être arrivée au Président, car il renonce à briguer un 5e mandat, reporte les élections présidentielles et surtout prolonge son 4e mandat par la même occasion. Il est vrai que le peuple est content, mais est aussi perplexe en ce qui concerne la suite des évènements.

Le flou et des zones d’ombre s’installent. La nouvelle a été communiqué par une lettre et diffusé par l’agence APS. «Une conférence nationale sera organisée avec une réforme du système politique et l’élaboration d’une nouvelle Constitution d’ici la fin de l’année 2019», dit-il. De plus ce même jour, le Premier ministre Ahmed Ouyahia remet sa démission au président ; Noureddine Bedoui est nommé à sa place avec Ramtane Lamamra comme vice-Premier ministre. Le duo mènera la transition du pouvoir. Dès le lendemain, les étudiants envahissent le centre-ville d’Alger pour protester contre le prolongement du 4e mandat et de la feuille de route proposée.

Gagner du temps est la ruse du moment. Si le choix de Lamamra pourrait être judicieux compte tenu de son bagage diplomatique, Bedoui fait largement polémique. Connu pour un être un des bras droit de Bouteflika, il a longtemps été pointé du doigt pour ses restrictions en matière de droits et libertés. Dès sa nomination, le duo entame des consultations pour former le nouveau gouvernement, mais les refus de participation se font en masse.

14 mars : Bedoui et Lamamra sont côte-à-côte pour la première fois dans une conférence de presse organisée au CIC. Mais quel est l’intérêt d’en organiser une si aucune réponse n’est apportée ? Ce fut hélas le cas. Parmi toutes les questions posées par les journalistes, pas une seule n’a eu de réponse ; pis encore Bedoui les esquivait et les contournait toutes.

La seule information obtenue concerne la concertation pour la création d’un «gouvernement technocrate, représentatif de toutes les forces et compétences de la nation, ouvert aux jeunes», avait-il expliqué. A la fin de la conférence, les journalistes sont sortis plus flous qu’ils n’y étaient entrés.

Parallèlement à la conférence de presse, les manifestants ne perdent pas de temps et s’emparent une nouvelle fois des rues pour exprimer leur mécontentement. En ce qui concerne le vice-Premier ministre Ramtane Lamamra, il y a une certaine contradiction entre ses paroles et ses actions.

Tantôt il refuse toute ingérence étrangère dans les affaires internes de l’Algérie, tantôt il fait le tour du monde pour rencontrer des diplomates, des ministres et des politiciens. Mais que recherche-t-il vraiment ? Est-ce du soutien ou autre chose ? A signaler une première historique pour les avocats et les magistrats : ilsmanifestent ensemble devant la cour d’Alger pour clamer une justice libre et indépendante, mais aussi pour dénoncer les décisions de Bouteflika qu’ils jugent anticonstitutionnelles.

Ce n’est toutefois pas la première fois que les avocats manifestent. Un sit-in a déjà été organisé devant le tribunal Abane Ramdane d’Alger le 25 février dernier, où plusieurs avocats ont été interpelés puis relâchés, parmi eux Mustapha Bouchachi et Zoubida Assoul. En outre, le 14 mars, Journée nationale des personnes handicapées, les magistrats ont tenu un rassemblement à la Grande-Poste pour dénoncer à leur tour le départ du système.

15 mars : Après que Bedoui et Lamamra soient présentés comme les personnes gérant le pouvoir transitoire, c’est le 4e vendredi où le peuple algérien arpente les rues de toutes les wilayas. Avec de nouveaux slogans pour dire non à la prolongation du 4e mandat de Bouteflika et surtout pour réclamer le départ de tout le régime politique en place. Le nombre de manifestants aurait pu être plus important si la gendarmerie nationale n’avait pas bloqué les accès d’Alger aux véhicules et aux bus. Mais rien n’a arrêté les Algériens, c’est à pied qu’ils ont continué leur route pour rejoindre la Grande-Poste. De plus, les policiers intègrent la marche et manifestent avec le peuple et pour le peuple.

22 mars : Acte 5, un autre vendredi de manifestation pour le changement. «Yetnahaw ga3». La météo a prévu des pluies pour toute la journée. Le gouvernement aurait pu croire que le peuple hésiterait à sortir, voire ne sortirait pas du tout. Il a eu tort. Les appels à manifester sur les réseaux sociaux ont été clairs : «Qu’il pleuve ou qu’il neige nous sortirons !» Un mois de manifestation, un mois de pacifisme, le peuple algérien a été exemplaire. Les gilets jaunes français ont beaucoup à envier à leurs confrères algériens. Les manifestations algériennes se déroulent toujours en mode «silmiya».

26 mars : Après cinq vendredis de manifestation et de contestation, le général de corps d’armée Ahmed Gaïd Salah, vice-ministre de la Défense nationale, chef d’état-major de l’Armée nationale populaire (ANP) a soutenu que la solution de cette crise politique actuelle réside dans l’application de l’article 102 de la Constitution. Le Conseil constitutionnel se réunit de plein droit, et après avoir vérifié la réalité de cet empêchement par tous moyens appropriés, propose, à l’unanimité, au Parlement de déclarer l’état d’empêchement.

Le Parlement charge l’intérim du chef de l’Etat, pour une période maximale de 45 jours, le Président du Conseil de la nation, Abdelkader Bensalah, qui exerce ses prérogatives dans le respect des dispositions de l’article 104 de la Constitution.

En cas de continuation de l’empêchement à l’expiration du délai de quarante 45 jours, le président du Conseil de la nation assume la charge de chef de l’Etat pour une durée de 90 jours au maximum, au cours de laquelle des élections présidentielles sont organisées. L’initiative de Gaïd Salah a d’un côté divisé l’opposition et d’un autre côté permis à des anciens dirigeants de retourner leur veste et de suivre le mouvement populaire.

Ahmed Ouyahia, l’ancien Premier ministre, appelle à la démission de Bouteflika et salue parallèlement l’appel du chef d’état-major de l’armée algérienne. «Les événements qui se produisent chaque jour confirment le rejet de la rue pour la feuille de route proposée par le Président. Cette démission aurait pour but de faciliter l’entrée dans la période transitoire prévue par la Constitution», a dit Ahmed Ouyahia au lendemain de la déclaration de Gaïd Salah.

29 mars 2019 : 6è vendredi de mobilisation. Des millions d’Algériens à nouveau dans la rue. Mobilisation intacte.C’est au tour de la proposition de A. Gaid Salah de subir l’épreuve de ce qui est devenu un référendum hebdomadaire.