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Réseaux sociaux- Propagande

Date de création: 26-03-2019 15:44
Dernière mise à jour: 26-03-2019 15:44
Lu: 1144 fois


COMMUNICATION- ÉTUDES ET ANALYSES- RÉSEAUX SOCIAUX- PROPAGANDE

 

 

Réseaux sociaux : Plateforme de propagande et de manipulation de masses

Réglementation et régulation de la communication électronique.

Par (c) Tahar Beddiar  (juriste spécialisé en communication)/El mOudjahid, lundi 25 mars 2019.Extraits

Ces derniers temps, les réseaux sociaux, Facebook, YouTube, Twitter et d’autres plateformes, suscitent beaucoup de polémiques et focalisent les esprits des experts, chercheurs, législateurs et autorités de régulation, quelles que soient la territorialité, les idéologies ou les appartenances géopolitiques… On les accuse de propager des théories du complot, de fausses nouvelles (fake news) et d’autres informations virales, tout ce qui est d’habitude rapidement diffusé dans les réseaux sociaux, grâce à l’interactivité et à la célérité qui les caractérisent.

La plateforme de vidéos est aujourd’hui un puissant outil de propagande et de manipulation de masses. En effet, des chaînes YouTube spécialisées mènent des campagnes ciblant un groupe spécifique d’utilisateurs pour qu’ils se forgent telle ou telle opinion sociale et politique.
De nombreux mécanismes publicitaires de la plateforme de partage vidéo lancée par l’entreprise américaine Google permettent d’influencer de manière directe les populations de différents pays. Utilisant des instruments sophistiqués de collection des données personnelles, l’entreprise a réussi à accumuler une base de données informative pouvant cibler des peuples quelles que soient leurs croyances ou idéologies. Ainsi, YouTube possède des ressources pour manipuler des opinions des utilisateurs de la plateforme.
Compte tenu des moyens déployés par YouTube, il n’aurait ainsi aucun problème à faire qu’un utilisateur serait susceptible de croire à de fausses informations. En outre, certains médias font la promotion d’idées favorables à leur ligne éditoriale ou aux intérêts d’un groupe politique aux fins de propagandes et de désinformation néfastes pour la société.
Ces derniers temps, par exemple, la presse marocaine, s’appuyant sur les vidéos diffusées sur YouTube et Facebook montrant des rassemblements sporadiques et des appels à une manifestation pour le 22 février après la prière du vendredi, a tenté de faire croire que l’Algérie bascule dans l’anarchie, la violence et à l’embrasement.
L’industrie des médias contemporains permet de diffuser et promouvoir tout contenu douteux pour influencer son audience partout dans le monde. Jusqu’à ce que cela soit bien rémunéré, YouTube et d’autres géants numériques seront une pépinière d’informations virales et fausses nouvelles destinées à servir les intérêts de ces corporations américaines. C’est ainsi d’ailleurs que les législateurs, dans le monde et dernièrement en Angleterre, se soulèvent et réagissent par la loi traitant d’ailleurs, par exemple, Facebook de «gangster numérique».
La présente réflexion porte sur l'implication des réseaux sociaux dans la propagation de fake news et d’informations contraires à l’ordre public ou aux bonnes mœurs. En effet, l’activité d’information est régie par les lois de la République et c’est ainsi que selon la loi organique relative à l’information «L’information est une activité librement exercée dans le cadre des dispositions de la présente loi organique, de la législation et de la réglementation en vigueur et dans le respect :

— de la Constitution et des lois de la République,
— de la religion musulmane et des autres religions,
— de l’identité nationale et des valeurs culturelles de la société,
— de la souveraineté nationale et de l’unité nationale,
— des exigences de la sécurité et de la défense nationale,
— des exigences de l’ordre public,
— des intérêts économiques du pays,
— des missions et obligations de service public,
— du droit du citoyen à être informé d’une manière complète et objective,
— du secret de l’instruction judiciaire,
— du caractère pluraliste des courants de pensées et d’opinions,
— de la dignité de la personne humaine et des libertés individuelles et collectives.

Toujours selon la loi, «par activités d’information, il est entendu au sens de la présente loi organique, toute publication ou diffusion de  faits d’actualité, de messages, d’opinions, d’idées et de connaissances, par tout support écrit, sonore, télévisuel ou électronique, à destination du public ou d’une catégorie de public».
Aussi, le cahier des charges générales fixant les règles imposables à l’activité audiovisuelle prévoit que «Dans la conception et l’élaboration des règles relatives à la programmation et à la diffusion des programmes, les responsables des services de communication audiovisuelle veillent notamment, à l’application des principes suivants :

- le respect des valeurs nationales et des symboles de l’Etat définis par la Constitution ;
- le respect des exigences de l’unité nationale, de la sécurité et de la défense nationales, de l’ordre public ainsi que des intérêts économiques et diplomatiques de la nation ;
- le respect des constantes et des valeurs religieuses, morales et culturelles de la nation ;
- le respect des autres références religieuses et des autres croyances et religions ;
- le respect du droit à l’honneur et à l’intimité du citoyen, ainsi que la protection de la famille ;
- la protection des catégories de personnes vulnérables.

Toute diffusion d’informations audiovisuelles relatives à des thèmes portant sur l’unité nationale, la sécurité et la défense nationales est soumise à l’autorisation préalable des autorités concernées.
Les modalités d’application des présentes dispositions sont fixées par arrêté conjoint du ministre chargé de la Communication, du ministre chargé de la Défense nationale et du ministre chargé de l’Intérieur».
Les dispositions relatives à l’éthique et à la déontologie prévoient que :

- les responsables des services de communication audiovisuelle veillent à garantir dans le contenu des programmes diffusés, l’expression pluraliste des courants de pensée et d’opinion dans le respect du principe d’égalité de traitement, d’honnêteté et d’indépendance, conformément à la législation et à la réglementation en vigueur.
- Dans les émissions d’information politique et générale, les responsables des services de communication audiovisuelle sont tenus de veiller notamment à :
- faire observer l’impartialité et l’objectivité, et à ne pas servir l’intérêt et la cause de groupes politiques, ethniques, économiques, financiers, religieux ou idéologiques ;
- ne pas instrumentaliser la religion à des fins partisanes et/ou contraires aux valeurs de tolérance ;
- ne pas faire l’apologie de la violence et ne pas inciter à la discrimination raciale, au terrorisme ou à la violence à l’égard de toute personne en raison de son origine, de son genre,
de son appartenance à une race ou à une religion déterminée, et de ne pas porter atteinte à l’intégrité morale d’une personne en vie ou décédée ;
- la violation de la vie privée, de l’honneur et de la réputation des personnes est interdite.
- Respecter et appliquer les décisions de l’autorité de régulation de l’audiovisuel et les recommandations des instances de surveillance des élections pendant les échéances électorales.

En effet, la loi sur l’activité audiovisuelle prévoit qu’en matière de régulation, l’Autorité de Régulation Audiovisuelle (ARAV) :
Les missions et attributions de l’autorité de régulation de l’audiovisuel consistent notamment en ce qui suit :

- veiller au libre exercice de l’activité audiovisuelle dans les conditions définies dans la présente loi et par la législation et la réglementation en vigueur ;
-veiller à la conformité aux lois et règlements en vigueur, de tout programme audiovisuel diffusé, quel que soit le support utilisé ;
- appliquer les règles relatives aux conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions d’expression directe ainsi que des émissions des médias audiovisuels lors des campagnes électorales, conformément à la législation et à la réglementation en vigueur.

L’activité de presse électronique et l’activité audiovisuelle en ligne s’exercent dans le respect des dispositions de l’article 2 de la présente loi organique.
Au sens de la loi, il est entendu par  infractions liées aux technologies de l’information et de la communication : «les infractions portant atteinte aux systèmes de traitement automatisé de données telles que définies par le code pénal ainsi que toute autre infraction commise ou dont la commission est facilitée par un système  informatique ou un système de communication électronique».
En outre, selon la loi n°18-04 du 10 mai 2018 fixant les règles générales relatives à la poste et aux communications électroniques : «Il peut être procédé, pour des impératifs de protection de l’ordre public ou pour les besoins des enquêtes ou des informations judiciaires en cours, à la mise en place de dispositifs techniques pour effectuer des opérations de surveillance des communications électroniques, de collecte et d’enregistrement en temps réel de leur contenu ainsi qu’à des perquisitions et des saisies dans un système informatique.
Les opérations de surveillance peuvent être effectuées dans les cas suivants :

a) pour prévenir les infractions qualifiées d’actes terroristes ou subversifs et les infractions contre la sûreté de l’Etat ;
b) lorsqu’il existe des informations sur une atteinte probable à un système informatique représentant une menace pour l’ordre public, la défense nationale, les institutions de l’Etat ou l’économie nationale ;
c) pour les besoins des enquêtes et des informations judiciaires lorsqu’il est difficile d’aboutir à des résultats intéressant les recherches en cours sans recourir à la surveillance électronique ;
d) dans le cadre de l’exécution des demandes d’entraide judiciaire internationale.

Les opérations de surveillance ci-dessus mentionnées ne peuvent être effectuées que sur autorisation écrite de l’autorité judiciaire compétente.
A titre comparatif, en Europe la nouvelle directive de l'Union européenne relative aux médias audiovisuels insiste sur l’Autorégulation et corégulation : «pour transposer la directive, les Etats membres sont encouragés à recourir, complémentairement aux mesures réglementaires classiques, à des instruments de corégulation et d'autorégulation dont l'intérêt se mesure en termes d'implication des fournisseurs de services et d'adaptation plus aisée à des situations évolutives».
Dans les considérants, cette directive prévoit :

« À la lumière des nouvelles technologies de transmission de services de médias audiovisuels, un cadre réglementaire relatif à l’exercice d’activités de radiodiffusion devrait tenir compte de l’impact des changements structurels, de la diffusion des technologies de l’information et de la communication (TIC) et des innovations technologiques sur les modèles d’activité…
- Chaque État membre veille à ce que tous les services de médias audiovisuels diffusés par des fournisseurs de services de médias relevant de sa compétence respectent les règles du droit applicable aux services de médias audiovisuels destinés au public dans cet État membre.
Aussi et en matière de coopération entre les Etats membres, il est prévu une relation permanente étroite entre les autorités de régulation. Ainsi par exemple, l’Article 30 de la directive prévoit : «Les États membres prennent des mesures appropriées pour se communiquer mutuellement et communiquer à la Commission les informations nécessaires aux fins de l’application de la présente directive, notamment via leurs organismes de régulation indépendants compétents».
Récemment, il y a eu un l’exemple britannique concernant les réseaux sociaux, en effet durant la dernière quinzaine de février 2019, un rapport rédigé par les parlementaires britanniques appelle à la fin de l'autorégulation pour Facebook et compare ces dirigeants à des «gangsters numériques».
La Commission sur le numérique, la culture, les médias et le sport de la Chambre des communes (DCMS) du Parlement du Royaume-Uni a publié un long rapport de 100 pages s'attardant sur les pratiques du réseau social.
Et le contenu de ce document est  particulièrement sévère avec l'entreprise du patron de Facebook, Mark Zuckerberg. La DCMS appelle à une régulation radicale et indépendante de Facebook par l'adoption d'un ensemble de lois. «Il faut une modification radicale du rapport de force entre ces plateformes et le public. L'âge d'une autorégulation inadéquate doit toucher à sa fin», a déclaré son président Damian Collins.
Les députés anglais ayant ouvert une enquête sur l'implication de Facebook dans la propagation de fake news, invitent le gouvernement à imposer une régulation par la loi. Ce même procédé est mis en œuvre par le législateur allemand.
Compte tenu de ce qui précède et vu la situation actuelle que traverse le pays, il me semble indiqué de méditer tout ce qui tourne autour des médias, tous supports confondus, en faisant de l’autorégulation, de la réflexion intrinsèque si l’on puisse dire… et de s’auto-sensibiliser sur l’usage des supports électroniques et les réseaux sociaux ainsi que leurs effets sur la société qui pourraient être néfastes en s’appuyant d’ailleurs sur les débats lancés en Europe.
Qu’on le veuille ou non, ce sont les sociétés européennes qui ont mis en place ce moyen de communication et qui aujourd’hui le discutent, le remettent en cause et ne prennent pas comme argent comptant tout ce qu’il relaie.