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RÉCIT YOUCEF MEHENNI- « MÉMOIRES INSOLITES »
Mémoires insolites. Récit de Youcef Mehenni. Casbah Editions, Alger 2017, 173 pages, 700 dinars
Un récit de vie linéaire ! Pas tranquille du tout, mais sereinement
contée.
Tout d’abord l’enfance dans un petit village accroché au flanc d’une
montagne « chauve », dominant la vallée de la Soummam. Une vue
plongeante et panoramique. Et, surtout cet irrépressible envie de tenter , par tous les
moyens , de voir si l’herbe n’est pas plus verte ailleurs et, surtout, si la
mer existait vraiment. Une escapade d’enfant qui finit, heureusement, très
bien....grâce au juif de Bougie Bakri et son vieux camion chargé de bois.
Ensuite, c’est le maquis avec l’Aln en wilaya III
sur les hauteurs de Bouira. Une vie faite de marches,
d’accrochages, de batailles (« Le repaire des chacals », p 35 à 70) , de souffrances, ,
d’amitiés, de courages....et, aussi, de joies simples mais bénéfiques pour le
moral .
Puis, c’est le départ pour soins en Rda , pris en
charge par la Fédération des syndicats libres est-allemands, la Fdgb.....dans un avion d’Alitalia, à partir de Tunis, ...et
« tout surpris d’entendre le commandant de bord souhaiter la bienvenue
à bord à nos amis combattants algériens »....et accueillis , avec un
certain faste, à Berlin, par les
étudiants Hachemi Bounedjar
et Djamel Ould Abbès
(tiens, tiens !)
Ensuite, c’est l’Indépendance et un
court passage en tant que rédacteur reporter à « La Dépêche
d’Algérie » (appartenant alors à l’armateur C. Schiaffino),
puis « Le Peuple »
. La couverture de voyages officiels. Des rencontres :Kaid Ahmed, A. Bouteflika, Tedjini Haddam, Tito, Ben Bella
(qui a rencontré secrètement de Gaulle lors du retour d’un voyage à Belgrade, mais « France Soir »
avait publié l’info’) Des évènements et des personnalités inoubliables:
Jacques Berque, Amar Ouzzegane ,Mgr Duval...... . La
couverture des travaux de l’Assemblée constituante : Hocine Ait Ahmed,. Ferhat Abbas....
Enfin , la carrière aux Affaires étrangères :
Allemagne, New York, Vietnam, encore l’Allemagne, Ministère.... Tout cela
truffé d’anecdotes délectables, parfois cocasses (Giap à Alger ...sa première visite
officielle en janvier 1976.... fêtant , sur les « hauteurs » de Bouzaréah, la fin de la guerre comme il se
devait............Pierre Chich, journaliste algérien
de l’Aps, de confession israélite se voyant refuser
une bière au Novelty –car il ressemblait trop à un
Arabe - durant la période de la « prohibition » décrétée alors par
Ben Bella, Ait Ahmed s’exprimant en anglais et citant Shakespeare à l’Assemblée
et Ferhat Abbas le rappelant fraternellement à « l’ordre ».......Les harragas sans
papiers en Allemagne fournissant des parentés fantaisistes. Ex : untel,
fils de Chadli Bendjedid et de Zahia
Benarous....un autre, fils de Yasser Arafat....Le
comportement étrange d’un couple de jeunes Iraniens juste avant l’atterrissage
à Téhéran.....). Il y eut aussi de moments émouvants comme la manifestation
anti-terroriste des Algériens résidant à Berlin en 1997 , répondant ainsi à une
« manifestation » organisée en faveur des islamistes par la mosquée
(iranienne) de Hambourg
L’Auteur : Né à Akabiou
(Bejaia) en 1936. Moudjahid à partir de 1955 au sein de l’Aln
(wialya 3)....envoyé en 1961 ,
pour se soigner, en RDA. Puis à Prague et en Urss pour une formation de
journaliste. L’Indépendance ! Journaliste puis diplomate durant 36 ans.
Extraits: « La vie (...) était jadis
monotone. Seuls des mariages, des fêtes religieuses interrompaient
quelquefois le train-train quotidien.....Nous avions si peu de sources
d’imagination pour animer nos rêves » (p 13) ,
« Le train longeait les berges de la Soummam deux fois par jour. Il
exerçait sur nous une véritable fascination. Dans les deux sens, son terminus
c’était la mer » (p 19)
Avis : C’est, peut-être, ce genre d’ouvrage qui
manquait à la littérature algérienne. Pour qu’elle puisse démontrer qu’elle est
en « vie ». Des récits de vie , simplement et clairement présentés, sans prétention
d’ « écrivain ».
Très belle photo de couverture prise par l‘auteur lui-même au Vietnam
Ah, si tous nos diplomates à
l’étranger (actuellement en retraite et ne craignant plus l’ « obligation de réserve »)
écrivait !On leur pardonnerait bien des choses.