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Malika Rahal- "L'Udma et les udmistes...."

Date de création: 15-03-2019 17:29
Dernière mise à jour: 15-03-2019 17:29
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HISTOIRE- BIBLIOTHÈQUE D’ALMANACH- ÉTUDE MALIKA RAHAL- « L’UDMA ET LES UDMISTES.... »

L’Udma et les Udmistes. Contribution à l’histoire du nationalisme algérien. Etude historique de Malika Rahal. Editions Barzakh , Alger 2017, 1 200 dinars, 517 pages .

L’ouvrage est issu d’une thèse de doctorat menée sous la direction de Benjamin Stora, soutenue en novembre 2008 à Paris devant un jury composé, entre autres,  de Omar Carlier et de Mohamed Harbi.C’est tout dire quant à la richesse du travail effectué !

C’est, en quelque sorte, l’histoire d’un homme qui a largement contribué à l’éveil de la conscience politique nationale et nationaliste , tout particulièrement durant les années 40 et 50 ( 1946 à 1956)  avec  un parti politique,  l’Union Démocratique du Manifeste algérien, l’Udma.

Son  chef (pas son « zaïm », mais seulement son fondateur et animateur principal avec , à ses côtés, des militants lumineux comme les frères Ahmed et Ali Boumendjel ; ce dernier sera assassiné le 23 mars 1957 à Alger ayant été arrêté le 9 février,   Ahmed Francis, Mohamed el-Aziz Kessous, Ahmed Benzadi, Ahmed Hadj Ali, Hassan Bourouiba,  Abdeslam Benkhellil ..... ), ainsi que les militants, ont longtemps vu leur rôle minimisé, tout particulièrement par les défenseurs de l’histoire dominante (toujours plus nombreux après la victoire et ré-interprétant à leur manière telle ou telle phrase ou idée ou action des politiciens de l’avant-guerre), tenants de l’idée que conduire pacifiquement l’Algérie à l’indépendance allait immanquablement conduire à l’échec. Pour eux , l’Udma n’était autre qu’un simple « rassemblement » regroupant surtout des notables, des intellectuels, des laïcs, de rêveurs,  des francophones....... Tous oublieux de contextualiser et de la réalité du terrain ; un terrain d’après-guerre (la seconde guerre mondiale) bouillonnant, explosif même (on l’a vu lors des manifestations suivie de massacres le 8 mai 1945 dans plusieurs villes du pays : Sétif, Kherrata, Guelma... plus de 45 000 victimes des militaires français et surtout des milices européennes, mûs bien plus par un racisme certain). Tous oublieux qu’il y avait sur la scène politique algérienne, de manière clandestine ou visible mais toujours étroitement surveillés, un ou  plusieurs partis ou mouvements : Udma, Ppa-Mtld, ‘Ulémas, Pca.....une pluralité mise sous tension permanente d’idées avec , toujours , en fond, non sans chocs souvent brutaux , un désir irrépressible d’union des tendances indépendantistes....Au niveau de l’Udma, ceci a  amené bien de ses  militants à « fréquenter assidûment » les geôles coloniales ou l’exil........le parti et son chef à rejoindre, le 25 avril 1956 , (« un grand coup sur la scène internationale ») le combat menée par le Fln/Aln......et Ferhat Abbas à devenir, à partir de septembre 1958,  le (premier) président algérien (Gpra) dans lequel les udmistes « y accomplissent des tâches où l’on reconnait le savoir-faire élaboré durant la décennie précédente....conférant également  au Fln un crédit suplémentaire »......il sera , par la suite, le (premier) président de la (première) Assemblée nationale constituante......pas pour longtemps certes , sa nature démocrate et républicaine entière , respectueuse des libertés, n’ayant pas supporté les nouvelles roueries politiciennes .Il sera , encore une fois, le premier grand responsable politique de l’après-indépendance .......à démissionner.avec un mot-clé : « La démocratie seule est salutaire ».   Il connaîtra , de ce fait , bien d’autres mésaventures avec le « pouvoir ».Et il sera, hélas, le premier chef d’Etat algérien à être emprisonné et malmené par les nouveaux dirigeants du pays.

Malika Rahal analyse donc ce (grand ) moment de l’histoire, en allant dans les détails de l’évolution d’un homme et d’un mouvement politique qui venait de passer, en février 1943, avec la rédaction et la diffusion du Manifeste du peuple algérien, avec fracas, au nationalisme, faisant le procès de la colonisation française et rejetant définitivement l’assimilation ......Un homme et   un parti (qui avait rassemblé , un certain temps, jusqu’à 500 000 membres......) – certes complexes car à « plusieurs vies » - objets de bien des détestations mais qui, peut-être, ont été les moteurs des débats politiques et des discussions les plus relevés du moment .......et dont les idées démocratiques et républicaines connaissent, aujourd’hui, le plus de nostalgie.

 

L’Auteur : Chercheuse à l’Institut d’histoire du temps présent (Cnrs/Paris) . Spécialiste de l’histoire de la colonisation et elle travaille désormais sur la vie politique de l’Algérie indépendante. Déjà auteure de « Ali Boumendjel, une affaire française, une histoire algérienne » (Editions Barzakh, 2011)

Extraits : «  Il semble que,  dans le contexte des premières années de l’indépendance, la dévalorisation progressive de l’engagement aux côtés de Ferhat Abbas puis l’instauration du régime du parti unique par Ahmed Ben Bella aient sapé les cadres sociaux d’une mémoire collective » (p 30), «  L’histoire de la période qui va de 1946 à 1954 a souvent été racontée comme une succession d’avancées et surtout, d’échecs sur le chemin de l’union entre les nationalistes algériens- une union dont l’ultime aboutissement serait la fondation du Fln » (p 137), « Loin de n’être qu’un courant politique, l’Union démocratique du Manifeste algérien est d’emblée projet et entreprise partisane, fondés sur la croyance que le parti constitue la forme supérieure d’organisation collective  »  (p 243), « L’Udma est fortement identifiée à son principal leader, Ferhat Abbas, au point d’avoir été maintenue dans l’ombre de l’imposante stature de ce dernier «  (p 311) ,

Avis :  De la rigueur dans la démarche, de la richesse dans les détails , de la « vérité » dans les informations recueillies, présentées et commentées.....l’histoire des luttes politques d’un pays, mais aussi et surtou, celle d’un homme qui –malgré tout et ayant cotôyé  plusieurs générations militantes - avait l’Algérie , la démocratie et la liberté au cœur.....dans le sang.... jusqu’à sa mort.

 Citations : « J’ai connu la lutte mais j’ai ignoré la haine. L’union dans la démocratie, la fraternité dans la justice, ont été –et demeurent- ma seule religion politique. Mes mandats ne m’ont pas enrichi. J’ai tout sacrifié à mon devoir et à mon idéal » (Ferhat Abbas, in « Le Courrier Algérien », 14 mai 1946, p 49 ) , « La caractéristique la plus significative de l’Udma, son idée centrale, est que c’est par les citoyens qu’il faut faire la république ; le parti doit donc être tout à la fois : un lieu de production de pensée, où les intellectuels prennent leurs responsabilités en partant à la conquête du savoir, et où les adhérents peuvent devenir des citoyens » (p 199), «  Ce n’est pas le rôle de l’historien(ne) d’être le justicier de la mémoire en réhabilitant à toute force ceux qu’il/elle estime injustement traités par leur société «  (p 545)