HISTOIRE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH-
ESSAI ANDRE PAUL WEBER- « LA COLONISATION FRANÇAISE... »
La colonisation française en Algérie. Une
illusion tragique. Essai de
André-Paul Weber (Préface de Aïssa Kadri) . Casbah
Editions, Alger 2016, 318 pages, 950 dinars
Péché capital initial du colonialisme en Algérie, une illusion tragique
fondée « sur le mensonge , la sauvagerie et le
mépris ».
A partir de là, indique le préfacier, « tout devient inéluctable et
coule, en quelque sorte de source, où tout s’éclaire et s ’explique et où
le tomber de rideau est déjà acté » : L’exode des
« Européens » d’Algérie (dont une très large partie des Juifs ,
« assimilés » par le fameux décret Crémieux d’octobre 1870 et qui,
durant la guerre contre la France, ont choisi leur camp.......ainsi que des
milliers de harkis) mis à part les assez nombreux « Justes »,
chrétiens, israélites, communistes, libéraux, resté fidèles à leur pays natal
et à leurs convictions de liberté, de justice, d’égalité et de fraternité .
D’abord, un mensonge , né avec les fausses
justifications pour lancer’ « l’expédition d’Alger » en 1830 ; une entreprise préméditée (en
fait , une véritable croisade , colonisation et évangélisation allant de pair!) depuis bien longtemps.
Ensuite, une sauvagerie , remarquée lors de la
« conquête » du territoire visant , publiquement ou hypocritement, à
développer une politique de la « tabula-rasa », « où le déni de
l’autre, de ses traditions, de ses règles, mœurs et coutumes , vise sinon à sa disparition, du moins à sa
soumission et marginalisation ». Que de massacres ordonnés et/ou perpétrés
par des officiers aux noms désormais tristement célèbres : Bugeaud, Saint
Arnaud, Aumale, Cavaignac......plus proche de nous Massu, Bigeard, Aussaresses, Salan, Léger,
Challe, Lacheroy, TRinquier ...... Que de projets réussis ou avortés ou
reportés pour faire disparaître tout un peuple , déjà
dépossédé de toutes ses terres nourricières et poussé à l’exil. L’Algérie était devenue le « déversoir de la France et
de l’Europe » et les autorités
d’occupation ont tout fait pour importer tous les « déclassés du monde
(dont, dit-on , comble du ridicule , pour
« remplacer » l’indigène local, des Hindous , des Chimois......).
Enfin, un mépris d’abord sournois et
paternaliste puis sans vergogne (par les autorités et par le colon) , de
l’Arabe, l’Indigène musulman , le « melon », le « bicot »,
le « raton », le « crouillat », la « crouille »,
la « moukère », toujours tutoyé et toujours servi le dernier lorsqu’il
n’est pas servi du tout) ......dont le
point l’expression culminante (réaliste ? clairvoyante ? alibi ?
de tout un peu , un peu de tout) déclarée en octobre 1959 (entretien avec Roger
Peyrefitte) du général de Gaulle sur la population algérienne . décrite à travers « des turbans et des djellabas »
et qui « même savants » sont inintégrables. Il est vrai qu’il n’avait pas
, aussi, une haute idée des pieds noirs.
Et puis, toujours de la rancune : ainsi ,il a
fallu attendre , après l’Indépendance, quarante cinq années pour que la France
remette à l’Algérie les plans des mines déposées par l’armée française le long
des fontières....Entre-temps , l’opération menée par l’Anp était terminée mais combien
de morts ?
L’Auteur : Universitaire, économiste de formation,
Docteur d’Etat , professeur honoraire d’économie, enseignant et chercheur
(Universités de Nancy, Reims , Montréal, Essec...), il a exercé des fonctions administratives
variées au sein d’institutions publiques ( Ministère, Conseil de la
concurrence, , Csa...) . Déjà auteur de
deux ouvrages, toujours sur la colonisation française en Algérie
Extraits : « Tandis que l’Indigène a été
exploité, discriminé, méprisé, le colon a été adulé, tout lui a été
permis » (p 25), « Tout au long de ce siècle (XIXè siècle),
le, pouvoir colonial a piétiné les engagements qui avaient été les siens.
Agissant de la sorte, il n’a pas manqué d’exacerber les sentiments des
populations locales » (p 113), « Tout au long de la période
coloniale, le discours sera toujours le même. La victoire est pour demain, il
suffit pour cela que les effectifs militaires soient adaptés aux situations
rencontrées » (p 140), « Le soldat laboureur tient plus de la mythologie
que de la réalité » (p 182), « Comme l’observe très judicieusement
Ch.-A Julien, au temps de l’impérialisme triomphant, qui brisait sans pitié ses
adversaires, « (....) rares furent les Français de métropole qui mirent
leur plume au services des colonisés » (p 226) , « Tout
naturellement, le colon pense qu’il relève d’une essence supérieure et il est
d’autant plus enclin à le croire que la presse de l’époque l’entretient dans
cette croyance. Tel est le contexte dans lequel le mépris colonial prospère « (p
296)
Avis :Ouvrage
fourmillant de détails sur les méfaits de la colonisation...., mais aussi sur
les quelques « bienfaits ». Ainsi , pour
l’auteur, (p 177) se basant sur le fait que « tout au long de
la période coloniale, les musulmans demeureront continûment majoritaires.... » , et grâce aux « progrès médicaux introduits
.... », « l’affirmation
calomnieuse, ici et là véhiculée, voulant que le colonisateur se soit en
Algérie livré à un génocide, est infondée. C’est une falsification de l’histoire ».Une dénégation
participant, peut-être sans le vouloir, à la destruction de la réalité !
Il y a aussi des descriptions assez
terrifiantes de la situation de la communauté israélite lors de l’occupation
turque.....de l’hygiène des villes et
des populations. On ne sait quoi penser !
Citations : « L’Algérie fut (...) le
déversoir des misères de la France et de l’Europe » ( Aissa Kadri, p 19) ,
« On ne construit rien de durable sur le mensonge, la sauvagerie et le
mépris » (p 23), « Que ce soit en France ou en Europe, la prévention
touchant le monde arabo-musulman est « multiséculaire ». Bien après
les Croisades, c’est une constante, pour le monde chrétien (....) l’ennemi est
mauresque, il importe de s’en méfier au plus haut point » (p 153)