HISTOIRE- BIBLIOTHEQUE D’ALMANACH- RECIT ALLAOUA DAKSI-
« DAKSI.A CŒUR OUVERT »
Daksi . A cœur ouvert. Récit de
Allaoua Daksi
(préface de Yahia Guidoum,
Abdelaziz Rahabi. Présenté par Aziz Derouaz). Scolie Editions, Alger 2017. 950 dinars, 309 pages
Dur, dur, pour un citadin , dans une ville cosmopolite dotée d’une bonne
ambiance, d’avoir 16- 17-18 ou 20 ans , au déclenchement de la guerre de
libération nationale.. Encore trop jeune et
pas assez « vieux » pour la lutte armée, l’école , les études, les loisirs, le sport,
avec toujours , au fond de soi, l’irrépressible envie d’en découdre avec
l’occupant.....Tous les moyens sont alors bons, surtout lorsque les grands
frères ont déjà pris le chemin du maquis......On a donc la bagarre avec un jeune pied-noir un peu
trop arrogant, et surtout toutes les aides possibles apportées aux
adultes : distribution de journausx et de tracts
, achats de médicaments et de pataugas, transport de documents dans les cartables,
liaisons.......
L’appel sous le drapeau est alors l’occasion ......de déserter alors qu’il
venait d’être envoyé , avec d’autres appelés, en
France. La grande aventure , dans la lutte active et
la clandestinité, va lors commencer au
sein de la Fédération de France Fln et en relation avec le réseau Jeanson .......jusqu’à l’arrestation début février 1960 (à
22 ans) .......10 ans de prison ......La Santé puis Fresnes puis le camp de Tholl en France
puis Téfeshoun en Algérie où il rencontrera
bien des chefs historiques de la Révolution. Et, toujours, la lutte.
L’Indépendance ! Une toute autre histoire, et un parcours un peu chaotique ,
victime centrale ou collatérale parfois des
mauvaies humeurs et de la versatilité des « décideurs » :
A la présidence avec Ben Bella, dans la haute administration, au Fln, dans le
privé, dans le secteur public économique, dans la création de Fédérations
sportives, nationales et africaine.....surtout le hand ball.
En définitive, un riche et passionnant parcours effectué par un homme passionné
car toujours « engagé » et patriote.
On le relève d’ailleurs dans la structuration de l’ouvrage et dans le style
de l’auteur. Des chapitres courts mais denses. Un récit parsemé de réflexions
la plupart du temps assez critiques.... de confessions parfois assez intimes
(ex de la sexualité d’après-guerre ou
d’après –prison) et des « piques » savoureuses pour le lecteur (mais
pas pour la cible) , toujours nommé clairement
(ex : Ben Bella usant d’un langage « indécents » à l’endroit d’un haut fonctionnaire et en
présence de témoins..... Lors de son
passage dans le secteur privé, quand certains membres de la famille
, son associé et lui-même sont
« passés à la moulinette », pp 183-184.... .....Lors du procès Jeanson, citant le « cran » des uns dont ( !?) le Colonel Argoud - qui a reconnu les exécutions sommaires de
prisonniers Algériens - Vidal-Naquet, Adamov, Claude Simon, Claude Sarraute, Lindon, Maspéro..... et la
dérobade ou la lâcheté des autres dont
Malraux et Michelet, pp 113-114................et d’autres ,
et d’autres....à découvrir . J’ai même croisé les noms de Bouchouareb , de D. Houhou ,
et de Ali Yahia Abdenour....)
L’Auteur : Né en 1938 à Constantine. Moudjahid
(Fédération de France), emprisonné et libéré le 8 avril 1962.Banquier, haut fonctionnaure .....Directeur du Psa
(1971-1973) ,.......président de la Fahb de 1973 à 1975 puis de 2006 à 2009. Membre fondateur
de la Confédération arabe de hand ball (1974)
Extraits : « Depuis le 1er
Novembre 1954, je ne végète plus. J’existe, je vis » (p 123) , « L’emprisonnement des militants a été une grande
erreur dans l‘histoire de la colonisation, car il n’existe pas de meilleure
école pour la formation des hommes qui prendront en charge l’Algérie indépenante » (p 136), « A la fin du mois de
Juillet (1962), les choses changèrent brutalement. Notre ville (Constantine,
après la « prise » de la ville par le commandant Berredjem
El Mili) allait connaître le pire
......Le peuple céda aux bruits des bottes. Le temps de la danse du peuple
était fin. Place à la danse du roi du moment » (p 165 et p 167)
Avis : La vie d’un jeune homme de trop « bonne
famille » résolument engagé dans la lutte de libération
nationale....suivie de la vie d’un « rescapé » confronté aux
nouvelles réalités d’un pays indépendant . Un récit linéaire marqué par trop
d’espoir et beaucoup de désillutions. Représentatif de milliers de parcours
quasi-identiques.
Des photos de famille, des annexes (dont le fameux Pv
d’audition par la police en date du 12 mai 1950, de Ben Bella Mohamed (Ahmed
Ben Bella) ben Embarek après son arrestation ...et un
poème (pp 153-154 et 155) écrit le 22 avril 1962.
Sur le plan technique , beaucoup de
« coquilles », mais couverture réussie avec un titre
accrocheur !
Citations : « Dans la vie, il faut toujours opter
pour le juste milieu, tu dépenses trop, c’est la ruine, tu ne dépenses rien
c’est la famine » (p 44), « A chaque retournement de situation, Ben
Bella, versatile, a su faire de nouvelles alliances, l’ennemi d’hier devenait
l’ami d’aujourd’hui et vice-versa » (p 175) , « Notre mal n’est que
le résultat de l’ignorance combinée au faux savoir semé par les nouveaux
prophètes » (p 228)